dimanche 26 octobre 2008

Quelle place faut-il accorder aux États dans les Relations internationales contemporaines?

C’est une question au cœur de vifs débats ces derniers temps. La réponse donnée dépendant souvent de la formation reçue, à mon avis. Je rappelle avant de développer qu’après quatre années d’Histoire à l’université, j’ai nécessairement pris un tant soit peu le moule de l’historien et donc que mes propos seront sans doute partisan.

Pour donner une définition, admise à minima, un État peut se définir comme une forme d’organisation politique d’une société. Nécessitant au moins trois éléments pour son existence : un territoire avec des frontières (étudions le cas des gouvernements en exil), une population sur laquelle son pouvoir s’impose (le cas de l’Antarctique) et un pouvoir politique organisé (avec des institutions = des structures, et des administrations = des services). La reconnaissance internationale faisant de plus en plus partie des critères pour l’existence de l’État, reconnaissance qui passe souvent par le « Fiat » de l’ONU.

Pour schématiser à l’extrême, deux camps s’opposent pour une analyse des Relations internationales contemporaines. D’un côté, les défenseurs de la place primordiale de l’État, avec une analyse stato-centré où l’État même contesté ces dernières décennies, est néanmoins prédominant pour comprendre les relations entre états et entre les peuples au sens large. De l’autre côté, avec en tête quelqu’un comme Bertrand Badie (professeur à Sciences Po Paris et auteur d’ouvrages comme La fin des territoires ou Un monde sans souveraineté), les défenseurs de la thèse présentant les acteurs non-étatiques ou privés comme les fournisseurs et les créateurs principaux des Relations internationales : étudiant le rôle tenu par les ONG, les organisations intergouvernementales, les syndicats, les Internationales (socialiste ou communiste), les Églises, les organisations sportives, les médias, les opinions, les banques, les mafias, les entreprises multinationales et j’en oublie.


Les uns répondant aux autres que les États se cachent souvent derrière des organisations où la participation et l’identité se font par rapport à l’appartenance à un État ; que de plus certaines structures citées font toujours appel à l’État dans certains cas montrant bien la reconnaissance du rôle de l’État même par ces dernières. Et les autres répondant aux uns que les États gardant leur champ régalien, ont néanmoins des sujets qui leurs échappent complètement subissant, plus que régulant, certaines Relations à cause entre autres, de la place prise par la mémoire ou les imaginaires, que les États saisissent rarement.

Lorsque l’on analyse les formations et les études des différents débatteurs, on remarque que les historiens sont majoritaires dans le camp de la défense du rôle tenu par les États. Ce qui peut s’expliquer sans doute par le recul permis par la connaissance des siècles qui ont vu le développement des immenses machines qui depuis le 15ème siècle se construisent peu à peu pour donner les États dits modernes. Antériorité par rapport à la multiplication récente des autres acteurs.


En face, les politologues, spécialistes des sciences politiques (domaine généralement associé au Droit en France), fondent plus leur réflexion dans une Histoire du temps présent ou Histoire dite « immédiate », mal aimée des historiens. Ce sont des observateurs privilégiés et contemporains de cette multiplication d’organisations que l’on voit poindre (en réponse aux historiens) dès 1863 par exemple pour la Croix Rouge.

Les changements sont souvent longs et rarement instantanés : pris dans un mouvement modifiant les grandes caractéristiques pas à pas. Le conflit Russie-Géorgie de l’été 2008 étant là pour montrer que l’opposition des États d’un certain ordre westphalien n’était pas mort : ordre apparu suite la signature du traité de Westphalie en 1648 mettant fin à la guerre de Trente ans et entérinant la fin de la prétention à l’Empire ainsi que la victoire des États modernes et nationaux où la Raison d’État du Cardinal de Richelieu par exemple, l’emportait sur les considérations religieuses de la lutte entre les catholiques et les protestants.

P.S: Suite aux remarques de certains lecteurs, trouvant les propos trop ardus pour des néophytes, je vais tenter de mettre plus régulièrement dans les articles quelques notions et définitions qui peuvent paraitre évidentes pour les quelques professionnels et amateurs éclairés qui me lisent. Un peu de pédagogie est un bon moyen de développer ce lien « Armée-Nation » qui est une des finalités me poussant à tenir ce blog autour de l’axiome : « On ne peut comprendre et apprécier que ce que l’on connait ».

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