mercredi 10 août 2022

Innovation - Le démonstrateur Scarabée d'Arquus

Ai eu la possibilité de faire récemment quelques tours de pistes d'essais sur le plateau de Satory dans le démonstrateur de blindé Scarabée d'Arquus, pendant une petite heure. Passant notamment après l'actuel chef d'état-major de l'armée de Terre (CEMAT) qui avait embarqué dedans quelques semaines auparavant.

Démonstrateur (et non prototype), même si les puristes des définitions pourraient en débattre, permettant de développer, tester, intégrer et faire gagner en maturité un certain nombre de technologies. Certaines jusque là plutôt issues du monde civil et parfois déjà matures pour ces cas d'usage, mais passées à cette occasion dans un environnement militaire représentatif.

Principalement (et sans être exhaustif) dans le domaine de la propulsion (avec l’hybridation, notamment via un moteur V6 de 300 ch en thermique et 100 ch en électrique, avec 3 batteries différentes), de l'architecture (avec un groupe moto propulseur d'un seul tenant placé à l'arrière notamment), de l'ergonomie (avec, par exemple, la gestion des différents modes de propulsion par le pilote), etc.

Le fruit des efforts visible aujourd'hui est le résultat d'un programme "secret" débuté discrètement avec moins d'une dizaine de personnes concernées en 2017, défrichant les grands choix architecturaux, à un blindé beaucoup plus mature à ce jour pouvant bénéficier des technologies de tout un groupe industriel (avec une équipe dédiée restreinte, et un budget évidemment non extensible). Avec quelques heures de travail et des milliers de kilomètres d'essais déjà de réalisés.

Le Scarabée est aujourd'hui autorisé par la Direction générale de l'Aviation civile (DGAC) à embarquer dans des avions civils avec les batteries installées, suite à un long et exigeant processus de certification quant au respect des normes de sécurité, ce qui constitue une première mondiale civile et militaire, et vient valider les progrès réalisés dans la sécurisation de différents ensembles (notamment face aux risques d'incendie des batteries, de résistance aux variations de pression, etc.).

mardi 2 août 2022

Publication - "Pour une BITD de haute densité au service d’un modèle cohérent" (DSI Hors-Série n°85) (+MAJ)

Dans le numéro Hors-Série de DSI n°85 consacré à "Guerre de haute intensité - Quelles adaptations pour les forces armées françaises ?" actuellement en kiosque, vous pouvez retrouver un article sur les réflexions et adaptations à mener sur l'articulation forces-DGA-BITD et sur le pourquoi, le quoi et le comment atteindre un modèle cohérent.
 
En remerciant le rédacteur en chef, Joseph Henrotin, de m'avoir aimablement titillé sur le sujet dans la continuité de certains précédents articles publiés sur ce blog (notamment celui ci, qui a eu quelques échos et a suscité quelques réactions...), et d'avoir bien voulu accueillir au final, le fruit de mes réflexions personnelles (qui n'engagent que moi).

MAJ 1 : Le sommaire complet est disponible ici.

"La simultanéité de certains facteurs oblige à une vaste réflexion sur l’articulation forces armées - Direction Générale de l’Armement (DGA) - Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD) et sur les actions entreprises. Avec une adaptation des réponses apportées au pourquoi, au quoi et au comment, faite de manière couplée, car les efforts, actuels et réels, sur l’un ou l’autre des constituants du système, ne pourraient suffire à eux seuls à faire face aux grands enjeux qui se présentent.

Nul besoin de sur-noircir l’actualité et le futur prévisible d’un certain nombre de facteurs endogènes et exogènes ayant un impact sur ceux qui orientent, développent, produisent, utilisent et soutiennent les équipements, matériels et produits utiles aux forces armées pour observer une conjonction de tendances, voir un effet domino, qui oblige à une adaptation. Si ces événements de nature très différente ne doivent pas forcément inquiéter en tant que tels, leur convergence interroge sur la pertinence de maintenir les orientations actuelles ou de choisir une simple évolution progressive, et non une évolution majeure. Envolée du coût des matières premières (non compensé pour le moment par des capacités de production hier non rentables qui aujourd’hui le redeviennent), difficultés logistiques d’approvisionnements, multiplication des zones de tensions et élévation du niveau de ces mêmes tensions, raréfaction en cours de certaines ressources, concurrence exacerbée à l’exportation avec des acteurs industriels non plus émergents mais pleinement émergés complexifiant l’atteinte du modèle économique marché domestique / marché export, difficultés et enjeux de recrutement mais aussi de fidélisation des talents, etc. Leur addition, en peu de temps, et l’incertitude qui pèse sur leurs évolutions à court ou moyens termes doivent obliger à penser autrement pour résoudre au mieux une équation complexe.

Au-delà du confort opératif mis à mal depuis quelques années pour les forces armées, avec une épée qui a pris une longueur d’avance sur la cuirasse (l’attaquant ayant tendanciellement un temps d’avance sur le défenseur) et une généralisation de certaines capacités nivellantes, le confort productif connu jusqu’alors est lui aussi en train de s’étioler. Hier, le cadencement globalement sous optimal (en qualité, en coûts, en délais) des capacités de développement et de production, sans revenir sur de multiples exemples connus de programmes en retard, trop chers, ou aux spécificités techniques non atteintes, pouvait éventuellement être une situation quasi-supportable (et encore, puisque des vies étaient en jeu). De plus, l’innovation technologique, permanente, brandie comme la garantie principale permettant de conserver un temps d’avance sur les risques, les menaces et les adversaires, pourrait être devenue aujourd’hui, par bien des aspects, plus une source de faiblesse qu’une source de force (de contraintes plus que d’opportunités). Avec des conséquences aujourd’hui non maîtrisées sur la complexification de la mise en œuvre des systèmes et donc la hausse des coûts d’entrée pour les utilisateurs et les maintenanciers (temps de formation, opérations plus complexes de maintenance…), la hausse des coûts de production, d’utilisation et de soutien, la réduction des effets de masse du fait des couts unitaires sur toute la durée de vie, etc. Enfin, l’assurance relative actuelle de la disponibilité des alliés (avec leurs capacités de production, la maitrise de certaines technologies ou la détention de certaines capacités), de leurs stocks, de l’accès aux matières premières ou transformées, des sources d’énergie disponibles, des outils productifs peu touchés à ce jour (en étant plutôt loin sur les arrières des lignes de front et peu visés par des approches indirectes : sabotage, piratage, etc.) et de la sécurité des flux (surtout perturbés, mais encore peu menacés, même si de premières alertes apparaissent) n’est en rien forcément une garantie pour demain [...]".
La suite est à lire dans le magazine. Commentaires bienvenus.