Après deux premiers volets sur la chronologie de ses opérations françaises au sol en Irak et en Syrie, les effectifs déployés, et la mission des militaires conventionnels, ce troisième volet abordera l’action des forces spéciales françaises (dans la limite de l’exercice), et le complément à ces missions de conseil et de formation qui est la fourniture aux forces locales d’armes, munitions et équipements divers.
Avec les forces spéciales en Irak : une palette de missions allant de la salle de cours jusqu’au front
En Irak, les quelques 200 forces spéciales françaises de la TF Hydra (issues des trois armées) assurent la quasi intégralité du spectre des opérations spéciales, « opérations militaires menées en dehors des cadres d'actions classiques, visant à atteindre des objectifs d'intérêt stratégique, notamment en termes d'actions d'environnement, d'ouverture de théâtre d'opérations, d'intervention dans la profondeur sur des objectifs à haute valeur, ou en matière de lutte contre les organisations terroristes ». Comme le souligne leur patron, le contre-amiral Isnard, cette mission est symbolique d’un certain continuum des opérations spéciales, inscrit dans la durée : « l’action coup de poing seule n’est pas suffisante. Si nous ne façonnons pas l’environnement de manière plus large, le problème ne sera réglé que momentanément. Nous réalisons donc d’abord du renseignement afin de donner une appréciation stratégique au chef d’état-major des armées. Puis, en fonction des objectifs fixés, nous bâtissons des actions sur plusieurs semaines, mois ou années. En parallèle, nous développons une approche globale en effectuant de la formation et du conseil auprès des unités partenaires, que nous faisons monter en gamme, comme c’est le cas en Irak. Nous leur passons en quelque sorte le relais pour qu’elles poursuivent le travail après notre départ ».
En Irak, il s’agit notamment de conseiller, de former et d’accompagner des unités (mission "advise & assist"), plus ou moins irrégulières, affiliées à l’un ou l’autre des deux partis kurdes majoritaires. A l’extrême Sud-Est de Mossoul, auprès d’unités de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) et au Nord-Ouest de Mossoul (à l’origine non loin de la frontière syrienne) auprès d’unités du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), qui est aujourd’hui le parti majoritaire. Les unités sont autant les Brigades de gardes régionaux (comme la 1ère brigade située aux environs de Souleimaniye, au Sud de Kirkouk, commandée par le général Omar Saleh Hassan, ou celle du général Araf Taifor au Nord de Mossoul), que les unités spéciales de contre-terrorisme dites Forces 70 (affiliée à l’UPK, dirigée par le général Sheikh Jafar, et qui est notamment connue pour avoir apporté de l’aide fin 2014 lors de la bataille de Kobane en Syrie) ou Forces 80 (pour le PDK). Ces 3 ensembles de forces (théoriquement 230.000 hommes dont 100.000 réservistes/volontaires) sont coordonnés par le ministère des Affaires Peshmergas. Une brigade de plus ou moins 6.500 combattants peshmergas gére ainsi plus d’une trentaine de kilomètres de front, sur une ligne de front qui pouvait s’étirer sur plus de 1.500 km, fin 2014-début 2015.
Le volet français de cette mission se fonde principalement sur un accord bilatéral entre la France et le gouvernement régional du Kurdistan, et non strictement dans le cadre de la Coalition ou dans celui de l’initiative prise en janvier 2015 par 8 pays (Italie, Allemagne, Pays-Bas, Grande-Bretagne, Norvège, Finlande, Hongrie et Turquie) d’établir à Erbil un centre de coordination appelé KTCC (Kurdistan Training Coordination Center). Le KTCC supervise les formations dispensées au sein de 4 camps d’entraînement (TC), dont le contenu dispensé, qu'il soit généraliste (un stage de 10 semaines pour ré-entraîner une brigade, par exemple) ou spécialisée, s’adapte avec les retours effectués par les équipes de forces spéciales opérant en opérations au contact de ces unités.
Comme en partie mentionnée dans les précédents volets, la partie formation est effectuée au sein d’un détachement d’instruction opérationnelle (DIO), intégrant parfois des militaires des unités conventionnelles, incarnation, en partie, du GAOS (groupement d'appui aux opérations spéciales) pour épauler avec certaines capacités les unités spéciales. Réalisée en arrière du front, cette formation couvre notamment l’utilisation et l’entretien des armes et des équipements livrés par la France (cf. ci-dessous), la lutte contre les engins explosifs ou la menace NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique). Ainsi, comme pour les unités conventionnelles, cela se déroule sous forme de stage, comme « Advanced Counter-IED Class » qui se déroule du 19 octobre 2015 au 9 novembre 2015, où, quelques jours après la cérémonie de fin de stage, les démineurs (rencontrés par France 2) sont déjà à l’œuvre du côté de Sinjar.
Les forces spéciales en Syrie : un effort, pour le moment, secondaire
En Syrie, et pour ce qu’il est possible d’en dire, des missions relativement similaires sont menées au Nord et à l’Est de la Syrie. Notamment dans le cadre de la poursuite du second objectif majeur de la coalition : la reprise de Raqqa, si possible au cours de l’année qui vient. Depuis plus d’un an, les responsables, français notamment, souhaitent garder la reprise Raqqa dans le viseur, tout en menant parallèlement la bataille de Mossoul. Elle n’en est encore qu’à sa phase de préparation, avec une isolation progressive de l’agglomération, officiellement lancée le 6 novembre 2016, mais encore loin d’être terminée. Très en amont, cela a débuté par la bataille de Manjib (mai à aout 2016) dans la province d’Alep, afin d’isoler Raqqa de la frontière turque, et couper ainsi certains flux de personnels et de ravitaillement.
Sur place, les forces spéciales françaises seraient un nombre réduit, autour d'une cinquantaine, et sans doute plutôt autour d’une trentaine, avant une éventuelle « bascule d’efforts » d’Irak vers la Syrie. Suite à la reprise de Mossoul espérée prochainement, qui pourrait libérer des effectifs. Leur présence est reconnue officiellement depuis juin 2016, même si le déploiement est sans doute bien antérieur (potentiellement avant la prise de Kobané début 2015, avec un effort de renforcement fin 2015/début 2016). Comme entre-aperçues ces dernières semaines pour certains, aussi à l'aise dans les étendues salées que désertiques, elles agissent notamment auprès d’unités irrégulières de type milices, réunies principalement au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS), notamment le Conseil militaire de Manbij. Les FDS sont une alliance (évolutive) formée en 2015 autour de milices kurdes YPG (branche armée du Parti de l’union démocratique PYD, comptant entre 5.000 et 7.000 combattants), de milices chrétiennes et d’autres groupes insurgés, pour atteindre entre 10.000 et 25.000, avec des estimations très variables (presque le double ou le triple selon les estimations américaines)… D'autres alliances de circonstance peuvent aussi recevoir l'appui et le soutien de ces militaires. La principale difficulté est de concilier les intérêts, parfois contradictoires, des différentes parties prenantes (Turquie, Etats-Unis, Russie, etc.), tandis que, sur le terrain, les combats continuent.
Leur rôle officiel est "de former, de préparer (avec une aide dans le domaine de la planification) et d’accompagner (notamment pour coordination des frappes aériennes)" les forces locales, avec, sans doute, une présence plus en première ligne qu’au Kurdistan irakien. La localisation de certaines frappes aériennes françaises, diffusée de manière hebdomadaire, au cours des derniers mois donne une relative idée de leur zone d’effort à quelques dizaines de kilomètres au Nord et à l’Ouest de Raqqa (vers le barrage de Tabqa), via la concrétisation de la couverture aérienne (renseignement et donc frappes) qui leur est garantie dans leurs opérations.
Ces militaires sont déployés au sein de détachements multinationaux, sur les différentes emprises (parfois connues...), à l'arrière comme sur la ligne de front dans le triangle Kobane-Manjib-Raqqa. Ces derniers sont notamment composés de forces spéciales américaines (300 forces spéciales officiellement depuis l'annonce présidentielle de leur renforcement en avril 2016) et britanniques. Cette intégration poussée rappelle l’importante confiance développée entre ces partenaires au cours d’opérations conjointes menées ces dernières années, notamment avec le commandement américain des forces spéciales USSOCOM. L'action de ce détachement français se fait avec une dépendance partagée, et assumée, dans certains domaines : capacités d’infiltration par air (hélicoptères UH-60 ou convertibles V-22, par exemple) ou au sol, évacuation sanitaire, transmissions…
Pour conclure, ce déploiement (comme en Irak, d’ailleurs) se fait dans un environnement saturé de moyens de captation notamment en images, où quasi tout le monde dispose d’un téléphone et où les journalistes ne sont pas si rares que cela. Cela peut avoir un impact sur la discrétion recherchée pour ce genre de missions, discrétion plus importante qu’en Irak pour des questions politiques (intervention sans autorisation formelle d’un Etat reconnu internationalement) et sécuritaires. Pour le moment, et à l’inverse de certains autres contingents (américains et britanniques, notamment, dont la présence a été largement rapportée ces derniers mois ou encore ici), cette discrétion est relativement préservée, avec peu d’indices de présence diffusés. Un vrai test, car cette problématique de la discrétion ne peut être que de plus en plus prégnante dans les années à venir avec la diffusion de ces moyens de recueil et diffusion de l'information.
Equipements et matériels : des cessions gratuites à plus ?
Au-delà des conseils et formations délivrés, la France a également réalisé des cessions gratuites de matériels aux Forces armées de la République d’Irak et aux Peshmergas de la région du Kurdistan d’Irak, en plusieurs vagues, pour un montant cumulé d’environ 13,4 millions d’€. Ces actions répondent à des demandes incessantes transmises par les responsables irakiens ou kurdes, pour plus de soutien, lors des fréquentes rencontres en Irak ou en France (comme en avril 2016). Si certaines donations sont faites selon un accord bilatéral, elles sont réalisées en coordination avec les autorités militaires américaines qui tiennent à jour (au niveau du centre de commandent USCENTCOM) une liste des besoins réalisée conjointement avec les autorités locales. Elle est disponible pour tous les pays engagés au sein de la Coalition (une soixantaine), chacun fournissant selon ses possibilités.
Dès août 2014, et comme déjà évoqué, des livraisons des canons anti-aériens de 20 mm type Tarasque ont été livrés via l’aéroport d’Erbil, avec leurs munitions associées. Montés sur des camions pour plus de mobilité, ils sont capables de faire but à 1.500 mètres et leurs munitions explosives et/ou incendiaires permettent de percer les blindages utilisés par l’organisation de l’Etat islamique pour ses véhicules suicide. Simples d’utilisation et d’entretien, ils sont présentés comme particulièrement bien adaptés aux besoins locaux. C’est également le cas de mitrailleuses de 12,7mm dont les munitions renforcées permettent également de combler les manques en armes de moyen calibre, notamment des unités kurdes. Dans certains cas, ces livraisons ont été effectuées avec l'appui du 1er régiment de train parachutiste (RTP), unité conventionnelle de l'armée de Terre spécialisée dans la livraison par air, du conditionnement des livraisons jusqu'à leur livraison par aérolargage (via parachutes), aéroportage (après un poser d'assaut) ou aérotransport.
Au-delà de ces livraisons les plus visibles, d’autres matériels ont été livrés plus récemment. Ainsi, lors des dernières livraisons réalisées mi-juin 2016 (pour un montant de 3,5 millions d’€) à Bagdad, les forces de sécurité irakiennes, jusque-là non concernées, ont reçu des munitions de calibre 12,7 mm, des grenades à main et des jumelles de vision nocturnes. Les munitions et les équipements, une fois vérifiés, ont immédiatement rejoint les unités engagées au front. De leurs côtés, les Peshmergas ont reçu à cette occasion des nouvelles caisses de munitions de calibre 12,7 et 20 mm, des roquettes antichars de 84 mm (potentiellement de type AT-4), des grenades à main, des jumelles de vision nocturne pour obtenir une supériorité tactique indéniable de nuit, des tenues « temps froid » pour équiper une dizaine de bataillons de Peshmerghas ainsi que des rations de combat.
En Syrie, les informations sont, évidemment, plus parcellaires, quant à leurs volumes ou les destinataires. Selon plusieurs sources à l’été 2014, les livraisons comprenaient notamment des mitrailleuses de calibre 12.7 mm, des lance-roquettes, des gilets pare-balles, des jumelles de visée nocturne, des kits médicaux, des rations de combat ainsi que des moyens de communication. Réalisées en grande partie sous l'égide d'unités ni spéciales et ni conventionnelles, elles ne sont pas au cœur de ce panorama.
Des dons sont réalisés sur les stocks détenus par les armées françaises, et non acquis en conséquence. De leur côté, les Américains ont ouvert une ligne de crédits appelée Iraq Train and Equip Fund (ITEF), à la fois pour les unités gouvernementales irakiennes, les Peshmergas et des tribus alliés au gouvernement irakien. 1,6Md€ étaient budgétés en 2015, 715 millions d’€ en 2016 et 630 millions d’€ prévus pour 2017. Le 31 décembre 2016, le ministre de la Défense français a annoncé la mise en place pour 2017 d’un mécanisme équivalent, plus modeste (autour de 10 millions d’€) afin de pouvoir acquérir puis donner des équipements (blindés, jumelles de vision nocturne, etc.) à des pays alliés. A cette occasion, le ministère n’a pas évoqué directement l’Irak comme exemple (mais la Tunisie, le Liban, la Jordanie, les pays du Sahel…), bien que ce pays puisse être éligible à un tel dispositif. L’avenir confirmera si ce pays partenaire est bien concerné ou non.
En Irak, les quelques 200 forces spéciales françaises de la TF Hydra (issues des trois armées) assurent la quasi intégralité du spectre des opérations spéciales, « opérations militaires menées en dehors des cadres d'actions classiques, visant à atteindre des objectifs d'intérêt stratégique, notamment en termes d'actions d'environnement, d'ouverture de théâtre d'opérations, d'intervention dans la profondeur sur des objectifs à haute valeur, ou en matière de lutte contre les organisations terroristes ». Comme le souligne leur patron, le contre-amiral Isnard, cette mission est symbolique d’un certain continuum des opérations spéciales, inscrit dans la durée : « l’action coup de poing seule n’est pas suffisante. Si nous ne façonnons pas l’environnement de manière plus large, le problème ne sera réglé que momentanément. Nous réalisons donc d’abord du renseignement afin de donner une appréciation stratégique au chef d’état-major des armées. Puis, en fonction des objectifs fixés, nous bâtissons des actions sur plusieurs semaines, mois ou années. En parallèle, nous développons une approche globale en effectuant de la formation et du conseil auprès des unités partenaires, que nous faisons monter en gamme, comme c’est le cas en Irak. Nous leur passons en quelque sorte le relais pour qu’elles poursuivent le travail après notre départ ».
En Irak, il s’agit notamment de conseiller, de former et d’accompagner des unités (mission "advise & assist"), plus ou moins irrégulières, affiliées à l’un ou l’autre des deux partis kurdes majoritaires. A l’extrême Sud-Est de Mossoul, auprès d’unités de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) et au Nord-Ouest de Mossoul (à l’origine non loin de la frontière syrienne) auprès d’unités du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), qui est aujourd’hui le parti majoritaire. Les unités sont autant les Brigades de gardes régionaux (comme la 1ère brigade située aux environs de Souleimaniye, au Sud de Kirkouk, commandée par le général Omar Saleh Hassan, ou celle du général Araf Taifor au Nord de Mossoul), que les unités spéciales de contre-terrorisme dites Forces 70 (affiliée à l’UPK, dirigée par le général Sheikh Jafar, et qui est notamment connue pour avoir apporté de l’aide fin 2014 lors de la bataille de Kobane en Syrie) ou Forces 80 (pour le PDK). Ces 3 ensembles de forces (théoriquement 230.000 hommes dont 100.000 réservistes/volontaires) sont coordonnés par le ministère des Affaires Peshmergas. Une brigade de plus ou moins 6.500 combattants peshmergas gére ainsi plus d’une trentaine de kilomètres de front, sur une ligne de front qui pouvait s’étirer sur plus de 1.500 km, fin 2014-début 2015.
Le volet français de cette mission se fonde principalement sur un accord bilatéral entre la France et le gouvernement régional du Kurdistan, et non strictement dans le cadre de la Coalition ou dans celui de l’initiative prise en janvier 2015 par 8 pays (Italie, Allemagne, Pays-Bas, Grande-Bretagne, Norvège, Finlande, Hongrie et Turquie) d’établir à Erbil un centre de coordination appelé KTCC (Kurdistan Training Coordination Center). Le KTCC supervise les formations dispensées au sein de 4 camps d’entraînement (TC), dont le contenu dispensé, qu'il soit généraliste (un stage de 10 semaines pour ré-entraîner une brigade, par exemple) ou spécialisée, s’adapte avec les retours effectués par les équipes de forces spéciales opérant en opérations au contact de ces unités.
Comme en partie mentionnée dans les précédents volets, la partie formation est effectuée au sein d’un détachement d’instruction opérationnelle (DIO), intégrant parfois des militaires des unités conventionnelles, incarnation, en partie, du GAOS (groupement d'appui aux opérations spéciales) pour épauler avec certaines capacités les unités spéciales. Réalisée en arrière du front, cette formation couvre notamment l’utilisation et l’entretien des armes et des équipements livrés par la France (cf. ci-dessous), la lutte contre les engins explosifs ou la menace NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique). Ainsi, comme pour les unités conventionnelles, cela se déroule sous forme de stage, comme « Advanced Counter-IED Class » qui se déroule du 19 octobre 2015 au 9 novembre 2015, où, quelques jours après la cérémonie de fin de stage, les démineurs (rencontrés par France 2) sont déjà à l’œuvre du côté de Sinjar.
Dans la continuité des formations, un service-après-vente, joignable par téléphone et très réactif, selon des combattants peshmergas, est également assurée en cas de problèmes techniques sur certaines armes livrées, notamment au Nord de Mossoul, dans la plaine de Ninive, du côté de Ba'ashiqah. Des officiers de liaison sont également insérés au sein d’états-majors afin de conseiller les mouvements de troupes, planifier les opérations, faire remonter vers la coalition les demandes, transmettre les renseignements recueillis par tous les moyens dont disposent la Coalition (satellites, avions, drones, etc.), coordonner les frappes, etc. Et cela sur les différentes phases : stopper l’offensive de l’organisation de l’Etat islamique à l’été 2014 qui menace la capitale régionale Erbil, stabiliser le front, se prémunir des tentatives d’infiltrations, lancer les offensives sur Kirkouk puis sur Mossoul, etc.
Enfin, des équipes d’opérateurs d’une dizaine de membres mènent des missions plus directement sur le terrain. Ces militaires opèrent de manière discrète (« désilhouettage », absence d’insignes, véhicules blindés de gamme civile ou d’unités partenaires, etc.), mais non de manière clandestine comme le feraient d’autres entités. Leur mission principale est le recueil et l'exploitation du renseignement, en particulier en milieu semi ou non permissif, depuis les premières lignes, si possible depuis des hauteurs (comme le Mont Zartik). Autonomes, insérées au sein des unités peshmergas, elles changent régulièrement de positons pour couvrir avec leurs moyens (optiques à fort grossissement et mode infrarouge type Sophie, drones de type Skylark, désignateurs lasers, etc.) différents secteurs.
Bien qu'étant des unités polyvalentes par nature, ces différentes missions sont néanmoins au cœur des spécialités travaillées par l'une ou l'autre des entités des forces spéciales (13ème RDP, CPA 10, état-major du COS, etc.). Le Groupement forces spéciales (GFS) reste néanmoins composé à l'instant t de quasi toutes les composantes, base de l'efficacité globale d'un tel dispositif.
Enfin, des équipes d’opérateurs d’une dizaine de membres mènent des missions plus directement sur le terrain. Ces militaires opèrent de manière discrète (« désilhouettage », absence d’insignes, véhicules blindés de gamme civile ou d’unités partenaires, etc.), mais non de manière clandestine comme le feraient d’autres entités. Leur mission principale est le recueil et l'exploitation du renseignement, en particulier en milieu semi ou non permissif, depuis les premières lignes, si possible depuis des hauteurs (comme le Mont Zartik). Autonomes, insérées au sein des unités peshmergas, elles changent régulièrement de positons pour couvrir avec leurs moyens (optiques à fort grossissement et mode infrarouge type Sophie, drones de type Skylark, désignateurs lasers, etc.) différents secteurs.
Bien qu'étant des unités polyvalentes par nature, ces différentes missions sont néanmoins au cœur des spécialités travaillées par l'une ou l'autre des entités des forces spéciales (13ème RDP, CPA 10, état-major du COS, etc.). Le Groupement forces spéciales (GFS) reste néanmoins composé à l'instant t de quasi toutes les composantes, base de l'efficacité globale d'un tel dispositif.
Si ces militaires sont régulièrement sur la ligne de front, ils ne participent pas directement au combat, du moins officiellement, et ne se substituent pas aux unités peshmergas, ou irakiennes. Comme en juin 2015, lorsque leur présence est mentionnée non loin de Kirkouk auprès d’unités de l’UPK, dans le cadre de guidage de moyens aériens. Selon certaines sources, ils auraient néanmoins été au cœur de plusieurs affrontements ces dernières années (notamment suite à des tentatives d’infiltrations ou des contre-attaques de l’organisation Etat Islamique), parfois à courte distance, les obligeant à faire usage de leurs armes. Officiellement, également, ils ne mènent pas de missions de renseignement derrière la ligne de front, en territoire ennemi, ou d’action directe (capture, neutralisation ou destruction) contre des cibles à haute valeur ajoutée. Au moins 2 opérations de ce genre, non confirmées officiellement, ont néanmoins été attribuées à des forces spéciales françaises, selon des observateurs locaux, ces 2 dernières années.
Enfin, afin d’accélérer la progression, notamment durant l’offensive de Mossoul (mais potentiellement aussi lors de reprises de précédentes villes), les forces spéciales assurent aussi la continuité de la formation dispensées par les unités conventionnelles auprès de l’ICTS. Cela s’inscrit dans le cadre général de renforcement du nombre de conseillers de la coalition suite à certaines difficultés fin 2016 à progresser au cœur de l’Est de Mossoul. Le nombre de conseillers, tous pays confondus, présents à Mossoul serait passé de 200 jusqu’à début décembre 2016, à au moins le double (dont des unités conventionnelles, principalement américaines) depuis la relance de l’offensive début janvier. Leur rôle y est d’aider à coordonner les frappes aériennes (comme mentionné dès novembre 2016 où leur présence est remarquée auprès de contrôleurs aériens avancés irakiens) ou les tirs d’artillerie, conseiller certaines manœuvres, et recueillir du renseignement.
Enfin, afin d’accélérer la progression, notamment durant l’offensive de Mossoul (mais potentiellement aussi lors de reprises de précédentes villes), les forces spéciales assurent aussi la continuité de la formation dispensées par les unités conventionnelles auprès de l’ICTS. Cela s’inscrit dans le cadre général de renforcement du nombre de conseillers de la coalition suite à certaines difficultés fin 2016 à progresser au cœur de l’Est de Mossoul. Le nombre de conseillers, tous pays confondus, présents à Mossoul serait passé de 200 jusqu’à début décembre 2016, à au moins le double (dont des unités conventionnelles, principalement américaines) depuis la relance de l’offensive début janvier. Leur rôle y est d’aider à coordonner les frappes aériennes (comme mentionné dès novembre 2016 où leur présence est remarquée auprès de contrôleurs aériens avancés irakiens) ou les tirs d’artillerie, conseiller certaines manœuvres, et recueillir du renseignement.
Les forces spéciales en Syrie : un effort, pour le moment, secondaire
En Syrie, et pour ce qu’il est possible d’en dire, des missions relativement similaires sont menées au Nord et à l’Est de la Syrie. Notamment dans le cadre de la poursuite du second objectif majeur de la coalition : la reprise de Raqqa, si possible au cours de l’année qui vient. Depuis plus d’un an, les responsables, français notamment, souhaitent garder la reprise Raqqa dans le viseur, tout en menant parallèlement la bataille de Mossoul. Elle n’en est encore qu’à sa phase de préparation, avec une isolation progressive de l’agglomération, officiellement lancée le 6 novembre 2016, mais encore loin d’être terminée. Très en amont, cela a débuté par la bataille de Manjib (mai à aout 2016) dans la province d’Alep, afin d’isoler Raqqa de la frontière turque, et couper ainsi certains flux de personnels et de ravitaillement.
Sur place, les forces spéciales françaises seraient un nombre réduit, autour d'une cinquantaine, et sans doute plutôt autour d’une trentaine, avant une éventuelle « bascule d’efforts » d’Irak vers la Syrie. Suite à la reprise de Mossoul espérée prochainement, qui pourrait libérer des effectifs. Leur présence est reconnue officiellement depuis juin 2016, même si le déploiement est sans doute bien antérieur (potentiellement avant la prise de Kobané début 2015, avec un effort de renforcement fin 2015/début 2016). Comme entre-aperçues ces dernières semaines pour certains, aussi à l'aise dans les étendues salées que désertiques, elles agissent notamment auprès d’unités irrégulières de type milices, réunies principalement au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS), notamment le Conseil militaire de Manbij. Les FDS sont une alliance (évolutive) formée en 2015 autour de milices kurdes YPG (branche armée du Parti de l’union démocratique PYD, comptant entre 5.000 et 7.000 combattants), de milices chrétiennes et d’autres groupes insurgés, pour atteindre entre 10.000 et 25.000, avec des estimations très variables (presque le double ou le triple selon les estimations américaines)… D'autres alliances de circonstance peuvent aussi recevoir l'appui et le soutien de ces militaires. La principale difficulté est de concilier les intérêts, parfois contradictoires, des différentes parties prenantes (Turquie, Etats-Unis, Russie, etc.), tandis que, sur le terrain, les combats continuent.
Leur rôle officiel est "de former, de préparer (avec une aide dans le domaine de la planification) et d’accompagner (notamment pour coordination des frappes aériennes)" les forces locales, avec, sans doute, une présence plus en première ligne qu’au Kurdistan irakien. La localisation de certaines frappes aériennes françaises, diffusée de manière hebdomadaire, au cours des derniers mois donne une relative idée de leur zone d’effort à quelques dizaines de kilomètres au Nord et à l’Ouest de Raqqa (vers le barrage de Tabqa), via la concrétisation de la couverture aérienne (renseignement et donc frappes) qui leur est garantie dans leurs opérations.
Ces militaires sont déployés au sein de détachements multinationaux, sur les différentes emprises (parfois connues...), à l'arrière comme sur la ligne de front dans le triangle Kobane-Manjib-Raqqa. Ces derniers sont notamment composés de forces spéciales américaines (300 forces spéciales officiellement depuis l'annonce présidentielle de leur renforcement en avril 2016) et britanniques. Cette intégration poussée rappelle l’importante confiance développée entre ces partenaires au cours d’opérations conjointes menées ces dernières années, notamment avec le commandement américain des forces spéciales USSOCOM. L'action de ce détachement français se fait avec une dépendance partagée, et assumée, dans certains domaines : capacités d’infiltration par air (hélicoptères UH-60 ou convertibles V-22, par exemple) ou au sol, évacuation sanitaire, transmissions…
Pour conclure, ce déploiement (comme en Irak, d’ailleurs) se fait dans un environnement saturé de moyens de captation notamment en images, où quasi tout le monde dispose d’un téléphone et où les journalistes ne sont pas si rares que cela. Cela peut avoir un impact sur la discrétion recherchée pour ce genre de missions, discrétion plus importante qu’en Irak pour des questions politiques (intervention sans autorisation formelle d’un Etat reconnu internationalement) et sécuritaires. Pour le moment, et à l’inverse de certains autres contingents (américains et britanniques, notamment, dont la présence a été largement rapportée ces derniers mois ou encore ici), cette discrétion est relativement préservée, avec peu d’indices de présence diffusés. Un vrai test, car cette problématique de la discrétion ne peut être que de plus en plus prégnante dans les années à venir avec la diffusion de ces moyens de recueil et diffusion de l'information.
Equipements et matériels : des cessions gratuites à plus ?
Au-delà des conseils et formations délivrés, la France a également réalisé des cessions gratuites de matériels aux Forces armées de la République d’Irak et aux Peshmergas de la région du Kurdistan d’Irak, en plusieurs vagues, pour un montant cumulé d’environ 13,4 millions d’€. Ces actions répondent à des demandes incessantes transmises par les responsables irakiens ou kurdes, pour plus de soutien, lors des fréquentes rencontres en Irak ou en France (comme en avril 2016). Si certaines donations sont faites selon un accord bilatéral, elles sont réalisées en coordination avec les autorités militaires américaines qui tiennent à jour (au niveau du centre de commandent USCENTCOM) une liste des besoins réalisée conjointement avec les autorités locales. Elle est disponible pour tous les pays engagés au sein de la Coalition (une soixantaine), chacun fournissant selon ses possibilités.
Dès août 2014, et comme déjà évoqué, des livraisons des canons anti-aériens de 20 mm type Tarasque ont été livrés via l’aéroport d’Erbil, avec leurs munitions associées. Montés sur des camions pour plus de mobilité, ils sont capables de faire but à 1.500 mètres et leurs munitions explosives et/ou incendiaires permettent de percer les blindages utilisés par l’organisation de l’Etat islamique pour ses véhicules suicide. Simples d’utilisation et d’entretien, ils sont présentés comme particulièrement bien adaptés aux besoins locaux. C’est également le cas de mitrailleuses de 12,7mm dont les munitions renforcées permettent également de combler les manques en armes de moyen calibre, notamment des unités kurdes. Dans certains cas, ces livraisons ont été effectuées avec l'appui du 1er régiment de train parachutiste (RTP), unité conventionnelle de l'armée de Terre spécialisée dans la livraison par air, du conditionnement des livraisons jusqu'à leur livraison par aérolargage (via parachutes), aéroportage (après un poser d'assaut) ou aérotransport.
Au-delà de ces livraisons les plus visibles, d’autres matériels ont été livrés plus récemment. Ainsi, lors des dernières livraisons réalisées mi-juin 2016 (pour un montant de 3,5 millions d’€) à Bagdad, les forces de sécurité irakiennes, jusque-là non concernées, ont reçu des munitions de calibre 12,7 mm, des grenades à main et des jumelles de vision nocturnes. Les munitions et les équipements, une fois vérifiés, ont immédiatement rejoint les unités engagées au front. De leurs côtés, les Peshmergas ont reçu à cette occasion des nouvelles caisses de munitions de calibre 12,7 et 20 mm, des roquettes antichars de 84 mm (potentiellement de type AT-4), des grenades à main, des jumelles de vision nocturne pour obtenir une supériorité tactique indéniable de nuit, des tenues « temps froid » pour équiper une dizaine de bataillons de Peshmerghas ainsi que des rations de combat.
En Syrie, les informations sont, évidemment, plus parcellaires, quant à leurs volumes ou les destinataires. Selon plusieurs sources à l’été 2014, les livraisons comprenaient notamment des mitrailleuses de calibre 12.7 mm, des lance-roquettes, des gilets pare-balles, des jumelles de visée nocturne, des kits médicaux, des rations de combat ainsi que des moyens de communication. Réalisées en grande partie sous l'égide d'unités ni spéciales et ni conventionnelles, elles ne sont pas au cœur de ce panorama.
Des dons sont réalisés sur les stocks détenus par les armées françaises, et non acquis en conséquence. De leur côté, les Américains ont ouvert une ligne de crédits appelée Iraq Train and Equip Fund (ITEF), à la fois pour les unités gouvernementales irakiennes, les Peshmergas et des tribus alliés au gouvernement irakien. 1,6Md€ étaient budgétés en 2015, 715 millions d’€ en 2016 et 630 millions d’€ prévus pour 2017. Le 31 décembre 2016, le ministre de la Défense français a annoncé la mise en place pour 2017 d’un mécanisme équivalent, plus modeste (autour de 10 millions d’€) afin de pouvoir acquérir puis donner des équipements (blindés, jumelles de vision nocturne, etc.) à des pays alliés. A cette occasion, le ministère n’a pas évoqué directement l’Irak comme exemple (mais la Tunisie, le Liban, la Jordanie, les pays du Sahel…), bien que ce pays puisse être éligible à un tel dispositif. L’avenir confirmera si ce pays partenaire est bien concerné ou non.
Au-delà, plusieurs visites de hauts responsables irakiens (comme le général Taleb Al-Kinanni, directeur général de l’ICTS, en avril 2015) ont été réalisées, notamment sous l’égide de la Direction générale pour l’armement) sont organisées dans le but de favoriser de possibles contrats d’exportation (véhicules blindés, hélicoptères légers, missiles anti-chars, équipements divers, etc.). Sans que pour le moment cela ne débouche sur des contrats d’importance.
A suivre : Quels résultats quantitatifs et qualitatifs ? Quelles évolutions à court et moyen terme ?
A suivre : Quels résultats quantitatifs et qualitatifs ? Quelles évolutions à court et moyen terme ?
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