Un régiment, unique au sein de l'armée de Terre, parfois au fonctionnement mal compris par les autres régiments qu'il côtoie. Dont les membres sont perçus comme "des cow-boys", "persos" et/ou privilégiés. Avec un positionnement particulier, recherché par l'auteur qui ne se voyait ni dans "la lourde" ou "la légère", au sein de l'arme de la Cavalerie, en n'étant pas comme les autres sur des chars. Il faut donc généralement expliquer et convaincre de son utilité et de son emploi, et cela à chaque relève. Faire ses preuves, comme l'explique régulièrement l'auteur, adjoint puis chef de PRP. Et c'est un récit par un sous-officier de recrutement direct, 100% pur produit du 2ème RH, au contact de militaires de différents grades et de différents horizons. Et cela au sein des armées, organisation riche de ses hommes mais également fragile de ses mêmes hommes et de ses rapports humains. Un récit qui ne cache donc pas les rudes coups de gueule, les difficultés de reconnaissance et de positionnement dans les relations hiérarchiques, les échecs, etc. Les liens de confiance entre frères d'armes, comme les déceptions vis à vis de certains lors de ces années à faire "ce métier d'escroc fait par des gentlemen" (ou inversement) y sont décrits.
Le livre offre notamment une vue différente et inédite de la tragique embuscade d'Uzbeen en aout 2008, l'auteur étant alors déployé sur place pour sa 1ère opération en Afghanistan. Grâce à son réseau de sources, il permettra de suivre en quasi direct les opérations, tout en recevant des informations précises permettant aux forces spéciales américaines d'intercepter et détruire les troupes taleban se repliant le lendemain de l'embuscade dans une province voisine. Une opération "dérangeante" pour l'armée française, comme nous l'indique l'auteur, tant le réveil est douloureux. Et un bel hommage à l'action du sergent Penon, infirmier au 2e REP, connu de l'auteur. Un militaire au comportement héroïque lors de cette embuscade, où il y laissera la vie.
"On fait de la figuration", râle l'auteur. Qui avec beaucoup de lucidité décrit alors une lente descente : réduction des rapports humains, immense fatigue, enfermement dans le sport, irritation exacerbée... Jusqu’à un soir de Noël où une fin tragique est évitée de peu. "Je sais, ils savent aussi", en parlant de ses camarades arrivés juste au bon moment. "Mon chemin de croix ne fait que commencer. [...] Je suis finalement vaincu". Le récit frappe par sa franchise, notamment sur la conscience intime d'être un blessé de guerre non pas physique mais psychique. Avec une description précise de ce qu'est ce stress post traumatique, "où quand le sac que nous portons de toutes nos opérations et nos expériences, avec ces cailloux accumulés au contact direct de la guerre, devient trop lourd pour nous, et qu'il faut mieux le poser", comme nous l'indique l'auteur. Réagir face à "ce mal puissant qui vient de l'intérieur". Cela sera donc un rapatriement en France en janvier 2012, et le début d'un long cheminement.
Si les 8 ans qui séparent aujourd'hui de ce moment ne sont pas racontés avec autant de précision, cette remontée, longue et difficile (avec une complications de santé), est bien présente tout au long des pages. D'abord, parce que, comme nous l'explique l'auteur, l'ouvrage est partie prenante de ses soins, "une écriture thérapeutique". "Partez d'une feuille blanche et écrivez", lui avait conseillé une psychologue militaire de la CISPAT qui le suivait. Un premier manuscrit avait été rédigé, au passé, il y a de cela plusieurs années, avec déjà un plan venu naturellement qui est celui de l'actuel ouvrage. Pour sortir ses souvenirs et, au passé, comme pour remettre au plus loin ses événements et les repousser. Puis le manuscrit a été repris plus récemment, au présent, avec l'aide d'une connaissance qui est professeur à Normale, pour donner cet ouvrage.
Pour l'auteur, il s'agit autant de raconter, "informer sans déformer" comme sa formation de hussard lui a appris, d'expliquer et de témoigner. Éventuellement de servir de déclencheur : "je ne fais pas ça pour ça, mais si cela peut aider seulement 2 ou 3 militaires, eux aussi touchés comme moi, alors cela sera déjà beaucoup". En étant transparent sur les séquelles et les réactions. Prochainement dans le civil et actuellement en reconversion, l'auteur se lance donc dans une autre vie : "aujourd'hui je me suis relevé [...]. Des postes en bureau qui m'ont appris à m'ennuyer [...]. Je sais désormais vivre avec mes fantômes". Notamment grâce à ce livre "qui a sa vie propre d'objet que je ne peux pas contrôler", tiré à 1.000 exemplaires, après une campagne de financement mené, notamment, auprès des anciens camarades, toujours pas loin. Récemment en rupture de stock chez certaines plateformes de distribution, il est aujourd'hui surtout trouvable chez l'éditeur (Éditions Maia). Et il appelle peut être demain une suite : "j'ai des tonnes d'anecdotes en stock. Plein de choses non encore écrites. On verra la réception. Pourquoi pas donner une suite sous un autre format. Voir une série".
A suivre (ici sur la page Facebook de l'ouvrage), et clairement un livre à découvrir. Avec une lecture dont nous lecteurs ne sortons pas, d'une certaine façon, indemne. Avec ces interpellations de l'auteur qui peuvent toucher chacun d'entre nous, sur un quotidien de militaires pas connu de tous, voir complément méconnu. Et des questions lancées, auxquels il nous faut apporter des réponses : Qu'avons-nous fait pour et de ces militaires ? Sommes-nous conscients de ce que ce contact avec la guerre donne ? Une écriture qui éveille la conscience en tout cas. Mission réussie.
Le psychologique est quelque chose dont on ne parle que depuis quelques années:
RépondreSupprimerhttps://www.rfi.fr/fr/podcasts/lignes-de-défense/20201129-défense-parole-de-soldats-blessés-en-opérations-extérieures
De saines lectures donc...
RépondreSupprimerhttps://lemamouth.blogspot.com/2021/03/golfe-afrique-afghanistan.html
Bon courage à lui et à tous ceux qui en souffre.
RépondreSupprimerhttp://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/01/15/pres-de-3-400-militaires-blesses-physiques-et-psychiques-dep-21804.html
Le renseignement humain, l'un des métiers les plus durs du monde...
https://www.dna.fr/defense-guerre-conflit/2021/04/28/personne-n-est-a-l-abri
Les succès et les possibilités offertes par le renseignement électronique lui font beaucoup d'ombre, surtout dans une société où tout le monde est connecté sur les réseaux sociaux:
https://www.courrierinternational.com/article/enquete-les-soldats-americains-trahis-par-leurs-smartphones
La plupart du temps, la principale qualité d'un soldat est de savoir s'ennuyer.
C'est une réalité que l'on ne voit pas dans les clips promotionnels pour le recrutement:
https://www.vice.com/fr/article/v7ga8a/carnet-photographique-dun-jeune-soldat-francais
Un bon reportage très intéressant est passé dans la lucarne magique, il n'y a pas longtemps:
https://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/en-operation-avec-les-medecins-militaires-au-sahel-sur-lcp_ae2e7402-8d5a-11eb-830a-943a5001010e/
Avec des soldats jetables, qui pour 30% d'entre eux partent au bout de leur premier contrat, la déperdition d'énergie et d'expérience est le plus grand défi pour les armées en général et l'armée de terre en particulier.
http://www.opex360.com/2019/05/18/les-armees-peinent-a-compenser-les-departs-de-leurs-officiers-et-sous-officiers-par-de-nouveaux-recrutements/
http://www.opex360.com/2019/11/03/larmee-de-terre-a-un-besoin-imperieux-de-sous-officiers-qualifies/
https://www.leberry.fr/bourges-18000/actualites/la-nouvelle-ecole-technique-de-sous-officiers-est-lancee-a-bourges_13926375/
Sans parler de traumatismes, voir comment les hommes vivent ailleurs et se replonger dans sa vie d'occidental repus et insatisfait n'est pas une expérience si commune.
https://www.vice.com/fr/article/n7bvd8/la-vie-apres-larmee
Il y a ceux pour qui c'est vraiment dur, hélas:
https://www.publicsenat.fr/article/societe/stress-post-traumatique-chez-les-soldats-une-fois-qu-on-est-sortis-de-l-institution
Pourtant les gars, on pense toujours à vous et à ceux qui sont partis, même si le temps passe...
Répondre à la question « pourquoi nos soldats sont ils morts ou blessés à vie ?» est toujours une question plus redoutable concernant une opération lointaine que dans les guerres d’antan, où l'action avait lieu sur son prpopre territoire où contre un ou des pays voisins…
RépondreSupprimerhttps://www.academia.edu/50370552/Tout_un_monde_Pr%C3%A9sent%C3%A9_par_Eric_Guevara_Frey_Radio_Play_RTS
http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/07/01/le-district-d-alasay-en-kapisa-est-tombe-aux-mains-des-talib-22276.html
Une question qui se pose à tous les pays occidentaux qui agissent dans des expéditions lointaines en coalitions:
https://www.journaldequebec.com/2021/07/26/forces-armees-a-quoi-a-servi-leur-heroisme
Une petite armée professionnelle fait que les soldats sont sur-sollicités sur des opérations qui les déconnectent complètement du confort de notre société et de ses préoccupations futiles.
RépondreSupprimerhttps://www.leprogres.fr/defense-guerre-conflit/2021/11/11/marc-staszak-homme-blesse-des-guerres-modernes
Avant, on en parlait pas, tout simplement.
https://experiencecombattantelafaye.blogspot.com/2022/01/entretien-julien-bry-le-soldat-face-la.html
Écrire leur a fait du bien, les lire permet de se rendre compte qu'on est pas seul.
Le renseignement humain est devenu de plus en plus difficile et ce depuis un sacré bout de temps:
RépondreSupprimerhttps://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-l-histoire/affrontement-est-ouest-la-guerre-est-froide-les-espions-sont-chauds
En plus, le renseignement technologique devient en plus en plus accessible:
https://observers.france24.com/fr/europe/20220208-ukraine-troupes-russes-geolocalisation-osint-coupsure-elintnews
Et c'est visuel!
https://www.lemonde.fr/international/article/2022/02/24/guerre-en-ukraine-ce-que-les-images-montrent-de-l-ampleur-de-l-attaque-et-de-son-impact-sur-les-civils_6115136_3210.
Avec des biais cognitifs certains: celui de se prendre pour un être omnipotent, notamment.
http://www.slate.fr/story/210389/il-ny-aura-plus-de-nuit-eleonore-weber-le-plaisir-du-regard-qui-tue-cinema-entretien-interview
Les armées sont de plus en plus réticentes à mettre des soldats au sol:
RépondreSupprimerhttps://www.rtl.fr/actu/international/les-armees-plus-reticentes-a-mettre-la-vie-de-leurs-soldats-en-danger-explique-amelie-ferey-7800937675
La stratégie de l'ultra-léger se heurte au concept "du zéro mort":
http://www.paxaquitania.fr/2022/01/quatre-blesses-du-cos-au-burkina-faso.html
Tuer ou mutiler à vie un équipage de véhicule français a un coût modeste: 22 euros.
https://www.africaradio.com/news/22-euros-pour-une-bombe-artisanale-l-ied-l-arme-du-pauvre-au-burkina-160698
Les forces spéciales plaident pour avoir des drones MAME:
http://www.opex360.com/2021/08/02/le-francais-eos-technologie-developpe-un-drone-mame-pour-repondre-aux-besoins-des-forces-speciales/
Certains évoquent même l'achat urgent de drones low-cost comme le Bayraktar turc pour les soldats français...
Combien de temps faire creuser une cache à la pioche à un jeune soldat français, majoritairement issu d'un milieu urbain et à lui faire faire ses besoins dans un sac congélation ne va pas être considéré "comme une brimade", au vu l'évolution de notre société ?
https://theconversation.com/armes-autonomes-et-soldats-augmentes-quel-impact-sur-les-valeurs-des-armees-168295
Cela peut arriver vite...
Le renseignement humain a fait voyager des militaires français partout dans le monde, même si aujourd'hui on n'entend parler que du renseignement technologique:
RépondreSupprimerhttps://www.athena-vostok.com/articles/le-monde-du-renseignement-et-de-l-espionnage
À ne pas confondre avec les "services":
https://theatrum-belli.com/livre-la-nouvelle-guerre-secrete-unites-clandestines-et-operations-speciales/
https://theatrum-belli.com/reflexions-sur-les-forces-speciales-par-eric-denece-cf2r/
Même si parfois...
https://www.lefigaro.fr/international/massoud-m-a-demande-de-former-ses-commandos-le-recit-d-un-ancien-officier-francais-de-massoud-20210909
Car ce que font les services est parfois assez degueulasse pour être indigne du port de l'uniforme...
Pourtant puisque "nous avons des pulsions du néolithique, des états médiévaux et des armes de Dieux", il faudrait toujours être attentif, aujourd'hui comme hier, aux renseignements d'origine humaine.
http://guerres-et-conflits.over-blog.com/2021/12/d-afrique-du-nord-en-indochine.html
Lz problème en terme de renseignement,c'est qu'il arrive que ce que l'on croit vrai, ne le soit pas...
RépondreSupprimerhttps://www.lefigaro.fr/international/guerre-en-ukraine-le-kremlin-aurait-arrete-deux-chefs-du-fsb-selon-le-times-20220312
Ça finit toujours par des drames et selon les pays, il ne fait pas bon le prendre par-dessus la jambe.
De plus en plus on oublie l'humain que ce soit dans les armées ou pour les forces de l'ordre.
RépondreSupprimerhttps://lemamouth.blogspot.com/2020/10/les-fs-terre-en-conclave.html
Une société où bientôt toute la population française sera surveillée par des solutions numériques, car tout le monde est suspect pour le pouvoir.
https://www.lefigaro.fr/vox/monde/chine-et-occident-convergeront-ils-vers-une-gestion-des-individus-par-algorithmes-20211226
Comme les américains.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/01/les-etats-unis-sont-devenus-un-pays-de-riches-par-les-riches-et-pour-les-riches_6107845_3232.html
Alors que les attentats déjoués l'ont été grâce au renseignement humain!
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/10/15/58-des-59-attentats-dejoues-depuis-six-ans-l-ont-ete-grace-au-renseignement-humain_6015520_3224.html
Le fric, lui, est allé dans les bonnes poches...
https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/07/15/le-budget-de-la-lutte-contre-le-terrorisme-disseque_6046248_3224.html
Savoir laisser les choses sur le paillasson de sa maison, en théorie on se dit qu'on peut.
RépondreSupprimerAprès, il y a des fois, voilà...
https://ainsi-va-le-monde.blogspot.com/2022/04/enora-chame-lorsque-je-quitte-la-syrie.html
Camille
Ils sont bien en Alsace, mieux qu'à Sourdun...
RépondreSupprimerhttps://www.dna.fr/defense-guerre-conflit/2023/01/12/les-hussards-a-l-epreuve-de-la-haute-intensite