vendredi 30 avril 2021

Récit - Au combat, en grande tenue, le jour de Camerone (Côte d'Ivoire - 2003)

Un légionnaire n’oublie jamais la date de Camerone, mais certaines célébrations restent plus ancrées que d’autres dans la mémoire...

L’un d’entre eux (souhaitant rester anonyme) se souvient bien de son deuxième Camerone comme légionnaire, raconté l'année dernière : "l’un des rares cas depuis un siècle, où des légionnaires sont sortis, au contact, en tenue de parade, épaulettes de tradition, fourragères en bataille et décorations pendantes !".


Avec son peloton, le 2ème peloton du 4ème escadron du 1er Régiment Étranger de Cavalerie (REC), il était alors déployé en opérations extérieures, tenant un poste isolé, installé dans une scierie abandonnée aux abords de la ville de Duékoué, dans le grand Ouest ivoirien (au Sud de Man et à l’Ouest de Yamoussoukro, à une centaine de kilomètres de la frontière libérienne). C’était alors le 2nd mandat de l’opération Licorne (de mars à juin 2003), une opération débutée en septembre 2002. "Nous devions renseigner dans notre zone sur les mouvements rebelles descendant du Nord, et être en mesure de prêter main forte aux compagnies d’infanterie du 2ème Régiment Étranger d’Infanterie (REI), qui bloquaient alors les axes", se rappelle-t’il. Pour cet élément du Groupement Tactique InterArmes (GTIA) Ouest d'alors, et dans le cadre de missions de sécurisation de la ligne de cessez-le-feu (dite "ligne de confiance" qui coupe le pays d'Ouest en Est) et de soutien/appui à la MICECI (Mission de la Communauté Économique (CEDEAO) en Cote d'Ivoire), une mission de renseignement et d'intervention taillée pour cet escadron alors Escadron d’Éclairage et d'Investigation (EEI) de la 6ème Brigade Légère Blindée (BLB).
 
Dès le 1er soir de leur arrivée dans la zone (une arrivée un peu précipitée, du fait d'activités alors détectées), des coups de feu avaient été entendus. Quelques prises à partie, au cours d'embuscades, avaient déjà eu lieu dans la zone, se remémore également un autre légionnaire. Ambiance, en somme. "Et pour ce Camerone, nous devions célébrer l’événement comme les légionnaires ont l’habitude de faire où qu’ils soient : du mieux qu’ils peuvent, et avec les moyens qu’ils ont !", indique-t-il.

Il continue indiquant que "Comme j’étais le plus jeune, et aussi l’un des 2 seuls francophones de notre peloton, alors très russophone, notre adjudant m’avait demandé quelques jours avant d’être celui qui prononcerait le récit du combat [celui-ci]. Je m’étais appliqué à l’apprendre par cœur, comme c’est la coutume, pour pouvoir le réciter".

La commémoration commence ce 30 avril 2003 "sur la mini place d’armes que nous nous étions aménagée dans ce poste, poste que nous avions renforcé depuis notre arrivée. Devant notre mat des couleurs plutôt rudimentaire, et la plaque en béton que nous avions faite couler pour y peindre l’insigne de notre escadron, les Lions", poursuit-il. Les légionnaires du peloton sont rassemblés. Le récit des combats débute. Et sera cité, par cœur, sans faute.

Mais "avant que la cérémonie ne se termine, quelques rafales d’AK-47 se font entendre à quelques centaines de mètres de là. Aussitôt, la patrouille Milan du peloton, qui était d’alerte, sort des rangs. Les légionnaires récupèrent leurs chargeurs pleins (nous avions pris soin de vider un de nos chargeurs, mis sur nos FAMAS, pour le déroulé de la cérémonie) et sortent du poste". Pendant ce temps, les deux patrouilles d’éclairage, qui composent le reste du peloton (avec la patrouille de commandement, selon la structure des EEI alors) approvisionnent les armes des blindés légers VBL, récupèrent leurs matériels personnels, démarrent leurs blindés et, 5 minutes plus tard, sortent de la scierie pour reconnaitre les pistes au Nord de la route, celle qui mène au fleuve Sassandra.

"Nous étions élégants ! En treillis de parade, casque de combat sur la tête et fusils à l’épaule, avec le cling-cling caractéristique des médailles qui s’entrechoquent ! On dit que les cavaliers aiment le panache, là il y en avait, et ce n’était même pas fait exprès…", conclut-il. Et le mandat se poursuivra. Intense. "C'était une belle mission ! 4 mois isolés en brousse", se remémorera l'un d'entre eux.

Bonne fête de Camerone à tous les légionnaires, où qu'ils soient, le soleil ne se couchant jamais sur la Légion étrangère !

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Très jolie anecdote!

Les images du journal télévisé sont maintenant vieilles, mais je me souviens très bien de ce "jeune patriote ivoirien" qui déclarait lors d'une manifestation à un micro-trottoir: "on attend rien de la France, on attend rien des États-Unis de Bush, ce qu'on attend maintenant c'est Ben Laden!".
https://www.revueconflits.com/aux-origines-de-la-construction-d-un-discours-antifrancais-en-afrique-florent-hivert/

Peut importe d'où vient l'argent donc...


La leçon visiblement n'a pas portée.
https://esprit.presse.fr/article/jean-baptiste-jeangene-vilmer-et-denis-tull-et-thierry-vircoulon/ce-sable-sur-lequel-on-batit-la-politique-francaise-au-sahel-43587


Pourtant il y a des gens intelligents dans les hautes sphère, comme le montre l'interview du GCA Destremau, ancien chef de corps du RICM, peut nous éclairer sur certaines choses tout en balayant l'histoire de ces dernières décennies et des opérations militaires françaises.

Sa biographie est intéressante: retenu en otage à Ouvéa, chef des soldats français bombardés à Bouaké, débordé à l’hotel Ivoire…

Et il est aussi un de ceux qui a commis le programme SCORPION...
https://www.irsem.fr/le-collimateur/d-ouvea-au-scorpion-entretien-avec-le-general-destremau-directeur-de-l-ihedn-27-10-2020.html

Anonyme a dit…

En 2004, 8 000 français débarquent en métropole en ayant tout abandonné, l’exode le plus massif depuis la fin de la guerre d’Algérie.

On en a pas entendu parler...
https://www.liberation.fr/societe/2014/11/05/attaque-de-la-force-licorne-en-2004-silence-dans-les-rangs_1137137

Un drame de plus, avec un mouchoir dessus.


L'actuelle crise au Liban aura des répercussion en Afrique et notamment en Côte d'Ivoire et a de grosses répercussions en Afrique:
https://www.africaintelligence.fr/afrique-ouest-et-centrale_business/2021/05/14/l-effondrement-de-beyrouth-se-repercute-sur-les-filiales-africaines-des-banques-libanaises,109665458-gra


C'est d'ailleurs dingue comment les politiques français parlent toujours du Liban, on croirait qu'on est en 1920...
https://www.lopinion.fr/edition/international/pourquoi-macron-fait-resolution-crise-liban-affaire-francaise-251274

https://www.herodote.net/28_avril_1920-evenement-19200428.php


Comme de l'Afrique, d'ailleurs...
https://afriquexxi.info/article4906.html


La crise libanaise va avoir de grosses répercussions en Afrique par ses banques:
https://www.africaintelligence.fr/afrique-ouest-et-centrale_business/2021/05/14/l-effondrement-de-beyrouth-se-repercute-sur-les-filiales-africaines-des-banques-libanaises,109665458-gra


Mais aussi humainement car les malheurs du Liban ont favorisé une nouvelle vague migratoire vers la Côte d'Ivoire.
https://www.rfi.fr/fr/afrique/20210104-la-nouvelle-migration-libanaise-en-afrique

Ce qui fait aussi grincer les dents des locaux:
https://www.lecommercedulevant.com/article/23229-les-libanais-de-cte-divoire-tiennent-40-de-lconomie


Pendant ce temps là, on se fait chasser du Sahel et la Chine lorgne le port de Beyrouth:
https://www.marianne.net/monde/proche-orient/port-de-beyrouth-convoite-par-la-chine-notre-securite-economique-et-militaire-est-menacee


Le front anti-occidental marque des points...
https://www.lopinion.fr/edition/international/ardavan-amir-aslani-l-occident-n-accepte-plus-mort-qui-profite-a-241947

FSV/MA a dit…

"En 2004, 8 000 français débarquent en métropole en ayant tout abandonné", et une non négligeable partie, est depuis reparti en Cote d'Ivoire.

Toujours surprenant les remarques à base de "On en a pas entendu parler..." pour caler juste après un article qui... justement en parle...

Anonyme a dit…

Pour la France, la question de protéger ses expatriés n'a cessé de se poser:
https://www.diploweb.com/Carte-Les-operations-d-evacuation-des-ressortissants-Francais-en-Afrique-depuis-1990.html

Anonyme a dit…

Cette geste deviendra un souvenir de popottes racontées par des pax n'ayant même pas vu la Côte d'Ivoire.

Les forces spéciales françaises continueront à jouer le rôle de pompiers de notre diplomatie désormais sans corps diplomatique mais pleine de copains, puisqu'ils sont devenus l'Alpha et l'Omega de l'art militaire occidental cherchant à avoir le monopole du combat.
https://www.diploweb.com/Comment-faire-la-guerre-autrement-Les-forces-speciales-francaises-Entretien-avec-W-Bruyere-Ostells.html

En Côte d'Ivoire, il y aura moins de combattants, mais des coopérants:
https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230220-c%C3%B4te-d-ivoire-s%C3%A9bastien-lecornu-%C3%A9voque-la-r%C3%A9articulation-de-la-pr%C3%A9sence-militaire-fran%C3%A7aise


L'art du recyclage en politique ou celui de faire d'une vieille antienne, une décision toute neuve...
https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2023/02/27/afrique-vers-une-diminution-visible-des-effectifs-tricolores-23697.html


Camille.