mercredi 10 novembre 2010

Humour - Les militaires et les hauts potentiels

NDLR : Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite... Texte écrit par un anonyme qui mérite de ne pas le rester!

Mon colonel, et cher président du comité HP,

Après mûre réflexion, c’est non sans une certaine émotion, que je viens par la présente présenter officiellement ma candidature au comité HP que vous avez fondé, et faire un focus sur les raisons qui soutendent cette démarche. Idée maîtresse : « Force est de constater que si on fait un focus au niveau de mes qualités foncières de cadre supérieur de la Défense je répond aux attendus d’un comité Haut potentiel»

Plan : 1 - TOUT D’ABORD 2 - ENSUITE 3 - DE PLUS 4 - CERTES 5 - MAIS SURTOUT

TOUT D’ABORD, au niveau de l’âge j’ai 33 ans, car ma mère m’a fait sauter le CP malgré que le professeur n’était pas d’accord, ce qui m’a fait des notes médiocres par la suite, mais un avantage initial qui n’a cesser de s’amplifier, car les barreaux vont souvent aux plus jeunes.

A l’issue de Saint-Cyr, où j’ai gagné 100 places à cause de mes 3500 m au Cooper et de mon aciduité en salle de muscu, j’ai choisi une arme peu demandée, pour mieux me classer et avoir plus de temps pour travailler mes degrés de langue (j’ai un peu de mal avec les gens des autres pays, qui croient que c’est nous les étrangers). Il est donc logique que je bénéficie aujourd’hui de ce choix éclairé et courageux.

ENSUITE, en therme conceptuel, j’estime avoir intégré ce qui fait le vrai HP. En état-major je suis comme un poisson dans l’eau. Mes slides de .ppt ressemble à une raffinerie. Je masterise le vocabulaire. Pour moi, par exemple, un "échelon refusé" n’est pas un dispositif tactique mais une injustice faite lors de la notation à ma merveilleuse secrétaire, le Sergent Caroline (j’ai oublié son nom de famille), à qui je ne peut rien refuser, surtout pas un échelon. J’ai beaucoup reçu d’elle...

D’ailleurs, sensible aux critères de parité, j’ai porté le taux de féminisation à 50% dans toutes mes unités, allant au-delà des attendus de mes chefs. Je ne parle pas de mes hommes mais de mes « femmes et hommes» qui sont « prêtes et prêts» à agir comme soldats de la paix. Bon, ça fait des discours deux fois plus longs, mais j’ai toujours été aimé de mes femmes et hommes. Je faisais beaucoup pour eux, en particulier minimiser leur charge de corvées.

Je pense être assez fin psychologue : je sais de quelles catégories on peut se moquer (jeunes lieutenants, jeunes sergents) pour mettre une bonne ambiance dans l’unité, et lesquelles il faut ménager (adjudants-chefs en particulier). Question de tact.

Pour les décisions rapides, j’ai un peu de mal, mais se précipiter, c’est un signe d’immaturité. Cependant je pique régulièrement des colères qui me font une réputation de caractère. J’ai tiré un trait sur le passéisme qui pollue encore notre armée. En voiture, quand j’ai un conducteur, je monte à côté de lui, pas à l’arrière. Et je refuse toute activité ou élément d’uniforme réservé aux officiers : je décloisonne, je démocratise, je dépoussière. A la cantine, je suis fier de pousser mon plateau en plastique. L’histoire est en marche.


DE PLUS, je veux pour preuve de mon haut potentiel, outre ma montre LCD Polar, la richesse de ma boîte à outils sémantique. Je parle couramment le langage d’état-major, niveau CML3 : « Les slides sur l’interopérabilité infocentrée polymorphe doivent être proactifs, c’est dimensionnant »,…

Je ne dis pas « précision » mais « focus », « social » mais « sociétal », « surface » mais « dioptre », « diapositive » mais « slide ». Je ne parle pas d’«attentes », mais d’« attendus » ; un esprit mesquin (sûrement un pauvre BP ou article 15) m’a signalé que c’est un terme juridique très précis dont le sens n’a rien à voir avec « attentes ». Je ne l’ai pas cru. D’ailleurs ce mauvais coucheur est d’origine civile. Comme je dis souvent (j’aime bien me citer), la grande faiblesse de notre armée, c’est de devoir recruter dans le civil.

CERTES, quand je parle d’objectifs à « haute valeur ajoutée », le même pisse-vinaigre dit que c’est un concept comptable inapplicable à un objectif militaire, mais bon, ça fait très HEC, non ? Et puis, ces civils sont retors. Je maîtrise l’essentiel de leur culture, qui n’est pas si vaste qu’on nous le raconte : les deux mamelles en sont la pyramide de Masselot et la principe de Pétère, que je cite chaque fois que possible. Sauf quand c’est mon chef qui les cite, alors je fais semblant de les découvrir : comme il dit souvent, « Pour plaire dans le monde il faut se résoudre à apprendre des choses qu’on sait par des gens qui les ignorent » (Chamfort).

Dans mes rares dîners avec des civils, je contribue au réyonnement culturel des Armées, mais par discrétion je parle par acronymes. Surtout quand je prends les rênes de la conversation pour passer en revue mes potes de promo, pour éviter que les pékins squattent la conversation en parlant de sujets sopo comme la société, l’art, ou les pays étrangers.

MAIS SURTOUT, j’ai intégré les valeurs des futurs manageurs de la Défense dont j’ai l’ambition de faire partie depuis tout petit.

J’ai bien acquis les impératifs d’intégration sociétale. Ce midi après manger un cavalier amusé m’a fait remarquer qu’en civil, avec ma dégaine et mes Nike, on me confondait avec mes soldats. A la gare, parfois un appelé me tapait sur l’épaule en me disant : « Hé, t’es de la combien ? » Et bien, pour moi, tout ça, c’est des compliments, ça veut dire que les résidus moyennageux sont définitivement éliminés du comportement de la nouvelle génération des HP. Sur la photo de mon passeport, je suis en T-Shirt, c’est in. Mais je sais m’habiller quand il faut avec l’élégance classique qui va bien : blazer bleu marine, chemise blanche à manches courtes et col boutonné, cravatte bordeaux, pantalon beige (bien court), chaussettes blanches immaculées et chaussures noires d’uniforme de chez Marbot, indémodables. Ou plus casual, je sors mon grand jeu : costard noir tramé, chemise slim fit en soie noire, saumon ou bordeaux.

Pour ce qui est des idées, je n’en ai presque aucune personnellement, car je suis serviteur de la République. Cela m’évite de perdre du temps et de contrarier mes chefs. Mais j’ai un don pour sentir le sens du vent, et je sais prendre quand les autres exposent leur point de vue cet air dubitatif qui en dit long sur la profondeur de mes vues. Mes propos, comme mes chemises d’uniforme, sont toujours synthétiques. Dans le RER, je lis le JO pour former mon style.

On m’a dit : « Si tu doute de ton intelligence, fais-la breveter ». Alors me voici au CID. Pour apprendre à penser.

En CONCLUSION, j’espère vous avoir convaincu de mon potentiel élevé, et j’attends avec optimisme et sérénité votre réponse à ma requête.

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