vendredi 31 décembre 2010

Le meilleur de l'année 2010 - 2/2

La deuxième et dernière partie des meilleurs articles parus en 2010 sur Mars Attaque parmi 128 billets écrits durant l'année (presque deux fois plus qu'en 2009!).

Juillet :

- Je ne comprends plus rien : influencer et faire passer ses idées, cela ne s'improvise pas au coup par coup. Petit coup de gueule qui a eu le mérite de faire bouger certains concernés...
- La dissuasion par la déclassification : montrer publiquement l'étendue de ses connaissances plutôt que la cacher peut servir dans le rapport de force.

Août :

- Embrigadement via les jeux vidéos : au Liban et ailleurs, les jeux vidéos sont des médiums très employés pour faire passer des messages politiques.
- Lecture - Gagner les cœurs et les esprits : pour retenir une lecture, prenons celle-ci sur l'interrogation à la française d'un mantra répété à tort et à travers.

Septembre :

- Dix principes de propagande militaire : un décalogue toujours d'actualité pour les communicants et autres faiseurs d'histoires militaires.
- La réunification allemande et les feux de signalisation : débat autour de l'harmonisation ou non des symboles des feux de signalisation afin de faciliter la réunification.
- Silence, paroles et organisation : digressions sur le rôle du silence dans l'efficacité d'une organisation. A mettre en parallèle avec celui sur la liberté de ton outre-atlantique.

Octobre :

- Storytelling et mise en condition avant projection : l'art de raconter des histoires pour mieux préparer les infirmiers et leurs familles avant leur départ en opérations.
- Pour l'interopérabilité du futur apprenons le mandarin : propos pas sérieux sur le fait que si nous baissons la garde d'autres prendrons surement la place.

Novembre :

- Humour - Les militaires et les hauts potentiels : blague très privé sur le petit monde des officiers qui arrive dans le top 3 des meilleurs articles de l'année.
- La Chine en Asie Centrale : l'autre voie? : quelle place pour la Chine dans le nouveau Grand Jeu qui se trame en Asie Centrale. L'article n°1 de l'année et de loin!

Décembre :

- Jamais personne n'a eu une quelconque stratégie : où comment transposer le débat de l'œuf et de la poule dans la sphère stratégique. J'y reviendrais.
- Wikileaks et le professionnalisme des diplomates : point de vue différent sur les différentes affaires autour de ce "chevalier blanc" de la divulgation.

Sur ce, il est maintenant temps pour moi de vous dire à tous à l'année prochaine pour douze nouveaux mois fidèle au poste afin de faire encore mieux!

jeudi 30 décembre 2010

Lecture - L'approche globale dans la gestion civilo-militaire des crises

Le dernier cahier de l'IRSEM intitulé "L'approche globale dans la gestion civilo-militaire des crises" offre un large panorama sur ce concept. Derrière ces termes, qui aujourd'hui sont autant des buzzwords pseudo-savants qu'une réalité bien concrète sur des théâtres de résolution de crise, se cachent le fait de faire à plusieurs et bien différentes actions.

Dans cette étude sont présentés l'histoire du concept, les éléments qui conduisent à l'élaborer tel qu'il est aujourd'hui, les différentes compréhensions selon les États et les organisations (passionnant mais inquiétant dès lors que les uns et les autres travaillent ensemble...), les défis qu'ils posent (culturels, organisationnels, etc.), etc. Un vaste tour d'horizon facile à lire.


On notera l'ouverture de l'auteur sur les nouveaux champs de recherche possibles des Security Studies (dès lors que ces dernières restent pragmatiques et d'une certaine manière utiles aux praticiens...) et on regrettera qu'à force de privilégier les sources étrangères (moins connues et donc à découvrir), on en vienne à ne plus rien présenter de français.

mercredi 29 décembre 2010

Le meilleur de l'année 2010 - 1/2

Première partie de la rétrospective des meilleurs articles de l'année 2010 selon le double critère de l'avis narcissique du tenancier de ce blog et de l'avis plus sévère du nombre de lecteurs les ayant consultés.

Janvier:

- GI's Jane sourit et ne montre plus les griffes : l'engagement des femmes Marines en Afghanistan au sein des Female Engagement Teams (FET).
- Pas de "Réveil" pashtoun possible : du danger et de l'échec de jouer avec les rivalités anciennes en Afghanistan, et de l'éclatement des liens ancestraux.

Février :

- Surge militaire, surge civil et surge canin : quelques considérations sur l'emploi toujours plus important des chiens en zone de guerre. De loin, la meilleure poêle à frire contre les IED!
- Une opération peu surprenante : quand l'absence de surprise (autrefois redoutée) est un élément déterminant d'une opération.

Mars :

Le calme plat...

Avril :

- Les barbus ne sont pas toujours ceux que l'on imagine : du port de la barbe en Afghanistan, modifications des pratiques sociales engendrées par la guerre.
- Perdre la guerre à cause des burgers : restauration rapide et saturation des voies d'approvisionnement. D'ailleurs, il paraît qu'ils sont de retour...

Mai :

- L'Oncle Sam en treillis en Afrique : explorer pour Washington une autre voie afin d'être présent différemment en Afrique à travers l'US Africa Command.
- Le retour des "tankers without tanks" : les cavaliers britanniques sont employés dans des missions d'infanterie tandis que leurs camarades américains arrivent en M1-Abrams.

Juin :
- Le futur réseau ferré afghan au cœur d'enjeux stratégiques : aux pays des Afghans, la multiplication des projets ferroviaires posent quelques questions.
- L'USMC et Charles Darwin : toute organisation, même le si bien implanté Corps des Marines, est obligée de justifier son existence pour survivre.
- Quand l'armée américaine déménage : le basculement vers l'Afghanistan avec en parallèle la baisse des effectifs en Irak conduit à de sacrés chassés-croisés logistiques.

samedi 25 décembre 2010

Joyeux et saint Noël

Sachant que je suis plus dans l'esprit réalisation annuelle de crèches à la mode Légion Étrangère et mémoire religieuse :



Que poursuite du Père Noël sur les écrans radars de la NORAD (puisque je sais qu'il est déjà passé en Afghanistan) :


Je vous adresse à tous chers lecteurs un très Saint Noël. Que cette période si particulière soit pour vous tous le véritable moment de joie partagée en famille qu'elle est.

jeudi 23 décembre 2010

Café stratégique n°4 - Les enjeux de la prolifération nucléaire

Pour son quatrième Café Stratégique, l'Alliance Géostratégique recevra Colomban LEBAS qui viendra parler des enjeux de la prolifération nucléaire. Chercheur et enseignant à l'ENS et à Sciences-Po Paris, et anciennement résident à l'Institut de Recherche Stratégique de l'École Militaire, il traitera d'un sujet dont il est un expert depuis de nombreuses années.

Ainsi pour discuter, débattre et comprendre les questions et les conséquences du traité START, le cas iranien comme nord-coréen, la présence des armes nucléaires américaines en Europe, les mesures de contre-prolifération et bien d'autres sujets, rendez-vous le 12 janvier 2011 au Café Le Concorde de 19h à 21h, 239 bd Saint Germain - Paris (plus d'infos).

Entrée libre, débats assurés et qualité garantie!

mardi 21 décembre 2010

Les deux voies respiratoires de la Chine

L’analyse géopolitique s’apparente parfois à de la physique dynamique des fluides ou à de l’étude d’un système respiratoire. Ces modèles simples sont encore plus utiles à l’approche de vacances clôturant une année chargée qui a anesthésié le cerveau.

Évacuer le trop plein…

Aujourd’hui, la Chine ne se contente plus de son territoire et a pour vocation, envie ou besoin (même si elle s’en cache) de se projeter en dehors sous de multiples formes : navire de guerre au large de la Somalie, achat de terres en Afrique, mine au Kazakhstan.

Il y a en elle des énergies prêtes à se répandre. Elles semblent aujourd’hui canalisées par quelques portes de sortie par lesquelles elles se déversent. Des espaces assez resserrés parfois permettent à la Chine de projeter sa puissance à l’extérieur

Par deux grands boulevards…

Le premier serait la Mer de Chine pour piquer plein Ouest et avoir accès à cette autre Asie, à deux océans (Indien + Pacifique). Le projet de réouverture par la russie de la base de Cam Rahn au Vietnam n’est pour le moment en rien limitant.

Le deuxième serait l’Asie Centrale où le Grand Jeu à deux (Russie + USA) parmi les « stan » s’essouffle et laisse la place pour un troisième larron. Ce positionnement donne facilement accès par les tubes au grenier à gaz et pétrole, à l’Europe de l’Est, etc.


Entourés de hauts murs

Car en effet, il y a au Nord le bloc russe, territoire non-vierge de résistances donc attaqué à ses marges mais sans le traverser de part en part. Pourtant, il conduit rapidement aux espaces du Grand Jeu Polaire où la Chine ne s’est pas encore positionné et à l’Europe de l’Ouest.

A l’Est, le Japon qui sans impressionner outre mesure, demande tout de même à être contourné afin d’éviter les maraudeurs militaires brandissant à leur passerelle la bannière étoilée américaine.

A l’Ouest, le sous-continent indien. Les rapports sont autant cordiaux que réservés, donc délicats. Des incompréhensions perdurent sur l’invasion douce de l’Afghanistan, pour ne parler que de cela. Il faut sans cesse se rassurer l’un l’autre (cf récente visite du PM chinois).

Fin de « l’analyse »

Des envolées explicatives de ce type, j’en fais une par an pas plus. Hélas finalement, car aussi limitées et bancales soient-elles, elles donnent l’impression de beaucoup mieux comprendre des changements et des mouvements vus ou ressentis.

dimanche 19 décembre 2010

Un bon, voir très bon, mois de novembre

Les statistiques pour le mois de Novembre sont tombées et confirment la belle progression sur les derniers mois de ce blog. Cela fait un peu prétentieux toutes ces auto-congratulations, mais le blogueur marche aussi au nombre de visites reçues quotidiennement.

Il n'y a plus un seul jour où le nombre de visites est inférieur à 300, ce qui fait que la barre des 10000 visiteurs par mois est atteinte pour la première fois en plus de deux ans d'existence. Résultat encourageant à confirmer (sans doute pas ce mois-çi : boulot, vacances, dodo, etc.).
Quant à "l'aura et la réputation" (termes un peu pompeux) calculées grâce au nombre de liens entrants et sortants, elles sont au beau fixe comme le prouve la place de gagnée au classement international de wikio (18) et le passage sous la barre des 1000 au général (987).

Ce n'est pas une raison pour se reposer sur ces lauriers! Direction le clavier et l'écran désespérément vide pour de nouvelles réflexions sur l'actualité en Afghanistan, la géopolitique de la Chine, la suite du débat sur les modèles en général et notre modèle, etc.

vendredi 17 décembre 2010

Des petits nouveaux

Une volée de petits nouveaux dans la blogosphère géostratégique à ajouter aux favoris de votre navigateur, à vos abonnements gérés par Google reader ou à vos flux sur Netvibes.

Tout d'abord, annonçons Le Fauteuil de Colbert tenu par Thibault LAMIDEL. Il publie avec une cadence de MG-42, le privilège de l'étudiant? Si l'auteur se concentre surtout sur les problématiques de stratégies maritimes et de technologies navales (Mistral, renouveau de la flotte russe, FREMM, etc.), il y en a pour tous les goûts (Rafale, JSF, etc.).

Ensuite, une jeune pousse à encourager. Il s'agit du blog intitulé Les carnets d'AFS tenu par un étudiant en histoire passionné et à l'esprit curieux. Ne manquez pas pour la curiosité et l'intérêt du débat, son plaidoyer sur l'usage de l'esperanto. Mais aussi son dernier billet permettant de juger de l'engagement concret au sein des BG 1500 européen.

Enfin, pour ceux qui veulent suivre dans les détails l'actualité des forces armées russes, je conseille deux blogs Russian Defence Policy et Russian Military Reform. Intéressant pour suivre la restructuration et la modernisation d'une armée au coeur de problématiques économiques, diplomatiques, sécuritaires et politiques.

PS: le retour à un rythme de publication "normal" sur Mars Attaque n'est pas prévu pour tout de suite...

mardi 14 décembre 2010

Lecture (s) - De l'Angola au Vercors même combats!

La dernière livraison des publications du Centre de Doctrine d'Emploi des Forces (CDEF) vient de tomber avec pas moins de deux Cahiers de la Recherche Doctrinale consacrés à des cas de figure opposés géographiquement : l'Angola et le Vercors.

Le premier, rédigé par un habitué en la personne d'Antonin Tisseron, traite de la guerre d'indépendance en Angola et des guerres civiles qui suivirent. Cette analyse d'un conflit exotique et inconnu se révèle particulièrement instructive pour suivre les différents acteurs : Portugal, Afrique du Sud, UNITA, communauté internationale, mercenaires, etc.
Le deuxième s'intéresse au cas du Vercors pendant la Seconde Guerre mondiale et à la difficile mise en application des principes de guérilla par les maquisards dans ce massif. Si la résistance française est souvent prise comme exemple d'insurrection, elle est finalement rarement traitée. C'est maintenant chose faite à travers ce prisme d'analyse.

PS: un agenda professionnel plus que chargé m'empêche de publier régulièrement sur ce blog, au moins jusqu'à la fin de cette semaine. Je m'en excuse auprès de vous, chers lecteurs. Par contre, il est toujours possible de me suivre grâce à mon fil Twitter où je publie mes dernières lectures.

jeudi 9 décembre 2010

Mars Attaque soutient nos soldats en OPEX

C'est tout naturellement que je m'associe à l'initiative de Laurent Lagneau/Zone Militaire qui vise à envoyer à nos soldats en opérations un maximum des messages de soutien et de réconfort durant cette période si particulière.

Même impersonnels, courts ou écrits par des anonymes, ces messages sont toujours accueillis avec joie et gratitude (si j'en crois les nombreux témoignages recueillis) par des soldats demandeurs, c'est tout naturel, d'une reconnaissance qu'ils méritent, je le pense sincèrement.

C'est donc une initiative extrêmement simple, il n'est pas demandé de grandes et belles phrases, qui marque concrètement notre attachement et notre sympathie envers ceux qui seront loin de chez eux, bien souvent au nom de quelque chose que nous partageons.

En ce mois de décembre 2010, près de 8.700 militaires français sont loin de chez eux, de leur famille et de leurs proches amis.

Que ce soit en Afghanistan, au Liban, en Côte d’Ivoire, au Kosovo, au Tchad, au large de la Somalie, à bord des navires de la Marine nationale, ils veillent sur notre sécurité et remplissent les missions qui leur ont été confiées par le gouvernement français, parfois au péril de leur vie. Depuis le début de cette année, 20 militaires français ont payé de leur vie leur engagement au service des autres. Et l’on ne saurait oublier ceux qui, revenus en France gravement blessés, doivent mener un combat quotidien pour retrouver une vie normale.

Aussi, et à l’occasion des fêtes de fin d’année, pour témoigner votre soutien et votre sympathie à l’égard de ces hommes et de ces femmes qui ont choisi le métier difficile des armes pour servir les autres et leur pays, vous êtes invités à déposer un message sur cet espace. Ayons également une pensée pour leurs familles, dont certaines, malheureusement, ont perdu un des leurs au cours d’une opération extérieure.

Pour avoir accès au formulaire de commentaire qui vous permettra de déposer votre message, cliquez ici.

lundi 6 décembre 2010

Wikileaks et le professionnalisme des diplomates

Alors que de nombreuses analyses publiées récemment ont tendance à dénoncer l'attitude des diplomates américains, un intéressant point de vue essaye de prouver le contraire et de démontrer leur professionnalisme.
Though embarrassing to American diplomats, the cables are valuable precisely because are filled with astute, well-informed assessments of world leaders and geopolitics. For the first century of U.S. history, the consular service was a haven for corruption, in which diplomats were typically elite, self-interested merchants. This mattered because illegal trade and warfare could generate hefty profits for American diplomats and their allies, even as they threatened U.S. national security [...].

Had State Department missives been leaked during the first century of the American republic, they would have revealed more about their authors' ambitions than about statecraft. Today's dispatches are unsettling, not because they reveal personal corruption, but because they demonstrate accurate, insightful, professional judgment. In other words, their authors are guilty of that unforgivable sin of politics: honesty.
Même si cette analyse peut être jugée partielle devant la teneur de certains télégrammes diplomatiques, elle a pour mérite de ne pas crier au loup alors qu'il n'y a pas de véritables raisons de dénoncer l'attitude des diplomates américains.

Pour mémoire, les fonctions d'une mission diplomatique sont clairement définies par l'article 3 de la Convention de Vienne sur les relations internationales du 18 avril 1961. Cette définition ne me semble pas en opposition avec l'attitude tant décriée de ces diplomates américains...
Les fonctions d’une mission diplomatique consistent notamment à :
a) Représenter l’État accréditant auprès de l’État accréditaire;
b) Protéger dans l’État accréditaire les intérêts de l’État accréditant et de ses ressortissants, dans les limites admises par le droit international;
c) Négocier avec le gouvernement de l’État accréditaire;
d) S’informer par tous les moyens licites des conditions et de l’évolution des événements dans l’État accréditaire et faire rapport à ce sujet au gouvernement de l’État accréditant;
e) Promouvoir des relations amicales et développer les relations économiques, culturelles et scientifiques entre l’Etat accréditant et l’État accréditaire.
Merci à Laurent pour la source.

dimanche 5 décembre 2010

Conférence - Culture et stratégie (+MAJ)

ATTENTION : j'apprends à l'instant que la conférence est annulée et reportée au mois de janvier 2011. Dès que j'aurais plus d'informations, je les mettrais à nouveau en ligne. Tenez-vous prêt!

Le jeudi 9 décembre se tiendra une conférence sur le thème "Culture, influence et enjeux économiques. Retour d'expérience sur des victoires". Elle aura lieu au 171, rue de Grenelle à Paris (VIIème) à partir de 19h. L'inscription se fait ici, très facilement.

Elle sera l'occasion d'annoncer la création d'un nouveau think-tank, Culture&Stratégie, ayant pour ambition d'étudier les ressorts de la culture et souhaitant servir de moteur pour renforcer les liens entre les acteurs économiques et ceux du monde de la culture.

La culture, sous toutes ses formes, est l'un des liens les plus forts pouvant relier les hommes. C'est donc aussi un vecteur puissant et efficace d'influence dès lors que la culture est employée à des fins stratégiques comme outil pour transmettre des valeurs et faire passer des messages.

Si le sujet peut sembler à la marge par rapport à ce blog, je publie néanmoins cette annonce car le promoteur du projet est quelqu'un que j'estime, et ensuite discuter des questions stratégiques (même orientées Défense) en ignorant les ressorts de la culture est assez restrictif.

Et mon petit doigt me dit qu'il est fort probable que l'on y parle, entre autres, de l'impact positif qu'a eu la diffusion au Liban des œuvres de l'édition française sur l'acceptation de la force française engagée là-bas sous mandat de l'ONU (FINUL)...

samedi 4 décembre 2010

Jamais personne n'a eu une quelconque stratégie!

L'intervention de Stéphane Taillat (En Vérité) jeudi dernier à l'IFRI a eu entre autres mérites de soulever une question sur laquelle nos réflexions stratégiques (sur la blogosphère comme dans les sérails plus formels) n'apportent pas, à mon sens, les réponses convenables.

"De quoi s'agit-il?"

Pour redonner le contexte, il y était question de contre-insurrection et d'adaptation de l'US Army. Aux résultats positifs obtenus par la COIN en Irak au niveau tactique et opératif s'opposaient l'échec stratégique. Car (en gros), la COIN n'est pas un dérivatif/substitut à une vraie stratégie américaine pour l'Irak qui n'existe pas.

Et moi de conclure, qu'il n'y a pas à dire, nous bloquons toujours au même niveau (remarque déjà de nombreuses fois dénoncée sur nos blogs respectifs) : cette articulation entre la stratégie de niveau politico-militaire pas claire voire inexistante et ce qu'elle oriente dans les faits (COIN et autres déclinaisons)...

Et alors ?

Je sais pas si c'est notre modèle théorique (d'inspiration Clausewitzienne ou néo-Clausewitzienne) qui est caduque (me voilà donc dans le clan des pourfendeurs de Clausewitz) ou alors nous qui ne le mettons pas en œuvre comme il faut. Quoiqu'il en soit, cela ne marche pas. Je rejoins alors le clan des sceptiques et consorts à la sauce du colonel Gentile pour la COIN : cela ne marche pas donc c'est le concept qui est mauvais bien plus que l'application qu'y en est faite.

Et l'Histoire, sur lequel nous nous appuyons pour nous instruire, n'est même pas là pour nous aider avec de nombreux exemples rassurants de réussite. Pour moi, la stratégie de différentes entités au cours des siècles reste souvent une analyse a posteriori (une véritable construction narrative) souvent du fait de l'historiographie des vainqueurs.

Au mieux, la stratégie est quelque chose d'intégrée/d'intériorisée dans un élan des énergies plus que quelque chose de formalisée, comme nous en rêvons tous pour sortir de guêpiers : Afghanistan, Irak, déclin relatif française, etc.

A l'aide !

Me sentant encore un peu léger sur ces idées (il manque dans les veines de ma réflexion théorique du Girard, du Aron et autres), j'hésite un peu avant de me faire fusiller sur place publique avec un article plus fouillé intitulé : "Jamais personne n'a eu sur le moment une stratégie... mais cela ne nous empêche pas d'essayer!"

PS : de nombreux mails sont échangés quotidiennement entre les membres de l'Alliance Géostratégique, souvent dans le cadre de débats animés dont vous profitez, chers lecteurs, que trop rarement.

Les quelques notes rédigées ici à la va-vite s'inscrivent dans ce cadre. Devant l'intérêt de telles réflexions, nous avons décidé de les mettre en ligne afin de recueillir votre aide, votre avis et vos commentaires sur un débat un peu plus théorique que d'habitude.

Alors, et vous qu'en pensez vous ?

mercredi 1 décembre 2010

Café stratégique n°3 - Géostratégie des espaces maritimes

Après le deuxième Café stratégique (dont le compte-rendu quasi exhaustif est maintenant disponible), l'Alliance Géostratégique remet ça.

Nous recevrons le 8 décembre Hervé Coutau-Bégarie qui nous parlera de son sujet de prédilection : l'eau salée dans un cadre géostratégique.


Pour ceux qui ne le savent pas encore, ce débat aura lieu le 8 décembre au Café Le Concorde de 19h à 21h, 239 bd Saint Germain - Paris (plus d'infos).

M. Coutau-Bégarie est une figure de la recherche qui a beaucoup œuvré au maintien d'une féconde stratégie française (voir notamment le site de l'Institut de Stratégie et des Conflits).

Comme les deux éditions précédentes, nul doute que cela se révélera passionnant ! Entrée libre mais nombre de places limitées...

lundi 29 novembre 2010

Wikileaks et accès à des informations détonantes (+MAJ)

EGEA a tendu la perche du débat en citant les quelques réflexions émises sur Twitter, en particulier sur le flux Marsattaqueblog, à propos des "révélations" mises en ligne depuis hier sur le site Wikileaks. Quelques notes en sténo.

1/ le processus est maintenant bien rodé : effet d'annonce de la part de Wikileaks avec des coups de publicité ponctuellement distillés, les médias de masse donnent une caisse de résonance en promettant de futurs scoops, etc. puis c'est le moment fatidique tant attendu de la publication.

2/ Commence alors le temps de l'analyse, et dans le fond peu de véritables découvertes. Cela s'apparente plus à la mise à disposition de faits pouvant étayer des analyses déjà faites et connues des personnes un minimum intéressés par les relations internationales.

C'est le cas des relations tendues entre les états pétroliers du Golfe vis à vis de l'Iran, du travail de renseignement effectué par les acteurs de la diplomatie, les frappes sur l'Iran, l'apport de spécialistes britanniques de l'Iran, la vision américaine de l'alliance vs les intérêts, etc.

[MAJ] 2 bis/ l'effet médiatique et plus concret dans les relations entre chancelleries devra retomber dans les jours à venir, un peu comme les révélations sur l'Irak ou l'Afghanistan qui n'ont pas modifié en profondeur la gestion de la situation.

3/ Reprocher aux diplomates de réfléchir sur ce qu'ils voient et le transmettre à leur hiérarchie me semblent être de l"hypocrisie pour l'homme de la rue et l'opinion publique prompte à en faire de même (moi le premier). On serait les premiers à les critiquer si ils ne le faisaient pas.

4/ La vision de Wikileaks à propos de la protection des personnes est pour moi limitée. Ce n'est pas tant les personnes citées qui courent des risques, mais des potentielles victimes de réactions épidermiques induites par le contenu de ces messages.

5/ le choix des cibles de Wikileaks oblige à poser la question incontournable avant d'analyser l'intérêt de ces sources : quel est l'objectif de Wikileaks? pour qui bosse Assange? un vrai chevalier blanc de la morale, de l'hypocrisie, en quête de pouvoir?

6/ Et je finirais par un vers de Narcisse dans la pièce Britannicus de Racine (scène 4, acte IV), utile à garder en mémoire : "Il n'y a point de secret que le temps ne révèle"!

samedi 27 novembre 2010

La Chine en Asie Centrale : l'autre voie?

Réflexion rédigée dans le cadre d'une étude réalisée pour l'École de Guerre Economique (EGE).

Alors que depuis le XIXème siècle, la Chine est principalement tournée vers sa frange littorale, elle porte depuis l’effondrement de l’URSS un intérêt marqué à sa destinée continentale. Cette aspiration vers l’Ouest pour le déploiement de sa puissance est un élément de son actuelle approche économique et politique.

Le real-business chinois

La Chine profite de sa relation géographique privilégiée avec les pays d’Asie Centrale ex-soviétique pour entretenir des relations non dénuées d’intérêts économiques avec ces marges. En effet, la province du Xinjiang possède des frontières communes avec le Kazakhstan, le Kirghizstan et le Tadjikistan. Spectateur de l’affrontement historique entre les États-Unis et la Russie, la Chine en reçoit aujourd’hui les dividendes en se positionnant sur un autre échiquier. En effet, et contrairement aux deux autres puissances, l’allégeance à la politique de Pékin n’est pas la condition sine qua none pour la signature de contrats.

Les deux parties en présence trouvent alors chacun des intérêts. Les entreprises chinoises ont accès à de nouveaux marchés pour écouler leurs produits bas de gamme et peuvent exploiter les richesses du sous-sol. Quant aux entreprises locales et aux états hôtes, ils participent par des joint-ventures à l’extraction des ressources touchant une rente énergétique et parallèlement bénéficient des infrastructures généralement comprises dans les contrats. En effet, se faire bien voir en construisant, par exemple, des voies de communications peut se révéler utile pour les entrepreneurs chinois afin de remporter les futurs appels d’offre.

Capter les énergies vitales

Ayant élevé l’indépendance énergétique au rang de priorité stratégique, Pékin agit en conséquence. Face aux possibles ruptures des voies maritimes (instabilité dans le détroit de Malacca et au Moyen-Orient ou blocus maritime par les flottes américaines), la Chine diversifie ses approvisionnements[1]. En plus d’être un relatif réservoir à énergies, l’Asie Centrale est surtout un lieu de passage pour l’acheminement de ces denrées indispensables pour maintenir le bond en avant économique chinois. Ainsi, Pékin établit un réseau de gazoducs et d’oléoducs débutant ou passant par l’Asie Centrale avant de rejoindre sa façade maritime.

Des projets d’envergure sont opérationnels ou vont l’être prochainement. Fin 2009, un gazoduc reliant les champs gaziers du Turkménistan à la Chine est inauguré, œuvre de la China National Petroleum Corporation (CNPC). Au Kazakhstan, la Chine détient à la fois les champs pétrolifères et les tubes. Cette mainmise illustre la part prépondérante du Kazakhstan (plus de 60%) dans le commerce sino-centre-asiatique. Pékin tente aussi de s’accaparer l’énergie hydroélectrique en construisant des centrales sur les fleuves Amou-Daria et Syr-Daria, moyen de ne pas subir sa position de pays situé en aval et donc dépendant des pays en amont.

Un mariage pas si serein

Le caractère inédit de cette approche douce est cependant à relativiser. La Chine ne rechigne pas à se placer sur un échiquier d’affrontement plus traditionnel et moins consensuel que les implantations d’Institut Confucius en Ouzbékistan ou au Kazakhstan[2]. Ainsi, elle renforce aussi sa présence militaire en prenant part à des manœuvres sous la bannière de l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) et en renouvelant certains équipements obsolètes des armées centre-asiatiques. Se faisant, elle n’hésite pas à se définir comme une alternative à l’hégémonie américaine et donc à être en faveur, comme la Russie, d’un monde multipolaire.

L’activisme des islamiques locaux resserre aussi les liens entre Moscou et Pékin qui ne souhaitent pas un embrasement de leurs marges. Ce risque peut s’étendre en trouvant un écho favorable chez les indépendantistes ouïghours. L’instabilité politique est aussi un frein au développement des affaires. Lors de la crise au Kirghizstan en avril 2010, Moscou et Washington ont mené le jeu, laissant Pékin subir la succession de Kurmanbek BAKIYEV. Cet exemple est symptomatique de tensions pouvant contaminées la région et que Pékin ne peut guère influencer. L’approche apolitique, évitant de se mêler des affaires intérieures, trouve ses limites.

[1] Marlène LARUELLE et Sébastien PEYROUSE, L’Asie Centrale à l’aune de la mondialisation: Une approche géoéconomique, Coll. Enjeux stratégiques, Paris, 2010.

[2] Cette stratégie de long terme a pour premier effet d’accroître massivement le nombre d’étudiants issus de ses pays au sein des grandes universités chinoises.

Site complémentaire : Chroniques méso-asiennes (Alexandre GUERIN)

jeudi 25 novembre 2010

Naplouse-Mogadiscio: même combat (ou presque)



Au début du mois d'avril 2002, lors de la seconde Intifada, les forces de défense israéliennes lancent l'opération Defensive Shield. Les opérations menées dans la ville de Naplouse, au nord de Jérusalem, sont étudiées avec soin par les experts de la guerre urbaine, encore aujourd'hui.

Afin d'éviter les pièges explosifs disséminés, et les tunnels creusés et défendus par les unités para-militaires du Hamas ou du Fatah, les forces israéliennes (une brigade de parachutistes et la brigade Golani) contournent ces systèmes de défense par une approche innovante.

Plutôt que de subir l'aménagement de l'espace tel que pensé par son adversaire, Tsahal reprend l'initiative de la pénétration dans le tissu urbain. Ils utilisent des tunnels en surface, creusés dans les murs et les plafonds afin de circuler à l'abri, de maison en maison.

Ils évitent ainsi les espaces ouverts (rues, cours, etc.), champs de tirs pour les adversaires, ou les portes et les fenêtres, points d'entrée généralement piégés. L'espace urbain ne commande plus comme avant le mouvement des troupes, mais l'inverse : les troupes commandent au terrain.

Les IDF ne sont pas les seuls "architectes opérationnels" éclairés par les lectures des philosophes français Deleuze et Guattari. Mais dans certains cas, cela ne s'apparente pas à un transfert culturel d'innovation à travers un apprentissage académique ou des circuits officiels.

Récemment, un reportage de France 24 nous plongeait au cœur de Mogadiscio aux côtés des forces de l'Union Africaine qui essayent de résister comme ils peuvent à la guerre d'attrition spatiale des shebab dans la capitale somalienne.

Les soldats ougandais passent par les murs afin de réduire l'espace avec leurs adversaires afin de grignoter les quartiers disputés. Méthode moins poussée que celle des experts israéliens du combat en zone urbaine, mais innovante pour la culture stratégique de ces contingents.

Articles complémentaires:

mardi 23 novembre 2010

Cocorico - ils parlent de nous !

Le dernier rapport du CAAT (Counterinsurgency Advisory and Assistance Team) mis en ligne sur le Small Wars Journal traite de l'impératif du partenariat appliqué au cas afghan. Le CAAT est le centre de réflexion de la FIAS, son think-tank, placé dans l'organigramme au niveau du général Petraeus, commandant de la FIAS et actuellement en France. Il est en charge de produire de courtes réflexions afin de conseiller les exécutants et d'orienter les pratiques.

Le partenariat, en particulier entre les troupes de la coalition et les forces armées nationales afghanes, est la notion qui récemment revient le plus fréquemment après l'attention porté à l'impératif de protection, l'environnement culturel, la limitation des frappes aériennes, etc. Petraeus ne fait qu'amplifier un mouvement ancien, aujourd'hui fondamental dans le processus de transfert des responsabilités.

Pour résumer, McKiernan avait souhaité que les forces afghanes soient associées dès la planification des opérations, puis McChrystal avait donné des consignes pour que les forces afghanes et celles de la coalition vivent et combattent ensemble, que les opérations menées sans forces afghanes reçoivent l'accord des commandants des Regional Command, et que les missions soient menées par un nombre semblable de forces afghanes et de forces de la coalition.


Pour revenir au rapport daté du mois de septembre 2010, il tend à prouver que le partenariat est la méthode la plus rapide pour améliorer l'efficacité et l'autonomie des forces afghanes. Énonçant qu'il n'existe par une mais des méthodes pour y parvenir, il décrit plusieurs bonnes pratiques observées sur le terrain et énonce les défis pouvant rendre complexes ces pratiques.

Parmi les exemples cités, deux décrivent des pratiques mises en place par les troupes françaises en Kapisa, pratiques à leur honneur puisqu'elles prouvent un degré important d'intégration des forces afghanes dans les opérations de la Task Force La Fayette. Alors qu'encore récemment, je me plaignais des difficultés des militaires français à faire connaître leurs pratiques, force est de constater que des signes positifs existent. Il ne s'agit pas de le relever pour la gloriole mais de constater une petite mais réelle avancée de l'influence française, pouvant porter ses fruits dans des débats stratégiques servant la politique de puissance de la France.

Sans sur-estimer le chemin parcouru et sous-estimer celui qui reste à parcourir, les militaires français opèrent en Kapisa de telle manière que des progrès sont visibles. Une manière de faire et une manière d'être qui peuvent orienter les réflexions d'autres contingents. Ainsi, sans dénoncer sur la place publique et sous-estimer la déformation du reportage, le contingent danois semble, par exemple, ne pas être sur la même longueur d'onde...

Articles complémentaires :

dimanche 21 novembre 2010

Rappel - Café stratégique n°2 - Défense anti-missile balistique

Les journalistes et les dirigeants politiques ou militaires n'ont pas arrêté d'en discuter durant ce week-end (sommet de l'OTAN à Lisbonne oblige), l'Alliance Géostratégique fait bien mieux qu'en parler approximativement. Elle vous donne l'occasion de comprendre en profondeur les tenants et les aboutissants de cette affaire !


Les tambours de la blogosphère battent le rappel pour que vous ne manquiez pas le 2nd Café Stratégique de l'Alliance Géostratégique consacré à la défense anti-missile balistique. Il réunira professionnels et amateurs autour de Corentin Brustlein. Nous vous attendons le 25 novembre de 19h à 21h au café Le Concorde, 239 bd Saint Germain - Paris (plus d'infos).

vendredi 19 novembre 2010

Lecture - Développement, et relations civiles et militaires en Afghanistan

Le Centre de Doctrine d'Emploi des Forces (CDEF) a mis en ligne son dernier Cahier de la recherche doctrinale. Il traite des complexes relations entre organisations civiles internationales et militaires sur la zone de responsabilité française en Afghanistan.

Bien qu'ayant un objectif commun, ces deux entités ont parfois du mal à s'accorder. Pourtant la sécurité et le développement sont deux notions imbriquées et dépendantes, qui s'accommodent mal de la méfiance réciproque entre ces acteurs.


L'auteur de l'étude analyse de manière mesurée les relations entre ces deux effecteurs, interrogeant le contexte culturel, les habitudes, les préjugés mais aussi les zones de concordance, les voies de rapprochement, les pistes de travail en commun, etc.

« Et pour réveiller Clausewitz en titillant son éternelle formule, nous dirons que l’aide humanitaire est la continuation de la politique par d’autres moyens que la guerre »

Jean-Christophe RUFIN

Articles complémentaires:

mercredi 17 novembre 2010

Ce drôle de machin bizarre qu'est la COIN

J’adore ces débats qui éclosent et qui rebondissent sur la blogosphère stratégique française. Dans la continuité de premières interrogations, JGP pose plusieurs questions qui méritent plus qu’un commentaire. Ainsi, je propose ici quelques pistes non exhaustives.

- "90% d'une COIN sont politiques, sociaux, économiques et idéologiques, et seulement 10% sont militaires". Alors comment se fait-il que l'écrasante majorité de ceux qui écrivent sur le sujet appartiennent au "monde militaire" ?

En bafouillant quelques propos sur le sujet, je ne déroge pas à la règle en étant moi-même issu de ce milieu. Je ne peux que me désoler de cette observation mais les regrets ne suffisent pas à faire avancer le schmilblick.

Une des raisons me semble être que la première demande des populations auprès desquelles les contre-insurgés interviennent est toujours la sécurité physique (rationnellement, la vie est un bien précieux). Dans une vision très limitée de la sécurité, qui est au moins autant un sentiment qu’un état de fait, les principaux fournisseurs qui répondent à ce besoin sont les forces militaires. Même si les faits démontrent que la présence du contre-insurgé favorise parfois le maintien de l’insécurité qu’il est censé combattre.
Si cette demande prioritaire explique peut être cette focalisation, il me semble aussi que la culture stratégique et les conditions historiques d’appropriation progressive par les militaires de ce sujet ne sont pas étrangères à cet état de fait. Sous la pression du temps politique, humanitaire, médiatique, les décideurs se tournent plus facilement vers ceux qui l’ont déjà fait, même si ce fût parfois des échecs. Rétrospectivement, la COIN devient une bonne vitrine pour les militaires afin de démontrer la pertinence de leur maintien et de leur utilité.
Ensuite sur le plan de la recherche, les sujets militaires sont vus avec condescendance (les terribles « nazis » de l’étude du fait militaire) en particulier dans le domaine des sciences politiques. En France et dans une moindre mesure à l’étranger. Ces matières sont plus concernées par les débats sur l’intellectualisation du sort de l’UE, le devenir des minorités et autres sujets moins en accord avec la COIN. Néanmoins, la COIN est aussi pensée à la marge à travers l’étude des processus DDR, du SSR, « state-building », « nation-building » et autres concepts plus sciences po.
Finalement, les militaires rouspètent en sortant le mantra : « c’est pas un problème militaire, c’est un problème politique ». Mais le politique ne semble pas avoir le loisir de penser à ce lourd dossier transmis par les militaires, qui s’en occupaient depuis si longtemps.


- Ne pas faire ce genre de distinction (COIN hors du territoire national ou sur le territoire) n'entraîne-t-il pas par ricochet une vision de la COIN très néocoloniale, étant menée par des forces occidentales sur des territoires africains ou asiatiques ?

Nous sommes au cœur d’un débat sémantique dont il est difficile de sortir avec, il me semble, une vision très manichéenne du bien et du mal au sujet du fait colonial. Là encore, l’Histoire nous joue des pièges.
L’exemple de la reconquête de son territoire par la Colombie est un exemple particulièrement intéressant à mettre en perspective avec les redondances parfois mal appropriées : Algérie, Indochine, Malaisie, Vietnam, etc.

- Différentes approches sont mises en œuvre par les officiers français sur le terrain afghan. Pourquoi celles-ci ne reçoivent pas plus d'attention de la part de nos médias. Est-ce dû au fait qu'il s'agit là de sujets trop techniques et complexes pour le grand public ? Et plus largement, comment s'inscrivent-elles dans la COIN que pratiquent les Américains ? Peut-on parler de COIN à la française ? Voire carrément de COIN française ? Influent-elles sur les réflexions des grands noms tels que Nagl, Kilcullen ou Petraeus ?

J’avais déjà répondu à la fin d’article d’AGS sur le désintérêt vis à vis d’un sujet trop pointu, peu vendable. Je rajouterais quelques points.

On pourrait aussi citer la stratégie du maillage particulièrement fin du territoire à travers les FOB, COP et autres redoutes. Les officiers français mettent en place ces approches, qui sont combinatoires plus que différentes, sur une des plus petites provinces d’Afghanistan (si ce n’est la plus petite) : la Kapisa. Nous avons un tropisme franco-français sur la question qui fait croire à sa grande importance, mais cela reste très modeste.
Néanmoins, c’est toujours avec intérêt que les grands chefs militaires alliés viennent sur la zone de responsabilité française : McChrystal est passé deux fois en quelques semaines, Petraeus le fait, Kilcullen s’est rendu sur place, etc. Néanmoins, il est difficile de sortir des clés d’une situation concentrée en un lien restreint. En gros, les Américains nous laissent faire notre tambouille dans notre coin, mais ne prendront pas le risque de copier à grande échelle un modèle qui marche sur un petit espace. D'ailleurs pas sur que cela fonctionne hors de Kapisa.
De plus, le fait que les militaires français aient aussi du mal à faire de l’influence/communication explique aussi peut être cela. Le faire bien, bien le faire savoir et avoir le droit de le faire savoir…

PS: je signale d'ailleurs la mise en ligne aujourd'hui de la doctrine française interarmées "Contre-Inssurection". La lecture et les remarques viendront par la suite...

mardi 16 novembre 2010

Lecture - Bilan de l'ONU au Timor

Décidément le Centre des Études de Défense de l’IFRI déçoit rarement avec sa collection de Focus Stratégique. La dernière livraison mensuelle ne déroge pas à la règle avec une passionnante étude sur un sujet peu connu par chez nous (au moins, à ma connaissance). Et toujours dans un format lisible, car court et concis.


Dominique Lecompte, docteur en géographie et consultant, revient de deux ans et demi au Timor-Leste. Il présente dans ce numéro de novembre 2010 le bilan de presque 11 ans d’administration et d’accompagnement vers l’indépendance du Timor par l’ONU. Le résultat ne serait pas aujourd’hui à la hauteur des énergies développées (hommes et moyens financiers).

L’auteur revient sur le contexte institutionnel de l’action onusienne (présupposés, organisation et lourdeurs de 5 opérations différentes) qui permet de comprendre les échecs mais aussi les succès. Ce cas précis permet ensuite de tirer des préconisations utiles pour d’autres théâtres (comme la situation comparable d’Haïti).

Du chaos suite à la fin de règne de l’Indonésie au chemin vers l’indépendance puis de la construction empirique d’un États à l’effondrement de frêles institutions, l’histoire de cette mise sur pied artificielle est à lire.

Dominique LECOMPTE, « L’ONU, Pygmalion malhabile. La fragilité du nation building au Timor », Focus Stratégique, IFRI, n°26, novembre 2010.

lundi 15 novembre 2010

Remaniement et affaires de Défense

Il est rare que je commente à chaud l'actualité et les décisions politiques. Pourtant, le récent remaniement gouvernemental appelle quelques remarques concernant le domaine du dieu Mars.

Ainsi, Alain Juppé arrive aujourd'hui à l'Hôtel de Brienne, siège du ministère de la Défense. Il est placé de plus en deuxième position dans l'ordre protocolaire du gouvernement Fillon III et est Ministre d'État. Ce titre et ce rang sont surtout attachés à la personne (ici un poids lourd politique) plus qu'à la fonction.

Néanmoins, le rang et l'aura du personnage ne pourront qu'avoir des retombées positives sur les missions du ministère concerné, en particulier lors de discussions budgétaires (et actuellement celles concernant la Défense sont tendues). C'est un signe visible de l'intérêt du sujet au sein du gouvernement.


De plus, mettre un ancien ministre des Affaires Étrangères (mars 1993 à mai 1995) à la Défense peut se révéler positif. En effet, l'action des forces armées n'est rien si elle ne s'inscrit pas dans un cadre stratégique souvent élaboré par le Quai d'Orsay. L'actuel ministre peut ainsi avoir une vision globale qui aujourd'hui manque tant.

De même que Michèle Alliot-Marie, ancienne ministre de la Défense (mai 2002 à mai 2007) passe au Quai d'Orsay, peut aussi être analysée comme une bonne chose concernant l'emploi intelligent dans le futur des forces armées.

Beaucoup d'optimisme donc, mais maintenant place à l'action sachant que les prochains jours seront chargés (entre autres, le sommet de Lisbonne concernant l'avenir de l'OTAN et les opérations en Afghanistan).

Articles complémentaires :

vendredi 12 novembre 2010

Café stratégique - La Défense Anti-Missile Balistique (DAMB)

L'Alliance Géostratégique est heureuse de vous inviter à son second Café Stratégique qui aura lieu le jeudi 25 novembre de 19h à 21h au café Le Concorde, 239 bd Saint Germain à Paris (cf. plan).

Lors de cette rencontre, qui se veut un moment de débats entre l'invité et l'assistance, nous recevrons Corentin BRUSTLEIN qui nous parlera de la Défense Anti-Missile Balistique (DAMB).


Chercheur au Laboratoire de Recherche sur la Défense (LRD) de l'IFRI, il est l'un des meilleurs spécialistes français sur cette question, suivant les débats depuis plusieurs années. Il est de plus animateur du blog Ultima Ratio.

Nous vous attendons nombreux pour parler d'un sujet plus que jamais au cœur de l'actualité : prolifération et contre-prolifération, nouveau concept stratégique de l'OTAN, débat français, etc.

mercredi 10 novembre 2010

Classement Wikio du mois de novembre


Le classement Wikio tant attendu du mois de novembre est en ligne. Il est bon et très encourageant à titre individuel et collectif (EGEA ou Mon Blog Défense).

Tout comme l'Alliance Géostratégique et sa belle 5ème place, je ne bouge pas dans la catégorie International et reste attaché à la 19ème place.

De plus, Mars Attaque pointe maintenant aux portes du top 1000 pour le classement général avec une motivante 1079ème place.

Toujours sans trop faire beaucoup d'efforts sur le référencement, c'est donc de manière assez empirique, mais continue, que cette progression se fait.

En route vers les sommets, avec vous chers lecteurs!

Humour - Les militaires et les hauts potentiels

NDLR : Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite... Texte écrit par un anonyme qui mérite de ne pas le rester!

Mon colonel, et cher président du comité HP,

Après mûre réflexion, c’est non sans une certaine émotion, que je viens par la présente présenter officiellement ma candidature au comité HP que vous avez fondé, et faire un focus sur les raisons qui soutendent cette démarche. Idée maîtresse : « Force est de constater que si on fait un focus au niveau de mes qualités foncières de cadre supérieur de la Défense je répond aux attendus d’un comité Haut potentiel»

Plan : 1 - TOUT D’ABORD 2 - ENSUITE 3 - DE PLUS 4 - CERTES 5 - MAIS SURTOUT

TOUT D’ABORD, au niveau de l’âge j’ai 33 ans, car ma mère m’a fait sauter le CP malgré que le professeur n’était pas d’accord, ce qui m’a fait des notes médiocres par la suite, mais un avantage initial qui n’a cesser de s’amplifier, car les barreaux vont souvent aux plus jeunes.

A l’issue de Saint-Cyr, où j’ai gagné 100 places à cause de mes 3500 m au Cooper et de mon aciduité en salle de muscu, j’ai choisi une arme peu demandée, pour mieux me classer et avoir plus de temps pour travailler mes degrés de langue (j’ai un peu de mal avec les gens des autres pays, qui croient que c’est nous les étrangers). Il est donc logique que je bénéficie aujourd’hui de ce choix éclairé et courageux.

ENSUITE, en therme conceptuel, j’estime avoir intégré ce qui fait le vrai HP. En état-major je suis comme un poisson dans l’eau. Mes slides de .ppt ressemble à une raffinerie. Je masterise le vocabulaire. Pour moi, par exemple, un "échelon refusé" n’est pas un dispositif tactique mais une injustice faite lors de la notation à ma merveilleuse secrétaire, le Sergent Caroline (j’ai oublié son nom de famille), à qui je ne peut rien refuser, surtout pas un échelon. J’ai beaucoup reçu d’elle...

D’ailleurs, sensible aux critères de parité, j’ai porté le taux de féminisation à 50% dans toutes mes unités, allant au-delà des attendus de mes chefs. Je ne parle pas de mes hommes mais de mes « femmes et hommes» qui sont « prêtes et prêts» à agir comme soldats de la paix. Bon, ça fait des discours deux fois plus longs, mais j’ai toujours été aimé de mes femmes et hommes. Je faisais beaucoup pour eux, en particulier minimiser leur charge de corvées.

Je pense être assez fin psychologue : je sais de quelles catégories on peut se moquer (jeunes lieutenants, jeunes sergents) pour mettre une bonne ambiance dans l’unité, et lesquelles il faut ménager (adjudants-chefs en particulier). Question de tact.

Pour les décisions rapides, j’ai un peu de mal, mais se précipiter, c’est un signe d’immaturité. Cependant je pique régulièrement des colères qui me font une réputation de caractère. J’ai tiré un trait sur le passéisme qui pollue encore notre armée. En voiture, quand j’ai un conducteur, je monte à côté de lui, pas à l’arrière. Et je refuse toute activité ou élément d’uniforme réservé aux officiers : je décloisonne, je démocratise, je dépoussière. A la cantine, je suis fier de pousser mon plateau en plastique. L’histoire est en marche.


DE PLUS, je veux pour preuve de mon haut potentiel, outre ma montre LCD Polar, la richesse de ma boîte à outils sémantique. Je parle couramment le langage d’état-major, niveau CML3 : « Les slides sur l’interopérabilité infocentrée polymorphe doivent être proactifs, c’est dimensionnant »,…

Je ne dis pas « précision » mais « focus », « social » mais « sociétal », « surface » mais « dioptre », « diapositive » mais « slide ». Je ne parle pas d’«attentes », mais d’« attendus » ; un esprit mesquin (sûrement un pauvre BP ou article 15) m’a signalé que c’est un terme juridique très précis dont le sens n’a rien à voir avec « attentes ». Je ne l’ai pas cru. D’ailleurs ce mauvais coucheur est d’origine civile. Comme je dis souvent (j’aime bien me citer), la grande faiblesse de notre armée, c’est de devoir recruter dans le civil.

CERTES, quand je parle d’objectifs à « haute valeur ajoutée », le même pisse-vinaigre dit que c’est un concept comptable inapplicable à un objectif militaire, mais bon, ça fait très HEC, non ? Et puis, ces civils sont retors. Je maîtrise l’essentiel de leur culture, qui n’est pas si vaste qu’on nous le raconte : les deux mamelles en sont la pyramide de Masselot et la principe de Pétère, que je cite chaque fois que possible. Sauf quand c’est mon chef qui les cite, alors je fais semblant de les découvrir : comme il dit souvent, « Pour plaire dans le monde il faut se résoudre à apprendre des choses qu’on sait par des gens qui les ignorent » (Chamfort).

Dans mes rares dîners avec des civils, je contribue au réyonnement culturel des Armées, mais par discrétion je parle par acronymes. Surtout quand je prends les rênes de la conversation pour passer en revue mes potes de promo, pour éviter que les pékins squattent la conversation en parlant de sujets sopo comme la société, l’art, ou les pays étrangers.

MAIS SURTOUT, j’ai intégré les valeurs des futurs manageurs de la Défense dont j’ai l’ambition de faire partie depuis tout petit.

J’ai bien acquis les impératifs d’intégration sociétale. Ce midi après manger un cavalier amusé m’a fait remarquer qu’en civil, avec ma dégaine et mes Nike, on me confondait avec mes soldats. A la gare, parfois un appelé me tapait sur l’épaule en me disant : « Hé, t’es de la combien ? » Et bien, pour moi, tout ça, c’est des compliments, ça veut dire que les résidus moyennageux sont définitivement éliminés du comportement de la nouvelle génération des HP. Sur la photo de mon passeport, je suis en T-Shirt, c’est in. Mais je sais m’habiller quand il faut avec l’élégance classique qui va bien : blazer bleu marine, chemise blanche à manches courtes et col boutonné, cravatte bordeaux, pantalon beige (bien court), chaussettes blanches immaculées et chaussures noires d’uniforme de chez Marbot, indémodables. Ou plus casual, je sors mon grand jeu : costard noir tramé, chemise slim fit en soie noire, saumon ou bordeaux.

Pour ce qui est des idées, je n’en ai presque aucune personnellement, car je suis serviteur de la République. Cela m’évite de perdre du temps et de contrarier mes chefs. Mais j’ai un don pour sentir le sens du vent, et je sais prendre quand les autres exposent leur point de vue cet air dubitatif qui en dit long sur la profondeur de mes vues. Mes propos, comme mes chemises d’uniforme, sont toujours synthétiques. Dans le RER, je lis le JO pour former mon style.

On m’a dit : « Si tu doute de ton intelligence, fais-la breveter ». Alors me voici au CID. Pour apprendre à penser.

En CONCLUSION, j’espère vous avoir convaincu de mon potentiel élevé, et j’attends avec optimisme et sérénité votre réponse à ma requête.

mardi 9 novembre 2010

Orwell en Afghanistan - DSI n°64

Comme d'autres alliés de l'Alliance Géostratégique, Charles Bwele ou Benoist Bihan, je publie un article dans la dernière livraison du magazine DSI. Ce numéro comporte plusieurs articles particulièrement intéressants.

Je note la dernière partie des réflexions sur l'opératique de Benoist Bihan avec l'application aux théâtres afghans, l'état de l'art et la prospective sur la capacité Air de suppression des défenses anti-aériennes par Olivier Zajec de la CEIS, ou encore les problématiques sur le Kazakhstan.


Quant à moi, je poursuis mes réflexions sur la manière de faire la guerre et les outils mis en œuvre, en particulier en Afghanistan. Après la mise en perspective de l'emploi des metrics, c'est au jargon opérationnel otanien que je m'attelle.
Alliance reposant entre autre sur une standardisation poussée, l’OTAN coordonne et norme aussi le langage (...). Sans jamais atteindre la même logique implacable, ce langage s’apparente au novlangue, langue imaginée par l’écrivain britannique Orwell. La transposition prudente au parler otanien de remarques qui lui sont faites, permet de tirer des enseignements utiles pour éviter l’imposition d’une pensée stratégique unique.

samedi 6 novembre 2010

Citation 23 - Foch et la culture générale


" Il faut travailler, toujours travailler pour nous tenir au courant, car les moyens évoluent, les solutions sont chaque jour différentes. Faire la guerre prochaine avec les procédés de la dernière, quelle utopie ! Il faudra que le chef d’alors improvise des solutions nouvelles. Travaillez... Les improvisations géniales sur le champ de bataille ne sont que le résultat des méditations antérieures"

Du Maréchal Ferdinand Foch lors d'une conférence à l'École Navale prononcée en août 1920

Citation 22 - Hegel et l'inutilité de l'expérience historique


"On recommande aux rois, aux hommes d'État, aux peuples de s'instruire principalement par l'expérience de l'histoire. Mais l'expérience et l'histoire nous enseignent que peuples et gouvernements n'ont jamais rien appris de l'histoire, qu'ils n'ont jamais agi suivant les maximes qu'on aurait pu en tirer. Chaque époque, chaque peuple, se trouve dans des conditions si particulières, forme une situation si particulière, que c'est seulement en fonction de cette situation unique qu'il doit se décider : les grands caractères sont précisément ceux qui, chaque fois, ont trouvé la solution appropriée".

G.W.F. HEGEL dans La Raison dans l'Histoire. Introduction à la philosophie de l'histoire

Merci à GHBV

jeudi 4 novembre 2010

De la coopération militaire franco-américaine

Le blog Theatrum Belli a récemment ressorti un article issu de la Revue Historique des Armées traitant de L'instruction des soldats américains en France (1917-1918).

Son auteur, Raphaëlle AUTRIC, revient sur la formation par la Mission Militaire Française du Corps Expéditionnaire Américain à partir de septembre 1917.

Elle prouve que les militaires américains, et malgré leur impréparation, feront tout pour limiter au maximum l'influence française dans leur système de forces.

Le jumelage initialement prévu entre unités françaises et américaines est mis à mal devant les récriminations américaines qui souhaitent des écoles autonomes.


En effet, deux cultures s'opposent entre celle du poilu encore empêtré dans la guerre de position et le doughboy adepte de la mobilité et de l'initiative.
En quelque sorte, les Français doivent se contenter de la place que les Américains veulent bien leur laisser. Tout se joue dans la finesse des officiers qui doivent traiter avec les états-majors américains. C’est précisément en se reconnaissant tributaires de l’appréciation américaine que les Français maintiendront leur influence.
Nous sommes en 1917. Avec trois années de guerre, les militaires français peuvent légitimement prétendre délivrer une expérience riche et utile. Les militaires français ont donc l'initiative et pourtant...

Cette passionnante étude est évidemment à mettre en perspective avec les actuels échanges entre les cultures stratégiques françaises et américaines, ainsi que les difficiles tentatives réciproques d'influence.

Merci à C. H.

mardi 2 novembre 2010

Histoire de couples et bien plus... (+MAJ)

Ainsi, la France et la Grande-Bretagne ont signé aujourd'hui un traité dans le domaine de la défense dont l'exact contenu s'ébruite, depuis quelques temps déjà et avec plus ou moins de véracité, dans la presse. Il appelle en vrac quelques remarques de différents ordres.

Méfiance avec les anachronismes historiques trop souvent vus et entendus. Il n'a rien de comparable dans le fond et dans la forme avec l'Entente Cordiale signée en 1904. Cet accord réglait diplomatiquement des différents coloniaux et délimitait des sphères d'influence respectives (cas abordés de l'Égypte, du Maroc, du Siam, de Terre-Neuve, etc.). Au mieux, il pourrait avoir la même destinée en servant de point de départ d'un accord à trois comme l'a été l'Entente Cordiale, l'alliance franco-russe et la convention anglo-russe de 1907 pour la Triple Entente.


Briefing entre soldats britanniques, français et afghans lors de l'opération Moshtarak.

Dans le même ordre d'idée, je n'analyse pas cet accord comme un basculement géopolitique de la France qui délaisserait l'historique axe franco-allemand (très vivace avec le couple Sarkozy-Merkel) pour fortifier, non sans fracas, un axe franco-britannique. Il s'agirait plus d'une spécialisation stratégique selon "les compétences" de chacun. Avec les Allemands, les questions financières et monétaires. Avec les Britanniques, les questions de défense pour deux modèles d'armées si souvent comparés pour leurs ressemblances (au moins en termes de chiffres).

Quid dans l'affaire de la défense européenne? Cet accord bilatéral très technique dans le contenu (coopération industrielle, exercices conjoints, interopérabilité, question nucléaire, etc.) peut, pour les plus optimistes dont je ne suis pas, servir de base à une future défense européenne. Un banc d'essai à deux avant d'essayer à 27. La concrétisation dans les faits prouvera la pertinence du projet. Néanmoins, de le faire avec les Britanniques (traditionnellement peu enclin à cette idée de défense européenne) envoie des signaux faibles négatifs sur la perception française d'une défense partagée.

PS1 : la blogosphère géostratégique francophone attend avec impatience les compléments d'analyse d'Olivier Kempf...

PS2 : Quand le choix d'un produit (ici, un drone) conduit à révéler de sensibles modifications géopolitiques... Bonne brève de Jean-Marc Tanguy sur le Watchkeeper de Thalès vs EADS.

MAJ1 : le texte de la déclaration sur la coopération de défense et de sécurité.

jeudi 28 octobre 2010

Opération Bickshot Yankee et vulnérabilité des PC du Pentagone (MAJ1)

Le secrétaire adjoint américain à la Défense, William Lynn, s'est récemment et longuement épanché dans le dernier numéro de la revue Foreign Affairs sur la cybersécurité, thème du mois de l'Alliance Géostratégique.
"Some of the most sophisticated integrated defense software that is commercially available now have 5–­­10 million lines of code, and they are massive, work-intensive, difficult products to develop. The average malware has stayed constant over the last decade, and it's about 175 lines of code".
Il prend comme exemple, pour illustrer ses propos, l'opération "Bickshot Yankee" qui a visé les ordinateurs du Pentagone en 2008. Une carte mémoire malveillante ayant été insérée dans un ordinateur de l'US Air Force sur une base au Moyen-Orient.


Elle aurait entraîné selon le responsable, une véritable prise de conscience conduisant à une réflexion doctrinale interservices et à la mise en œuvre de mesures de sécurité ainsi que de nouvelles structures, comme l'US Cyber Command.

Enfin, pour montrer le différentiel temporel dans le cycle de développement et d'innovation entre des services officiels et des entreprises, William Lynn fait cette remarque:
« Il faut 81 mois au Pentagone pour développer un nouveau système informatique. Il a fallu 24 mois pour lancer l'iPhone ».
Pour trouver encore quelques tirades bien placées, cet long entretien est à lire.

Articles complémentaires: