lundi 20 octobre 2008

Henry Kissinger, le diplomate attendu et David Petraeus, le général-sauveur espéré.

L’arrivée de Nixon à la présidence américaine en 1969 marque un tournant dans la sortie de crise au Vietnam. Promesses faites durant la campagne électorale, le retour progressif puis le départ complet des troupes américaines du « bourbier » vietnamien font partie de ses priorités de politique extérieure pour calmer les mécontentements internes. La vietnamisation du conflit (« jaunissement » des unités et montée en puissance de l’armée du Sud-Vietnam) est alors un des palliatifs face à la baisse sur place des effectifs peu à peu rapatriés.

Avant de devenir son secrétaire d’Etat (en 1973), un de ses conseillers pour la sécurité nationale, Henry Kissinger va œuvrer pour trouver une solution honorable à la crise. Fervent admirateur de la Realpolitik (l’action pour des résultats concrets) du chancelier allemand Otto Von Bismarck, son interprétation et sa vision des relations internationales peuvent être classés comme découlant de l’école dite réaliste. L’Etat est un monstre nécessaire pour l’ordre interne (le Léviathan de Hobbes au 17ème siècle) au même titre que la guerre est nécessaire comme élément de régulation de l’anarchie externe. Le rapport de force ou l’équilibre des puissances (« Balance of power ») sont alors des termes redondants dans le champ lexical de cette école.

Au cours de négociations débutées en 1968 à Paris et tenues secrètes jusqu’en 1972, Henry Kissinger fût le principal artisan des efforts de paix. Il traite dans un cadre large du cas du Cambodge et de celui du Laos voisin. Il n’exclut pas de parlementer avec les adversaires non déclarés (ouvrant l’ère dite communément de la détente) qui soutiennent les forces armées du Vietnam du Nord, que cela soit la Russie (visite de Kissinger puis de Nixon en URSS en mars 1972) ou la Chine (visite en février 1972 avec le secrétaire du Parti Zhou Enlai). Et cela dans le but de contenir ces puissances par rapprochement afin d’acquérir un rapport qui doit mener à la paix (civile et régionale), mélange de concorde et d’équilibre.

Différents plans de paix sont proposés comme bases des discussions tripartites entre les Etats-Unis, le Sud et le Nord-Vietnam. Le 23 mars 1972, les discussions sont rompues après des déclarations de la délégation nord-vietnamienne sur les prisonniers américains, une nouvelle offensive du Sud vers le Cambodge et des décisions américaines au sujet des raids aériens. Afin d’être présent à la table des négociations (lorsqu’elles reprendront) en position de force, Kissinger ne s’oppose (et même ne serait pas étranger à la décision) ni aux bombardements massifs des bases de soutien au Nord-Vietnam et en dehors, ni aux blocages des ports du Nord par des mines, ni à cette offensive (menée en partie par les forces du Sud) visant la région de la ville de Quang-Tri.

Le 8 octobre 1972, les pourparlers reprennent autour du couple Kissinger et Le Duc Tho, délégué nord-vietnamien. Avec des hauts (accord séparé pour une résolution politique et militaire accepté par le Nord) et des bas (bombardements massifs de Hanoi et de Haiphong par l’US Air force), les discussions se poursuivent et vont mener le 27 janvier à la signature d’accords « mettant fin à la guerre et restaurant la paix au Vietnam ». La personnalité de Kissinger, comme lien entre différentes décisions menant à ces accords, semble centrale pour le dénouement (provisoire pour le Vietnam) de la crise.

Et maintenant, si on remplaçait certains termes par d’autres : Kissinger par Petraeus, Vietnam par Irak ou Afghanistan, Chine ou Russie par Iran ou Pakistan, bombardements sur les zones frontalières par drones armées et missiles sur des zones tribales et des sanctuaires, pourquoi pas Quang Tri par Helmand, vietnamisation par irakisation, opérations avant discussions par réduire la capacité militaire comme préalable,… Il manquerait plus qu’à définir David Petraeus comme un chantre de l’école réaliste et de lui souhaiter bon courage face au melting-pot (réaliste/idéaliste) des néo-conservateurs si ces derniers restent les tenants de la pensée dominante aux Etats-Unis.

Mais n’oublions pas que « comparaison n’est pas raison » (distinction entre un civil et un militaire par exemple). Même s’il existe des écoles d’interprétations historiques avec un caractère pérenne qui par une approche comparatiste permettent de décoder en partie (et en partie seulement) des exemples contemporains par d’autres plus anciens. En ne tombant pas dans le piège d’une prospective facile pour la définition d’un résultat final systématiquement similaire. A voir donc !

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