mercredi 18 mars 2009

L’OTAN : Transformation et interopérabilité des matériels (+MAJ)


Cartouche de calibre 5,56 mm OTAN, MRAP avec un niveau de protection 4 STANAG OTAN, sous-marin Typhoon pour les Russes et Akula pour l’OTAN, etc. Les sigles et les normes OTAN concernant les équipements sont employés couramment (une preuve de leur reconnaissance mondiale) mais leur élaboration est moins connue. Sans être forcément complet, j’ai tenté d’en savoir plus suite à l’appel du pied d’Olivier Kempf.


La normalisation des matériels est tout d’abord qu’un des piliers de cette recherche de standardisation otanienne. En effet s’y ajoute la doctrine (un peu de patience et AGS vous en parlera pour la COIN), la terminologie, les communications, l’entrainement, etc. Le but recherché est "le travail en synergie des moyens nationaux des membres de l’OTAN pour remplir les missions fixées" (définition issue de Politique OTAN d’interopérabilité de 2005). Cette interopérabilité voulue s’ajoute à celle qu'il faut atteindre aux niveaux : unités élémentaires, armes, armées, services, nations.


Déjà se pose une première question en sachant que l’Union Européenne est dotée de l’organisation FINABEL (inconnue du public qui a déjà produit 500 documents environ) et qui depuis 1953 (malgré les heurts de la construction de l’Europe de la Défense) travaille à l’harmonisation par des comités de travail. Il existe des liaisons officielles avec l’OTAN mais leurs fréquences et leurs natures me sont inconnues.


Au niveau OTAN, sur le plan pratique ces efforts se déclinent en deux types de documents. Les STANAG’s (STANdardization AGreement) sont des accords entre membres (donc autour d’un consensus a minima bien souvent) pour se doter de matériels et de procédures identiques ou similaires. Ensuite, les AP (Allied Publication) sont des "documents de mise en application" pour les utilisateurs. Ces productions sont issues du Comité OTAN pour la normalisation (affilié au Conseil de l’Atlantique Nordla France est déjà présente en permanence) qui anime le travail d’une profusion d’organisations avec des acronymes comportant au minimum NATO et Standardization puis Organization, Agency, Commitee,


Et ACT de Norfolk, devenu récemment célèbre, dans tout cela ? ACT dépend du Comité militaire de l’OTAN avec pour sous-divisions : concept et identification des besoins, développement des concepts interarmées, capacités futures, enseignement/entrainement. Des liens existent entre les structures, des avis doivent être échangés mais les distinctions ne sont pas nettes et les doublons nombreux: la recherche d’une meilleure efficacité des forces et d’une Transformation sont des expressions récurrentes à la lecture de leurs attributions respectives. ACT s’occupe exclusivement des capacités militaires (première différence) avec une vision à long terme (deuxième différence) en étant responsable de l’entrainement et de la pratique (troisième différence).


La critique récurrente d’une administration OTAN trop importante prend tout son sens à l’étude de ce processus d'adaptation et de prospective matérielle. La France va en rajouter 900 personnels et non remplacer... Pourtant, il faut noter que la distinction n'est pas si inutile puisque l’interopérabilité (travailler ensemble et avec quoi) n’est pas la même chose que la Transformation (travailler différemment et comment) même si des relations d’interdépendances fortes existent entre les deux: le résumé du grand débat actuel étant de savoir qui de la doctrine ou de la technologie détient la primauté (cf. les réflexions de Joseph Henrotin sur la "technologisation" où la technologie atteint les organes de décisions politiques).


Quelle possibilité pour la BID européenne ? Les industriels se réjouissent de la décision française mais pour la Base Industrielle de Défense, le challenge ne me semble pas être fondamentalement différent. Il leur faut continuer à rester crédible (mettre en avant la missilerie de MBDA plutôt que l’avionique de transport stratégique d’EADS..). Car avant de s’imposer, il reste toujours à proposer et surtout à convaincre.


Si l’interopérabilité se voit comme un résultat en bout de chaîne, cela nécessite en amont une compréhension, une connaissance et une entente mutuelle sur les besoins. Ainsi le développement d’une culture commune est le point de départ. Les économies d’échelles (état final recherché ?) par une recherche/production mutualisée seront alors possibles mais il faudra un vainqueur ou au moins un compromis dans la lutte entre une cohérence nationale souvent plus efficace (pour s'en convaincre étudions sur le terrain, les problèmes logistiques et matériels de coalition) et la recherche de la légitimité par le multinational.


Plus que jamais à l’heure de l'atteinte du seuil de l’efficacité technologique, cette recherche d’une plus grande harmonie au niveau technologique est nécessaire mais pas suffisante. Car c’est bien une vision politique/stratégique qui donne la direction et le chemin à suivre. C’est ainsi que le Pacte de Varsovie, ex-adversaire de l’OTAN, peut être considéré comme un modèle abouti d’interopérabilité : doctrines communes, matériels majoritairement semblables, au minimum compatibles mais souvent complètement interchangeables, etc. La nature du régime politique en place et la prédominance de Moscou dirigeant les états vassaux y sont pour quelque chose.

3 commentaires:

SD a dit…

Les groupes de travail FINABEL se réunissent environ deux fois par an et sont cosntitués selon des thèmes.

JGP a dit…

Bravo pour ce post didactique sur les STANAG et autres problématiques de standardisation / interopérabilité.

Il y a également énormément de choses intéressantes à en dire au niveau des defense contractors. J'essaierai d'y revenir à l'occasion.
JGP

F. de St V. a dit…

@ SD: merci pour votre remarque qui est tout à fait fondé. La structure FINABEL est légère et non permanente.

Pour plus d'informations, cf. une plaquette avec un discours pub très officiel sur FINABEL:

http://espace-finabel.eu/public/images/stories/Finabel/plaquette_frbassedef.pdf

@ JGP: le matériel et l'industrie semblent être plus vos domaines que les miens, j'attends donc avec impatience tous les éclaircissements que vous pourriez apporter. Entre autres pour les liens avec les industriels.