Dans son court opuscule intitulé "Sur la télévision" (paru en 1996), le sociologue Pierre Bourdieu introduit, entre autres, le concept de "circulation circulaire de l'information" pour désigner (et dénoncer) le mécanisme de reprise par les médias du propos d'autres médias. Selon Pierre Bourdieu, cela conduit à une uniformisation de l'information. Une des causes est la logique de concurrence entre les médias : il faut absolument parler de ce dont les autres parlent, pour ne pas être accusé d'être passé à côté par son lectorat/audimat, même si nous n'en savons pas plus.
A Ouagadougou, il y a quelques semaines.
Comment opérer discrètement et en sécurité dans un environnement saturé de technologies de l'information ?
C'est là où le bât blesse, puisque cela conduit le plus souvent, non pas à un enrichissement de l'information qu'il serait possible d'attendre (via une remise en contexte, un recoupage de l'information primaire, l'apport d'autres points de vue, etc.), mais bien à une uniformisation forte des contenus. De plus en plus au niveau transnational (les médias de différents pays se reprenant entre eux, la traduction étant une valeur ajoutée méritant en grande partie cette reprise), comme le pressentait déjà à l'époque Bourdieu.
Pour illustrer ce concept, et le critiquer, un exemple est aujourd'hui assez illustratif, bien qu'encore en cours d'évolution et de construction. Il s'agit de la présence censée être avérée de forces spéciales françaises en Libye. Cela s'inscrit dans le cadre plus large d'une quasi prophétie auto-réalisatrice, car s'il y avait des forces spéciales françaises en 2011, il ne peut qu'en avoir également aujourd'hui à la veille d'une nouvelle intervention, aux contours loin d'être bien définies et dont la représentation imaginaire se base en grande partie, et sans doute à tort, sur l'intervention passée.