Si l’on tente d’analyser les effets de l’interventionnisme dans le cadre de « la guerre contre le terrorisme » ou de « la guerre contre la terreur » vis-à-vis des ennemis déclarés : une nébuleuse et un ensemble complexe de miliciens, kamikazes, combattants, soutiens de régimes ou de personnes prônant principalement une idéologie islamiste c'est-à-dire une vision politique de la religion (et non islam-ique : qui a un rapport avec l’Islam), au cours du temps, certains changements s’opèrent quelque fois en se chevauchant.
Après le 11 septembre 2001, une Coalition menée par les Etats-Unis épaulée par l’Alliance du Nord dans le Nord-est de l’Afghanistan renversent le régime des taliban à majorité pachtoune représentée plus que dirigée par le « commandeur des Croyants » le mollah Omar. L’opération « Liberté immuable » met le pied dans la fourmilière d’un amalgame composite de combattants, d’apprentis terroristes, d’étudiants en religion, de chefs de cellules. Dans un mouvement de physique dynamique des fluides, la majorité fuient à pied, à cheval ou en mobylette le pays occupé par les forces dites « occidentales » des différents mandats. C’est ainsi qu’après de durs combats comme dans la prise des grottes dans les montagnes de Tora Bora, beaucoup de combattants sont éliminés et le semblant d’organisation de la nébuleuse d’Al-Qaeda semble plus ou moins touché. Le non-centralisme des structures ne permet pas alors une victoire définitive en s’attaquant au centre de gravité clausewitzien malgré quelques succès tactiques quand régulièrement des hauts responsables, bien vite remplacés sont tués. Les éléments adversaires se révèlent être une hydre à plusieurs têtes qui repoussent dès qu’une est tranchée.
En Irak, en 2003, l’opération Iraqi Freedom, au nom d’une guerre que l’on définit comme préventive si on ne veut pas rentrer dans des considérations sur les ressources énergétiques à saisir, les Américains là aussi épaulée par une Coalition multinationale remportent la Deuxième guerre d’Irak en renversant le régime de Saddam Hussein censé entre autres soutenir activement les membres d’Al-Qaeda devenu déjà alors un label plus qu’une organisation. Commence alors après le renvoi des membres de l’ancienne armée du régime Baasiste, une insurrection locale puis très vite avec les aides de combattants venus d’horizons divers, une lutte de guérilla saupoudrée de terrorisme contre les forces occidentales « occupantes ». L’Irak devenant alors une destination de choix pour de nombreux volontaires à la Guerre sainte ou Jihad. Et c’est ainsi que ce champ d’affrontement va servir de point de fixation non forcément voulu par les force coalisées pour tous ces hommes armés, pour ceux qui refusent « l’ordre américain », pour les antioccidentaux… Une bataille que l’on voulait décisive se jouait en Irak avec la présence du plus gros des capacités militaires de ces combattants au sein de ce laboratoire de lutte grandeur nature. Le traitement de la situation en Irak glissant peu à peu sur un plan de politique nationale et non de religion transnationale, des avancées sécuritaires eurent lieu, des cellules et des réseaux furent décimés et une translation géographique s’est peu à peu opérée, et s'opèrent.
Plusieurs événements récents au Pakistan et en Afghanistan peuvent venir corroborer cette possibilité de déplacement de la zone de friction. Tout d’abord c’est l’offensive du printemps 2008 des chefaillons locaux et des néo-taliban quelque fois ayant l’expérience de l’Irak, mouvement de reconquête particulièrement complexe à endiguer dans des régions comme l’Helmand au Sud. C’est encore les tentatives de contrôle par les forces armées pakistanaises des régions de sa frontière occidentale face aux bases arrière, écoles coraniques et madrasas qui se développent dans la quasi impunité pour les étudiants en religion. Et enfin tout récemment c’est l’attentat dans un hôtel d’Islamabad causant près de 60 morts quelques jours après la déclaration du nouveau président pakistanais Zardari de lutter sans compromission contre toutes menaces islamistes nuisant aux intérêts du Pakistan (d’ailleurs que l’on prenne comme point de départ chronologique la désignation du président ou sa déclaration, la réactivité des « terroristes » est relativement courte pour mettre sous pression le nouveau gouvernement par un attentat spectaculaire). L’interventionnisme servirait alors par propagande plus d’un tremplin pour une multiplication des volontaires (recrutés grâce aux pertes civiles lors de frappes aériennes, par le soutien et la mise en place de régimes corrompus dits infidèles, etc.…). La balance précise des volontaires étrangers face aux éléments locaux étant difficilement quantifiable. L’effet obtenu serait l’inverse de ce qui était recherché au départ.
La chute du régime taliban marqua la fin d’une façade offerte et d’un état d’inspiration islamiste. Un état transfrontalier dont parle Olivier Kempf de même nature, à la croisée du Pakistan et de l’Afghanistan, aujourd’hui non complètement utopique, serait alors une étape. La fin d’un cercle ? Simple prospective improbable ou possibilité réaliste ?
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