mardi 11 juin 2024

EOS Technologie / Turgis & Gaillard - Modularité et complémentarité pour faire différent

Proposer de réelles solutions différenciantes via la complémentarité et la modularité des briques technologiques, pour ne pas juste chercher à rattraper le retard par rapport à la concurrence, mais bien proposer autre chose. Plusieurs sociétés françaises de drones cherchent à atteindre ce but, en s’appuyant sur leur forte agilité (moins de 4 mois entre une feuille blanche et le premier vol d’un démonstrateur), tout en s’associant ou en s’adossant à des sociétés plus établies pouvant leur garantir une certaine assise industrielle, en production comme en approche système.


Des études sont ainsi actuellement menées par Turgis & Gaillard et EOS Technologie quant à l’emport sur le drone type moyenne altitude longue élongation (MALE) Aarok du premier des deux industriels, de plusieurs drones de renseignement (principalement pour le renseignement d’origine image et d’origine électromagnétique) ou de munitions téléopérées (MTO) du second.

Ainsi, 2 à 4 MTO type Veloce 330 de moyenne portée (de l’ordre de 100 km), ou des modèles plus petits, pourraient être emportés sous les ailes du drone-mère, être éjectés et, étant à une certaine distance du drone mère, débuter, en toute sécurité pour le drone-mère, leur vol via leur micro-turbine produite par la société française ALM Meca. Ce spécialiste en micromécanique situé dans l’Est de France produit ce qui est considéré comme d’intéressantes turbines quant au rapport poids, puissance et consommation, et cela, sans compromis sur la sécurité en vol comme au sol. 


Quasi 4 ans que Turgis & Gaillard et EOS Technologie échangent. Depuis quelques mois, ce cas d’usage apparait comme un axe pertinent de partenariat. Les études demeurent encore préliminaires à ce stade. Des besoins en cours de précision par les armées françaises sur le segment MALE, notamment pour des besoins de l’armée de l’Air et de l’Espace autres que ceux déjà couverts par les systèmes opérés ou prévus, pourraient donner un coup d’accélérateur aux réflexions menées par les deux industriels sur leur solution commune. Il en serait de même pour la conduite des études toujours complexes d’interfaçage, d'intégration et de séquence de largage.

L’emport de ses drones apporterait une réelle différence par rapport à des roquettes dont les tirs obligent à descendre relativement bas, et donc à être plus vulnérable, des bombes (propulsées ou non) ayant des portées toutes relatives, ou des missiles finalement lourds pour ce qu’ils apportent. Le drone-mère pourrait emporter des drones ayant des charges utiles variées : boule optronique avec différentes voies, moyens de détection de différentes fréquences, leurrage, brouillage, charge EMP (impulsion éléctromagnétique)...

De plus, avec ses propres liaisons de données, le drone-mère pourrait servir de relais de communication pour les drones largués, permettant de gagner encore un peu plus en allonge. Le drone-mère resterait à distance de certaines menaces avec des drones largués plus rapides (aujourd’hui 400 km/h avec une turbine de 12 kg, et demain potentiellement jusqu’à 600 km/h avec une turbine de 18 kg) et plus agiles que le drone-mère, donc plus à même de passer à travers certaines défenses anti-drones et de s’y maintenir éventuellement.

Cela se ferait en maintenant l’approche ouverte des plateformes relativement agnostiques, permettant notamment d’intégrer différentes charges militaires. Elle sont aujourd'hui produites par KNDS, MBDA ou Thales, des charges de 3 ou 6 kg qui apportent chacune des effets différents (charge génératrice de noyau, munition fragmentation, charge creuse…) et différents modes de guidage terminal (plus ou moins automatisés).
 

Évidemment, le projet ne pourra pleinement voir le jour que si le développement en parallèle des deux solutions souveraines avance comme prévu. Après les premiers essais statiques de motorisation du drone Aarok il y a quelques semaines, les essais de roulage devraient prochainement débuter. Le premier vol de l’Aarok est toujours prévu avant la fin de l’année 2024, selon des représentants de la société récemment interrogés. Les phases d’essais en vol puis de certification devraient ensuite suivre.

La solution Veloce 330 bénéficie quant à elle de l’élan donné par l’appel à projets Larinae lancé par l’Agence de l’Innovation de Défense (AID) pour des munitions télé-opérées de moyenne portée (MTO-MP). EOS Technologie est présent au sein du consortium réunissant KNDS France et Traak (pour la liaison de données et la navigation par GPS protégées). Des premiers vols de démonstration, avec des charges factices mais des capacités de guidage terminal en partie automatisées, sont prévus d’ici la fin de l’année. Des tirs avec charges réelles sont prévus d’ici mi-2025.
 
Ce laps de temps sera mis à profit pour faire gagner en autonomie le prototype sur toutes les phases de vol, tout en travaillant la partie industrialisation. Avec ses formes anguleuses, la découpe des éléments profilés se fait au fil chaud, permettant des délais réduits de production, et d’espérer des montées en cadence importantes pour répondre à l’impératif de masse. Un appel d’offres devrait suivre ensuite pour le programme MTO-MP, en tentant de raccourcir le délai entre la fin de l’appel à projets et le lancement de l’appel d’offres, quitte même à superposer un peu les deux processus.

Ce bouillonnement de concepts et de développements techniques, à suivre, devrait permettre de pleinement prouver que l’association de différentes compétences est bien la solution pour obtenir des systèmes pertinents pour les utilisateurs finaux.

2 commentaires:

Félix GARCIA a dit…

En effet, cette combinaison serait très pertinente.
EOS "révolutionne" les munitions guidées avec VELOCE.

Une version "pliée", "en boîte", à l'image de ce que propose Fly-R avec la R2-120 Raijin, serait probablement adaptée à l'emport sous voilure.

L'on peut sans trop de soucis en imaginer une version lancée par hélicoptères, depuis l'intérieur à travers la porte latérale.
---> Hélicoptère d'attaque et/ou porte-drones.
De la même manière, un "barillet" à paniers de LMP (Lanceur Modulaire Polyvalent) installé dans un hélicoptère serait un autre "couplage" qui accroîtrait nos capacités "à pas cher".
---> Un Guépard, un Caïman, un Cougar, un Caracal ou un Racer pourraient se faisant emporter de nombreuses munitions type VELOCE ou autres, et servir si besoin de relai/C2 aérien.

L'AAROK ayant une cellule qui suggère la possibilité de voler à basse altitude, notamment si équipé de moyens de suivi de terrain, nous aurions là un atout non négligeable aux côtés des autres aéronefs (avions de chasse et de transport, hélicoptères, drones de combat ...).

Parmi les concepts de Turgis & Gaillard qui s'insèreraient très bien dans le tableau : le dispositif de largage "SSA-1604 Foudre" et "SSA-1101 Gerfaut" :
https://www.turgisetgaillard.fr/wp-content/uploads/2020/11/image_accueil.jpg
https://www.turgisetgaillard.fr/wp-content/uploads/2020/11/image_c.jpg
---> Transformant par là, si besoin et en fonction des missions, nos avions de transports en "bombardiers/camions à bombes/porte-drones".

Au plaisir de continuer de vous lire.
Cordialement.

Anonyme a dit…

Heureusement que le laboratoire d'essai n'est pas notre propre sol.
https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2024/06/14/ukraine-24701.html

Les guerres industrielles rendaient les civilisations mortelles plus facilement que dans les époques précédentes, mais la guerre robotisée remet en cause la survie de l'espèce.

Bilbon, Asimov avait tort.