mardi 18 novembre 2008

On serait donc comme ça ! Si peu...

L’United States Insitute of Peace est une institution non partisane et indépendante fondée en 1984 par le Congrès. Son but est d’aider à prévenir et à résoudre les conflits internationaux, ainsi que promouvoir la stabilisation et le développement post-conflit. Dans ce but et pour faciliter la réalisation de ces objectifs, les presses de cet organisme « officiel » américain ont publié des manuels de négociation selon la culture propre des interlocuteurs.

Aujourd’hui la diplomatie contemporaine est un savant mélange de différents courants historiques. De la diplomatie à l’italienne du 15ème et 16ème siècle, venant de Byzance faite de tromperie et d’opportunité pour des avantages immédiats dans le cadre secret et fermé d’un cérémonial codifié. De la diplomatie dite française du 17ème jusqu’au 19ème siècle, avec en figure de proue le cardinal de Richelieu, caractérisée par des relations solides et durables au cours d’une activité continue où les résultats des négociations sont plus graduées grâce à une confiance réciproque. Et enfin de la diplomatie dite moderne ou américaine, chère à Wilson, caractérisée par l’ouverture de relations internationales et par la tenue de conférences où les résultats sont rendus publics obligeant la prise en compte les médias et les opinions.

Devant la complexité de « l’art » de la négociation (où l’expérience pratique autant que les connaissances théoriques sont utiles), pour guider les praticiens de la diplomatie, une série d’ouvrages a été publiée. Le premier tome s’intéressait à la Chine, qualifiée de « vieil ami ». Le second à la Russie, le troisième à la Corée du Nord, le quatrième au Japon, le cinquième à l’Allemagne, le sixième à la France et le dernier aux Israéliens et aux Palestiniens. Organisme dépendant du Congrès, l’USIP est au courant des débats et des intérêts. Il est donc intéressant de noter l’ordre de parution qui peut suivre un certain ordre de priorité pour le gouvernement autant qu’un ordre de lacunes face à certaine culture qu’il faut combler.

Pour la Chine : en pleine croissance, le centre de gravité du monde se déplacera sans doute vers l’Asie. Autant ne pas laisser filer l’opportunité de faire des affaires en étant bien positionné et/ou de ne pas se mettre à dos cette future puissance. La Russie, cela relève d’un vieil antécédent ancré dans l’Histoire. Il vit encore aujourd’hui et assure des relations (souvent troubles) entre les deux anciens leaders des blocs. La Corée du Nord, c’était et c’est encore une inquiétude au centre des préoccupations : un des « rogue states » qui mérite l’attention. Le Japon, pour avancer ses pions en Asie, par les relations tissées depuis l’après guerre et à cause d’ une culture totalement différente, il méritait bien un ouvrage. L’Allemagne, pour l’équilibre des puissances en Europe, par l’intérêt qu’on lui a porté durant longtemps (le conflit de 50 ans ou Guerre froide) plutôt sur elle qu’avec elle et aujourd’hui pour faire contre poids face au turbulent voisin, la France, étudions la diplomatie allemande. Pour les Israéliens et les Palestiniens, le sac de nœud, les limites à ne pas franchir, les communautarismes, les spécificités juives et musulmanes, bien différentes de ce qui est connu, encore un autre ouvrage nécessaire.

L’ouvrage sur la France est écrit par Charles Cogan, chercheur à Harvard et ancien de la CIA dont cinq ans en poste à Paris. Le sous titre est particulièrement instructif sur la vision de l’autre « Négocier avec la grande Nation ». Ainsi orgueilleux de notre passé, où la France pouvait se prévaloir d’une certaine puissance et donc de prérogatives dues à son rang, il ne faudrait pas blesser notre orgueil du passé. Les Français auraient du mal à se faire à l’idée d’un déclassement objectif, trop ancrés dans une vision éternelle avec une superbe Histoire de France. Les diplomates américains ne devraient pas prêter attention à notre anti-américanisme de bon ton et ne pas sous estimer nos fermes positions de défendre sans aucune concession les intérêts de la France. C’est assez instructif et souvent ironique de SE regarder par le miroir et le recul possible de l’étranger.

Quid des pays africains? La Grande Bretagne n’est pas traitée la série : serait-elle considérée comme définitivement aux ordres et sur la même longueur d’onde ? Et en faisant un peu de prospective, sur qui sera le prochain volet de la série ? On retourne en Asie : les Indiens ou les Pakistanais ? Ou on continue en Orient : les Irakiens ou les Iraniens ?

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah, je l'ai lu aussi. C'est effectivement fascinant mais j'ignorais tout à fait qu'il s'agissait d'une série.

F. de St V. a dit…

Pour rien vous cacher, je ne les ai pas tous lu... Mais au moins celui en français, malgré quelques stéréotypes récurrents, il est assez fascinant...

Anonyme a dit…

Vous citez Richelieu comme l'exemple du négociateur français du 18e siècle. A mon humble avis, Mazarin était de loin bien meilleur négociateur et diplomate que le grand cardinal.
A l'inverse de son mentor, il a très vite compris que pour négocier gagnant, même en position de force, il fallait permettre à l'adversaire de conserver une certaine latitude et liberté de manœuvre et ne jamais l'humilier, afin qu'il puisse s'avancer la tête haute à la table des négociations.

F. de St V. a dit…

Je voulais juste noter la rupture que marquait Richelieu, ministre catholique du royaume de France, qui face au St Empire Germanique, lui aussi catholique avait préféré "la raison d'état" pour s'inscrire dans la coalition anti-impériale plutôt protestante pour un équilibre des puissances en Europe durant cette guerre de 30 ans.

Les intérêts seraient plus forts que les "idéologies" en Relations internationales? Un beau sujet...

Mazarin, plus que sur les buts et les effets, était certainement du fait de son ascendance italienne, plus à même par sa finesse d'être un modéle de méthode.