Les Caesar du 68ème Régiment d’Artillerie d’Afrique (régiment d’artillerie ayant une batterie opérationnelle) vont sans doute partir tôt ou tard en Afghanistan.
Les débats autour de la projection de ces matériels, me font penser aux commentaires suite au déploiement de 15 Leclerc au Kosovo dans le cadre de la KFOR. Après plus de deux mois de frappes aériennes, le 12 juin 1999, les forces de l’OTAN pénètrent au Kosovo (opération Joint Guardian) alors que les forces serbes prennent la direction de Belgrade. Sept ans après la déclaration annonçant que le char Leclerc est opérationnel, le monstre de 56 tonnes est enfin employé en OPEX. Le CEMAT de l’époque expliquait à la Commission de Défense de l’Assemblée nationale en octobre 1999 que : « Le conflit du Kosovo confirme aussi les choix faits en matière d’équipement […]. L'efficacité de l'emploi de moyens lourds tels que les canons automoteurs ou les chars Leclerc, dont la puissance est un facteur efficace de dissuasion doit également être soulignée ». La raison du déploiement de ces matériels avait pourtant été souvent incomprise : « Soulignant que l'opinion publique et les membres de la Commission n'ont pas nécessairement eu une perception claire des raisons de l'engagement du char Leclerc au Kosovo lorsqu'il a été décidé, M. Jean-Louis Bernard a souhaité obtenir des précisions sur les motivations de cette décision».
Le Leclerc était officiellement une réponse face à la menace la plus élevée : une attaque de l’armée blindée serbe peu émoussée par les frappes aériennes. Mais les Leclerc étaient, à mon sens, bien plus qu’une plus value opérative par son effet dissuasif de masse, par ses capacités de tirs, de renseignement, et de vitesse d’intervention. Les Leclerc devaient prouver alors leur utilité non comme des attractions de parades mais comme des systèmes d’armes pouvant intéresser de futurs acheteurs. Car à part les Émirats Arabes Unis, les possibilités d’exportations n’étaient pas légions. Un test grandeur nature valait plus qu’un grand discours de commerciaux. Au final, la partie publicitaire est un échec mais le RETEX de ces trois années de présence est plus intéressant. Ainsi, des enseignements sont aujourd’hui intégrés dans le programme de développement AZUR pour adapter le Leclerc au combat en zone urbaine. Les divisions blindées soviétiques ne sont plus le seul horizon pour les Leclerc.
Si le Caesar partait en Afghanistan, cela serait aussi une formidable campagne de publicité pour un produit industriel français à fort potentiel. De plus selon l’emploi de cet automoteur de 155 mm, les RETEX pour les manuels d’emploi seront enrichis après cette projection. Il peut être utilisé soit comme « pièce nomade » en appui-feu d’unités en progression dans un rayon de 30 km ou comme pièce fixe dans une FOB pour protéger les bases. Cette éventualité irait à l’encontre d’une de ses principales capacités qu’est sa rapidité de mise en batterie et ses capacités de mouvement. Des pièces de mortiers pourraient sans doute suffire. Sa principale limite reste son poids (qui est en ordre de combat inférieur à 18 tonnes). Car des VAB à 13 tonnes éprouvent des difficultés pour franchir les chemins défoncés et escarpés menant aux cols. L’utilisation uniquement en plaine en limiterait l’intérêt.
Le Caesar en Afghanistan servirait donc pleinement les volontés gouvernementales annoncées : « Morin se fixe pour objectif d'atteindre 6 milliards d'euros de prises de commande en 2008, ce qui représenterait le meilleur résultat de la France depuis 2000 » (dans Le Monde du 5 juin : La France veut accroître ses ventes d’armes). Qui sera convaincu après la Thaïlande et l’Arabie Saoudite pour acquérir des Caesar?
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