dimanche 16 octobre 2011

La com' française, c'est pas le pied...

D'intéressantes questions sont soulevées par les posts de Zone Militaire, Actudéfense et EGEAsuite à la réaction du porte-parole de l'EMA après la parution du documentaire "C'est pas le pied la guerre?".

Les remarques des uns et des autres, comme le documentaire d'ailleurs, appellent quelques commentaires. Par contre, n'étant pas un pro de la com', je n'ai aucune certitude sur la validité et la pertinence de mon propos... Au lecteur de juger de sa valeur.

1. Les réactions de l'EMA, qui s'inquiètent publiquement de la diffusion sans accord d'images prises par des militaires du rang, semblent être empreintes de peur et d'un manque de confiance. En effet, ces condamnations peuvent être vues comme l'affirmation par les acteurs eux-mêmes que la communication de l'EMA n'est pas résiliente à l'émission d'éléments de contre-discours. Elle ne pourrait encaisser le choc (cela reste à confirmer : ce documentaire sera-t-il encore cité dans quelques mois?).

2. En effet, et c'est à mon avis un bien et un mal, mais ces images ne sont pas dans le ton de "la guerre en dentelles" que veulent représenter les communiqués de presse et autres images autorisées. Ainsi, et pour faire court, seulement "ceux qui savent" auraient pu se douter que le militaire de base est un homme, jurant, regardant des films porno, que les erreurs n'existent pas, etc. Ainsi, s'il est nécessaire de ne pas relativiser la guerre à un acte anodin (désacralisé), il semble donc aussi nécessaire de la rendre plus humaine.

3. Grâce à un bon storytelling de la part du producteur et du diffuseur, le documentaire a été présenté comme contenant des images inédites, interdites de diffusion par l'EMA, montrant le vrai visage de la guerre, etc. Du scoop sur toute la ligne avec le piquant de l'interdit et de la ligne jaune qui est dépassée. Tout pour faire vendre et faire grimper l'audience. Or, comme tout bon storytelling cela est en partie vrai et en partie faux. Un visage y était visible et non LE visage de la guerre.


4. En conséquence, à une attitude passive et attentiste, espérant encaisser le choc, il aurait été préférable pour la com' militaire de montrer un autre visage. Pourquoi elle n'a pas tenté d'expliquer avant la diffusion le contenu en donnant des éléments de contexte? Le mandat du 8ème RPIMa est le 1er mandat en Kapisa : l'armée française y redécouvre la dureté des combats, les relations de frères d'armes avec les Américains sont naissantes, la coordination est balbutiante, etc. A cette époque, c'était comme cela. Aujourd'hui c'est bien différent.

5. A ces attaque douces préventives, un meilleur contexte de réception du documentaire aurait pu être créé. En effet, pourquoi la com' française s'obstine à ne pas lâcher en partie la bride sur la circulation des informations et images personnelles? Ces nouvelles images personnelles auraient ainsi pu être noyées (est-ce vraiment possible, je m'interroge...) dans un flot d'autres informations rendant moins inédite leur diffusion. Dans sa contre-attaque informationnelle, elle aurait pu ensuite s'appuyer sur des images déjà publiées.

6. Et c'est bien là tout le défi de la communication actuelle entre com' publique et com' d'initiative privée rentabilisée et exploitée. En effet, un élément de discours est d'autant moins crédible qu'il porte le sceau "officiel" et qu'il est donc vite estampillé "propaganda". Ainsi, les restrictions de communication encadrant la diffusion d'images ne doivent pas être perçues seulement comme des menaces (pas de dangereuse ultra-libéralisation) mais aussi comme de formidables opportunités avec des pépites qui peuvent émerger.

7. En conclusion, des efforts ont été réalisés ces dernières années pour donner de l'influence aux éléments de com' de l'EMA. Les conférences de presse avec des "grands témoins" opérationnels, la qualité des vidéos, la très (trop) discrète entrée sur les médias sociaux, etc. Du chemin reste à parcourir pour que ses querelles intestines qui affaiblissent le centre de gravité ami ne puissent être récupérées sans effort par le CDG ennemi. Or pas sur que ceux qui mettent à disposition de telles images se rendent compte des enjeux supérieurs...

Si la communication opérationnelle est réellement une opération de combat, alors lançons des attaques préventives, contre-attaquons, saturons de nos feux les adversaires...

jeudi 13 octobre 2011

Des guerres picrocholines? Kesako?

"Face aux puissances américaine, chinoise et indienne, l’Europe apparaît morcelée, se livrant à ce qui, vu de Pékin, doit ressembler à des guerres picrocholines"
Amiral Édouard Guillaud, chef d’état-major des armées

L'audition le 05 octobre 2011 du CEMA par la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée Nationale mérite d'être lue avec le plus grand intérêt. Quelques informations nouvelles, des confirmations de bruits de couloirs et le renforcement de tendances y sont explicitées.

Interpellé récemment par le député Mourrut, un brin provocateur, à propos d'un possible conflit avec la Chine, l'amiral Guillaud s'est voulu rassurant tout en insistant sur le fait que les actuelles tensions en Mer de Chine méridionale pouvaient rapidement avoir des répercussions sur l'Océan Indien où la France dispose d'intérêts à défendre.

Il a rappelé que face à l'unité stratégique (buts, voies moyens) qu'incarnaient la Chine et dans un moindre mesure l'Inde ou les États-Unis, l'Europe semblait bien faible, agglomérat désuni qui donnait au monde une image peu à même d'incarner la puissance qu'elle se revendique d'être. Quand le paraitre est parfois tout aussi important l'être en relations internationales.


Le CEMA a alors employé l'expression de "guerres picrocholines" pour décrire les querelles que connait l'Europe et qui lui nuissent. Interpellé par ces mots, mon ignorance totale de la signification m'a obligé à faire quelques recherches sur ce qualificatif peu employé. Et qui finalement correspond pas mal à la situation.

L'adjectif "Picrocholine" vient donc de Picrochole, roi de Lerne qui s'oppose à Grandgousier le père du géant Gargantua dans le roman de François Rabelais. Pour une dispute lors de l'achat de fougasses (je ne veux pas t'en donner, mais si donne, et puis en fait non, etc.) entre des gens de Lerne et ceux du terroir de Grandgousier, le ton monte, les troupes sont mobilisées.

Du fait du caractère belliqueux de Picrochole, va-t'en-guerre pour un rien, le conflit éclate. Moultes péripéties suivent entre tentatives de paix, batailles épiques, reprises des hostilités pour une autre futile raison, et finalement fuite de Picrochole alors que ses troupes sont noyées peu glorieusement dans l'urine du cheval géant de Gargantua.

Je ne sais pas jusqu'à où il est possible d'en faire une métaphore filée avec la situation que connaît actuellement l'Europe, les débats, pinailleries et récriminations, mais quoiqu'il en soit, merci Amiral, je me coucherais moins bête ce soir grâce à vous!

PS : et pour la route, juste un chiffre et une anecdote trouvables parmi d'autres dans cette audition.
"Pour la zone française [en Afghanistan] : 600 soldats et policiers [afghans] il y a cinq ans, 3 000 aujourd’hui"
"La semaine dernière, un véhicule espagnol ayant dépassé de 500 m la zone de la FINUL a immédiatement été encerclé par des 4x4 aux vitres fumées ; des civils en armes en sont sortis et ont volé aux soldats leurs papiers, leurs cartes, leurs radios… effets qui leur ont été rendus cependant le lendemain"

lundi 10 octobre 2011

Le Mig 21 nominé pour le prochain Nobel de la Paix? (+ MAJ)

Alors que la compétition fait rage pour la (peut-être) dernière ligne droite du contrat pour le futur appareil de combat indien (cf. les mesures des différents constructeurs ici avec une belle pub dans l'India Times ou là avec une démo gratuite), l'aviation indienne fait encore la une.

En effet, un de ses modèles d'appareils actuellement en service, le vénérable Mig 21, vient d'être nominé dans la short-list finale pour les prochains Prix Nobel de la Paix (source Hindustan Times). La décision finale quant au nominé est attendue dans un an.

La raison de cette nomination vient du fait que "the IAF Mig-21 which is the most prominent aircraft to reject the notion of war by deciding to crash in entirety before any conflict arises, thus saving thousands of innocent lives".

En effet sur les six récents crashs d'appareils de l'Indian Air Force, quatre sont des Mig 21. Un appareil s'est encore crashé vendredi sans faire de victimes. Des mesures ont déjà été prises et seuls des pilotes dits "expérimentés" peuvent le piloter.

Mais rien n'y fait... Les crashs se poursuivent et cette nomination vient à point nommé pour couronner une grande carrière au service de la Paix. Le Mig 21, un appareil plus rétif au combat que le cheval Arabesque du caporal Blutch des Tuniques bleues qui refusent de charger...

Évidemment, tout ceci est une blague qui secoue ces dernières heures la blogosphère indo-pakistanaise et tous les fanas d'aéro... Tout en déchainant parfois les passions. Le 1er avril en Inde, c'est un peu tous les jours apparemment.

MAJ1 : l'article a été retiré du site du 3ème plus grand quotidien indien. Sujet sensible du fait de quelques tensions régionales persistantes, moquer gentillement l'armée ne semble pas être une sinécure. Surtout lorsque l'on observe "le buzz" engendré sur les forums, blogs et autres lieux 2.0. La retranscription de l'article reste visible ici.

Afghanistan : dix ans de guerre, dix ans de guerre de l'information

7 octobre 2001 - 7 octobre 2011 : dix ans de guerre d'Afghanistan. De (plus ou moins) brillantes retrospectives ont présenté ces derniers jours le bilan de ce conflit sous différents prismes. Vous avez noté les critiques de la contre-insurrection dont il était de bon ton de se décréter expert il y a encore quelques mois et dont il est encore de meilleur ton d'en rédiger aujourd'hui une critique acerbe à la lumière de l'engagement en Afghanistan...
Un sujet moins traité est l'impact de ces dix années de rudes batailles pour et par l'information, par les mots et les images, pour modeler les narrations et les perceptions des événements auprès de différentes audiences cibles. L'Observatoire Géostratégique de l'Information animé par François-Bernard Huyghe (chercheur à l'Iris) propose dans sa dernière lettre d'information d'aborder le sujet.
L'étude des contraintes et des opportunités du photojournalisme en Afghanistan révèle toute la difficulté de montrer la réalité des événements. Ensuite, Talibanator contre Terminator ou l'humain le plus filmé au monde, bien plus qu'une star de cinéma : le combattant Taliban. Enfin, une courte analyse par votre serviteur à propos de l'impact des médias sociaux sur le déroulement des opérations qui reprend et complète un de mes précédents articles.

N'ayant pas l'ambition de détenir la vérité, toutes les critiques sont les bienvenues!

PS : reprise sous peu d'un rythme normal de publications. Promis!

dimanche 9 octobre 2011

Cahiers d’AGS n°2 : Stratégies dans le cyberespace

L'ouvrage collectif de l'Alliance Géostratégique « Stratégies dans le cyberespace », 2ème numéro de la collection « Cahiers d’Alliance Géostratégique », publié par L’Esprit du Livre Editions, est actuellement en librairie. Voici les résumés des différents articles, qui font suite à une préface du général Marc Watin-Augouard, inspecteur général des armées - Gendarmerie.



Le cyberespace : structure et espace d’opérations par Stéphane Dossé

Qu’est-ce que le cyberespace ? Il existe sûrement depuis le début de la création des êtres vivants. Ce continent caché est composé de couches successives qui s’agrègent au fur et à mesure. En adoptant une vision globale, il est possible d’y envisager des opérations cohérentes.

Des lieux de la cyberguerre par Olivier Kempf

La mondialisation va de pair avec le développement de l’informatique : l’opinion courante croit donc que la cyberdéfense sera forcément transfrontalière. Or, l’espace cyber a des frontières. Surtout, il est le lieu où les États retrouvent une marge de manœuvre pour leurs politiques de puissance, y compris de façon offensive. Cela ne signifie pas pour autant que la cyberguerre constitue à elle seule un milieu autonome de la guerre : elle participe à une guerre de plus en plus complexe, où l’essentiel consiste à acquérir la maîtrise stratégique de l’information.

Géopolitique numérique : Omnibus viis Americam pervenitur par Stéphane Dossé

L’accès aux routes numériques et aux réseaux apparaît comme un enjeu mondial. Cela ne constitue pas une grande surprise. Les routes terrestres avaient contribué à assurer la suprématie de l’Empire romain. Les routes maritimes avaient constitué l’ossature de l’Empire britannique au XVIIIe et au XIXe siècles. Les routes et les réseaux numériques sont devenus un facteur de puissance pour les nations du XXIe siècle et les États-Unis sont la puissance dominante actuelle.

La diplomatie numérique de Washington par Charles Bwele

Main dans la main, la Silicon Valley et le département d’État forgent un smart powerqui exploite la téléphonie mobile, l’Internet et les médias sociaux. Ainsi, les États-Unis se donnent les moyens de peser peu ou prou sur le cours des événements et causent d’énormes soucis à maintes tyrannies de par le monde.

La cyberguerre aura-t-elle lieu ? par Jean Pujol

Le terme de « cyberguerre » s’impose de plus en plus dans le débat stratégique, la littérature spécialisée et les médias. Face à l’accumulation d’exemples de cyberattaques et de messages alarmistes jouant sur la sémantique et sur la vulnérabilité de nos infrastructures, nos dirigeants politiques placent la cybersécurité en haut de la liste de leurs priorités. Alors qu’aucune occurrence de cyberguerre ne s’est apparemment produite, il est important de dépasser les amalgames afin de bâtir sereinement les fondations d’une cyberdéfense nationale.

Droit de la guerre et conflits informatiques : quelle alliance ? par Arnaud Garrigues

La 47e conférence de Sécurité de Munich s’est tenue début février 2011. Elle a vu se réunir de nombreux pays et dont les objectifs étaient constitués d’échanges sur les problématiques de sécurité internationale. Le rapport Working Towards Rules for Governing Cyber Conflict, co-rédigé par des chercheurs américains et russes, a retenu l’attention et provoqué des débats. Il appelle à la mise en cohérence des règles du droit des conflits armés (et notamment les conventions de Genève et de la Haye) avec les problématiques spécifiques de la lutte informatique sur Internet.

Les Sentinelles du cyberespace par Victor Fèvre

L’apparente liberté et impunité dans un cyberespace illimité fait peser sur les particuliers comme sur les États des menaces. Étant donné l’absence de dissuasion envers des malveillants, il est indispensable de se doter d’instruments techniques et humains pour être capable de lutte informatique défensive et offensive. Afin de renforcer notre puissance dans le cyberespace, il serait utile d’étudier la possibilité d’employer des réservistes comme « sentinelles », afin d’installer plus de contrôle dans le cyberespace.

Enigma ou la bataille du chiffre pendant la Seconde Guerre Mondiale par Stéphane Mantoux

Dans l’entre-deux-guerres, l’armée allemande adopte pour son chiffre une machine de codage mise au point pour le domaine civil, l’Enigma. Cette machine va voir son code progressivement cassé dès 1931 par les efforts du Deuxième Bureau français et des Polonais, puis par leurs héritiers cryptologues de Bletchley Park en Angleterre durant la Seconde Guerre mondiale. Le déchiffrage de l’Enigma permet aux Britanniques et aux Américains de remporter, non sans mal, la bataille de l’Atlantique.

La peur du cyber Pearl Harbor par Romain Mielcarek

La culture sécuritaire américaine est restée marquée à jamais par la bataille de Pearl Harbor. Ce jour devenu la preuve que des failles existent dans la défense américaine est encore aujourd’hui un cas d’école. À l’ère du numérique, les populations, souvent mal informées sur les réalités de ce type de menaces, craignent un « Pearl Harbor digital ». Et si un État, un groupe ou un individu parvenait à neutraliser l’ensemble des réseaux informatiques en une seule et unique attaque neutralisant toute capacité de riposte ? Pas si évident dans les faits.

Vers un 11 septembre cyberfinancier ? par Yannick Harrel

Les réseaux informatiques qui supportent les échanges financiers des individus, des entreprises et des États représentent un talon d’Achille du monde occidental. Malgré l’ensemble des mesures qui les protègent, une attaque contre les flux financiers reste envisageable.

La cyberguerre venue du froid par Charles Bwele

Profitant des savoir-faire du cybercrime organisé, bénéficiant d’un vivier de hackers patriotes et usant habilement des médias sociaux, la Russie a développé une forme de « cyberguerre open source » à laquelle professionnels, amateurs et néophytes peuvent participer.

Géorgie 2008 : le vrai visage de la cyberguerre ? par Arnaud Garrigues

Le conflit qui opposa, de manière très violente, la Russie et la Géorgie pendant l’été 2008 a mis en jeu un volet numérique dont l’analyse se révèle intéressante. L’auteur se propose d’établir une vision prospective à partir des éléments connus pour établir une vision probable et crédible d’une « guerre » intégrant globalement le cyberespace.

Les armes électromagnétiques, une menace persistante par Guillaume Grandvent et Stéphane Dossé

L’usage potentiel de l’impulsion électromagnétique dans les conflits nous renvoie à la Guerre froide. Pourtant, les armes électromagnétiques représentent plus des armes d’avenir que du passé. Plus ou moins en cours de développement, elles pourront jouer un rôle important dans les conflits réguliers mais également irréguliers des prochaines années. Nous avons finalement examiné en quoi elles seraient utiles pour dissuader dans le cyberspace.

Les principes stratégiques du milieu cyber par Olivier Kempf et Stéphane Dossé

Des principes stratégiques peuvent être définis dans le cyberespace : la sûreté, la résilience, la surprise, le contournement, la rupture, la coalescence, le chaos, la rhétorique, la déception, la fugacité de l’offensive et l’asymétrie.

mercredi 28 septembre 2011

Intelligence économique collaborative et industrie française de l'armement terrestre

Un rapport parlementaire publié en juillet 2011 notait qu'un meilleur partage vertical et horizontal de l'information était une des clés du succès pour les quelques 4.000 PME françaises de Défense (cf. l'analyse de ce rapport).


Le GICAT a bien reçu le message et propose depuis peu une plateforme collaborative de veille sur les appels d'offres nationaux ou internationaux, les appels à projets et les informations clés dans le domaine des véhicules terrestres et du C4ISR.

La suite dans la rubrique "Défense" du Portail de l'IE.

mardi 27 septembre 2011

Il y a 15 ans les Taliban prenaient Kaboul

Le 28 septembre 1996, un premier commando Taliban pénétrait dans Kaboul suivi peu de temps après par des colonnes de chars T-54 et de camions lance-roquettes BM-27 Uragan. Ils arrivaient ainsi à une étape importante de leur chaotique et longue chevauchée depuis Kandahar. Mais peu s'arrêtent, et beaucoup continuent plus au Nord où les combats se poursuivent. Et vont se poursuivre longtemps.
Kaboul était alors une capitale plus symbolique qu'administrative, désertée peu de temps avant par le commandant Ahmad Shah Massoud. Malgré le siège et l'encerclement, il avait réussi à maintenir ouvert un mince corridor de fuite vers son repaire de la vallée du Panshir plus au Nord du pays. A Kaboul, ne restait plus alors qu'un ancien président marionnette et déchu en grand manque de souveraineté, Mohammed Najibullah.

Et c'était lui que ce premier commando Taliban venait chercher. Retranché dans un bâtiment de l'ONU depuis 1992 et une fuite avortée vers l'URSS, Najibullah tentait de survivre au milieu de la guerre civile. Confiant dans la capacité (hypothétique) de négociations de l'ONU pour mettre fin à ses luttes entre factions, il avait refusé auparavant l'offre de Massoud (réitérée au moins deux fois) de le suivre vers le Nord.

Torturé, trainé derrière une voiture et pendu, le corps de l'ancien président rejoindra celui de son frère lui aussi exposé sur un carrefour fréquenté de la ville. Ils seront les premiers d'une macabre et longue série de corps exposés, pour l'exemple, aux yeux de la population...

Le 13 novembre 2001 (nouvelle date anniversaire à venir) marquera une Xième nouvelle "chute" ou "prise" de Kaboul, selon le côté de l'Histoire où vous vous placez. Un nouveau "seigneur" à Kaboul est intronisé. Poste généralement peu enviable et souvent éjectable, que les mauvaises langues (pas toujours à tort) considèrent facilement comme celui d'un maire plus que comme celui d'un président.

Affaire à suivre... Non dans un livre d'Histoire mais bien dans un fil info d'actualité.

PS : peu de personnes parlent de cette anniversaire et les médias semblent avoir oubliés cette date. Pourtant, les raccourcis (à tort) entre la situation de l'époque et celle d'aujourd'hui seraient tellement faciles à faire... Nous sommes évidemment attentifs au communiqué dans ce sens de l’Émirat Islamique d'Afghanistan!

lundi 26 septembre 2011

Colloque : Regards croisés franco-russes sur 30 ans d'intervention en Afghanistan

Ce vendredi, le 30 septembre 2011, se tiendra un colloque dont la teneur s'annonce particulièrement instructive. Il étudiera la vision comparée française et russe des interventions successives en Afghanistan depuis 1979. Il se tiendra de 16h à 20h à l'Institut de la Démocratie et de la Coopération, 63bis rue de Varenne à Paris dans le 7ème arrondissement.

Programme

16H00 – 16H10 : Présentation du colloque par Romain BESSONNET, secrétaire général du Cercle Aristote.

16H10 – 16H30 : Introduction générale par Natalia NAROTCHNITSKAYA, présidente de l'IDC.

16H30 – 17H00 : Meriadec RAFFRAY, historien de formation, officier de réserve, journaliste, secrétaire général de l'Association des Journalistes de Défense.


Cet hélicoptère Mi-17 de l'Afghan Air Force pris en photo ce 24 septembre sur l'aéroport international de Kaboul (KAIA), comme un parfum d'URSS qui flotte encore

17H00 – 17H30 : Omar Mohammad NESSAR, directeur du Centre pour l'Étude de l'Afghanistan Contemporaine de Moscou, rédacteur en chef du site www.afghanistan.ru.

17H30 – 18H00 : Natalia BURLINOVA, candidate en sciences politiques, experte de la fondation de la perspective historique.

18H00 – 18H30 : Vladimir TOZZI, ancien officier de la DRM, spécialiste du renseignement.

18H30 – 19H00 : Georges-Henri BRICET des VALLONS, chercheur en science politique et analyste Défense à l'Institut Choiseul.

19H00 – 19H30 : Alexandre Alekseïevitch KNYAZEV, docteur en sciences historiques, chercheur à l'académie des sciences de Russie, journaliste.

19H30 – 19H50 : questions de la salle.

19H50 – 20H00 : Conclusion générale par Natalia NAROTCHNITSKAYA, présidente de l'IDC.

PS : ne pouvant pas m'y rendre, si jamais un lecteur présent peut transmettre quelques notes d'impressions, je lui en serais extrêmement reconnaissant... Merci d'avance!

mardi 20 septembre 2011

Parce que pour le LBDSN 2012, il va en falloir des idées [DSI HS n°19]

A l'heure où le Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité Nationale de juin 2008 va être révisé, où le monde des industriels et des utilisateurs a fait sa rentrée lors de l'Université de la Défense, où de Arnaud Montebourg à l'UMP chacun y va de son avis sur la Défense de demain, la boîte idées a besoin d'être rempli.

Le dernier Hors-Série de DSI se donne cet objectif en proposant à la fois un état des lieux, des pistes de réflexions et surtout en pointant du doigt les vrais débats. Au final, un numéro intéressant dont plusieurs articles méritent particulièrement d'être lus. Les spécialistes comme les moins aguerris y trouveront leur intérêt.

On passe rapidement sur les entretiens du député Guy Tessier, celle de Laurent Collet-Billon de la DGA (l'institution fête ses 50 ans, cinquante années où elle a été souvent critiquée) et celles des chefs d''état-major des armées.

Ensuite une série d'articles vraiment appréciés par votre serviteur. Le 1er sur la nécessité d'une stratégie de moyens par Benoist Bihan, des industriels aux opérationnels, de la conception à l'emploi, des bureaux d'études aux capacités de production.

L'entretien qui suit avec le gal (2S) Desportes mérite l'attention. Pour une fois pas d'idées maintenant connues sur la guerre de demain pour là se concentrer sur le poids des normes et sur le processus idéal de conception des système d'armes EVOLUTIFS (et en petite série).

Ensuite, Philippe Langloit liste quelques caractéristiques et questions pour les capacités de demain : l'avenir des carburants, la pénétration dans les espaces virtuels, l'action sur le cognitif, etc.

Olivier Hubac de la CEIS et Stéphane Dossé interrogent les possibles doctrines de cyberdissuasion grâce à une métaphore filée avec la dissuasion nucléaire. Dans cet espace, plusieurs modèles sont proposés : offensive, préventive et riposte graduée.

Stéphane Ferrard nous dresse un tableau sur la disparition de l'industrie française des armes légères. Il nous reste que nos yeux pour pleurer! Et dire qu'en 1991, FN Herstal avait été racheté par GIAT Industries...

Le lieutenant-colonel Pierre Chareyron revient dans un entretien sur l'étude publiée par l'IFRI "Hoplites numériques. Le combat d'infanterie à l'âge de l'information". Réflexion passionnante qui traite en particulier du poids porté par le fantassin, du futur de FELIN, etc.

Enfin, un dernier article, et pas des moindres, une explication extrêmement pédagogique par le colonel Jean-Luc Lefebvre sur l'espace, son utilisation, son futur, les fondements de la stratégie de ce milieu et les principes applicables : connaissance, investissement, autonomie, etc.

Pour finir, on n'oubliera pas deux derniers articles, l'un sur l'avenir de l'Agence Européenne de Défense par Alain De Neve et un autre sur l'anticipation et la pensée stratégique française par Joseph Henrotin et le capitaine Grégory Boutherin. A lire sans avoir peur...

vendredi 16 septembre 2011

[HUMOUR] Comment devenir un expert de l'Afghanistan?

Voici une traduction libre (et personnelle) d'un texte en Anglais caricaturant "les experts" auto-proclamés (ou non) d'un domaine. Dans ce cas précis, il s'agit de l'Afghanistan, mais d'autres domaines d'expertise pourraient recevoir le même traitement humoristique.
Bien que ce texte décrive surtout le monde des experts américains, de nombreux défauts énoncés sont aussi visibles de ce côté de l'Atlantique. Cela peut donc piquer l'ego, à commencer par celui du tenancier de ses lieux, mais cela sonne juste.

1. Citez votre dernier voyage dans la région où vous avez vu - de vos propres yeux, et non à travers le prisme déformant des médias - des progrès incontestables. Ajoutez un point si vous avez eu la confirmation de vos observations grâce aux conversations que vous avez eu avec des Afghans rencontrés au tabac. [...]

2. Annoncez que si seulement la majorité des gens était aussi chanceuse que vous, et qu'elle pouvait avoir accès à du renseignement de première main, elle reconnaîtrait aussitôt la véracité de nos progrès sur place. Ajoutez un point si vous avez eu l’intuition de ceci vous-même et que vous ne l’avez pas trouvé sur Wikileaks.

3. Visitez un bazar. Discutez avec de sympathiques commerçants. Distribuez un paquet de salaams et de salutations avec la main droite sur le cœur. [...] Remarquez – avec insistance - que ce bazar était fermé jusqu'à ce que les forces de l'ISAF arrivent. Ajouter un point si vous pouvez arriver à ce bazar par la route et non en hélicoptère. Ajoutez un double point si vous réussissez à y porter un casque lourd ou un gilet pare-éclats sans ressembler à un touriste obèse en visite sur un théâtre d'opérations.

4. Soyez proche d’un think-tank « centriste ». Si vous vous écartez trop de cette ligne politique d'un côté ou de l'autre, vous ne serez plus alors en mesure d'être reconnu pour fournir des analyses « objectives », et vos revenus en souffriraient aussitôt (voir point n°5).

5. Minimiser le fait que vous avez été payé 1.000€ par jour pour conseiller les militaires et nier que possible conflits d’intérêts existent à ce que, une fois revenu en France, vous écriviez des propos flatteurs (cf. restez objectif : point n°4) à propos de nos progrès réalisés en Afghanistan.


Source : Matt Borrs.

6. Gardez toujours la possibilité d'être modéré et de parler d’un verre à moitié plein à propos de la situation lorsque vous êtes contacté par un journaliste. Ajoutez un point si vous pouvez publier votre éditorial dans Le Monde et Le Figaro. Ajoutez un double point si cet édito est par la suite critiqué sur un blog, ce qui vous permettra d'ailleurs de ne pas être accusé « d’agent du Pentagone » ou de « vilain petit canard d'un quelconque think-tank ».

7. Quoique vous fassiez, évitez de passer trop de temps en Afghanistan. En plus d'acquérir des compétences linguistiques et dans une certaine mesure une plus fine compréhension du contexte culturel, vous risquez de devenir cynique et peut-être même désespérant à propos de nos chances de l’emporter.

8. Adoptez une approche kamikaze à la mode Star Wars : « These aren’t the droids you’re looking for ». Malgré les preuves accablantes qui prouvent le contraire et malgré les protestations des autres spécialistes qui ont passé des années sur place (cf. les cyniques : point n°7), soutenez que par la seule force de la volonté et qu’avec l’aide d’un ou deux trucs de Jedi, nous vaincrons. Ajoutez un point si vous pouvez contredire les autres experts qui refusent de s'accrocher à ces minces preuves pouvant être vues comme des signes de progrès. Ajoutez un double point si vous êtes le premier à tweeter quelque chose sur le sujet.

9. Si vous êtes acculé sur la question de la détérioration de la situation sur place, sortez une expression toute faite comme « après la pluie, le beau temps » et reliez cela à une explication bancale selon laquelle la hausse de la violence est un signe d’exaspération des insurgés et donc un signe du succès de la contre-insurrection. Ajoutez un point si vous pouvez rester impassible tout en citant l’amélioration globale des « kill ratios ». Retirez un point si votre analyse est comparée à une discussion de comptoir à la sauce ISAF.

10. Ecrivez de nombreux rapports avec pour titre des expressions comme « The Way Forward» ou « Comment gagner en Afghanistan ». Personne, pas même l’un de vos collègues de think-tank, les lira, mais ils seront cités comme des lectures complémentaires utiles pour offrir une vision précise de l’Afghanistan. [...]

11. Le nec plus ultra de l'expert : être l’auteur d'un pamphlet contredisant "la sainte trinité" de la contre-insurrection (Petraeus, Nagl et Kilcullen). D’ailleurs, si vous dénoncez l'échec apparent de la COIN en Afghanistan, citez quelques insurrections méconnues – l’opération « Urgence en Malaisie » est un bon choix - et relevez le nombre d'années nécessaire que cela a pris pour parvenir à quelque chose.

12. Dans le cas où vous écrivez un livre et que vous avez besoin d’une illustration de couverture, prenez une de vos photos avec une barbe de plusieurs jours, tout portant un pakool (coiffe locale) et un dastmaal. Retirez un point si vous vous obstinez à conserver cette tenue une fois revenu à Paris.


Et maintenant qui se lance pour un texte similaire à propos de la Libye ou de l'Afrique ?

dimanche 11 septembre 2011

Conseils aux bouledogues présents sur les médias sociaux (+MAJ)

Les Marines ont publié en juin 2011 un manuel, The Marine Corps Social Media Handbook, consacré aux principes régissant l'usage des médias sociaux vus par l'USMC (United States Marine Corps).

L'US Army avait fait de même en janvier avec The U.S. Army Social Media Handbook. Celui des Marines reprend d'ailleurs des passages entiers de ce premier document, tout en ajoutant certaines particularités propres au Corps.

Participer avant tout à la Marine Corps' story

Dès les premières lignes de ce manuel, les Marines sont encouragés (par leur hiérarchie) à s'investir dans les médias sociaux. Oui, vous avez bien lu, ils sont encouragés à le faire! Ce n'est que dans un deuxième temps que ces outils seront vus comme des sources de menaces (sur le plan de la sécurité informatique ou comme canaux de communication de voix discordantes).

La mise en page extrêmement soignée du document et les consignes données le montrent, cet engagement sur les médias sociaux s'inscrit avant tout dans une stratégie d'influence de l'USMC vers l'extérieur pour promouvoir ce qu'il représente et ce qu'il fait. A la différence de ce qui est présenté dans le manuel de l'U.S. Army, oui, il faut communiquer, mais aussi il faut convaincre.


Une importante présence corporate 2.0 (sans compter les comptes des unités)

Ce n'est que dans un deuxième temps que les autres usages définis comme utiles (d'autres sont seulement définis comme possibles) sont indiqués.
  • Les médias sociaux peuvent servir dans la gestion de crises pour communiquer, classique, mais aussi coordonner les moyens de réponse et s'informer sur la situation.
  • L'autre usage est celui d'assurer les relations entre les familles et les Marines tout en se refusant à certaine extrémité comme annoncer les tués et les blessés via ce canal.
Les valeurs du Corps dans la vie réelle comme en ligne

"We are Marines! Be smart! Set the example in life and online". Telle est le slogan d'une vidéo réalisée par l'USMC pour prolonger et illustrer les consignes données dans son manuel. Les Marines sont appelés à ne pas mettre en ligne des photos où ils seraient dans des situations allant à l'encontre des valeurs morales défendues par l'USMC.

Ces idées transmises par ce fragment de société humaine qu'est le Corps des Marines et qui guident le jugement entre le bien et le mal doivent en effet permettre de discerner entre les bonnes et les mauvaises pratiques de ces membres sur les réseaux sociaux. Il en va de la crédibilité de l'institution que chaque Marines représente vis à vis de l'extérieur.

Il en est de même pour les usages régissant les rapports entre chefs et subordonnés. Un sergent peut-il être le friend de son capitaine? Doit-il le follower? Doit-il commencer et terminer chacun de ses messages par "Sir"? Le manuel donne quelques conseils pour que l'édifice des relations humaines ordonnées ne s'écroule pas et ne disparaisse pas sur Twitter, Facebook, etc.

Enfin, le manuel rappelle que les médias sociaux ne doivent pas être un outil d'auto-promotion. Ce n'est pas parce que vous avez 1.000 followers que vous passerez au grade supérieur...

"Si vous ressortez de chez moi les loulouttes, vous deviendrez une arme! [...]
Tas de punaises, est-ce que c'est clair ?"
Moins de 140 caractères? Oui! Cela se twitte!

Bonnes pratiques : du community management à la cybersécurité

Assez abordable par le quidam, ce manuel donne une liste de bonnes pratiques, généralement reprises in extenso du manuel de l'U.S. Army. Si les consignes de sécurité prennent une place importante, celles concernant l'élaboration et l'animation d'une présence sur les médias sociaux sont autant de b.a.-ba à ne pas ignorer.

Al Qaeda (sic) et autres "bad guys" (re-sic) sont à l'affut de toutes informations sensibles mises en ligne. Ainsi, Marines n'oublie pas de désactiver des applications de géolocalisation comme Foursquare et plutôt que de dire "I am operating in the village of Hajano Kali in Arghandab district in southern Afghanistan", tu diras "I am operating in southern Afghanistan".

Etre une source de confiance n'est rien si vous n'êtes pas une source suivi. Et inversement. Ainsi, des conseils sont donnés pour accroître le public touché, particulièrement en utilisant la plus value sociale de ces outils. C'est à dire la capacité à engager la conversation avec d'autres utilisateurs pour faciliter une forme d'empathie digitale.

Semper Fi mais surtout En pointe toujours! (devise du 1er bataillon de choc)

Finalement, le Corps des Marines dévoile à travers ce document une compréhension extrêmement poussée des médias sociaux. Il en saisit un grand nombre de potentialités et en promeut l'emploi de manière raisonnée et beaucoup plus insistante que nombre d'autres services.

Des idées innovantes (en effet, tout est relatif quand on voit l'état de compréhension de ces outils par certains) pourraient être repris. A commencer par l'armée de l'Air française qui vient de rejoindre Twitter avec @Armee_de_lair et qui se révèle déjà plus "2.0" que d'autres. Bienvenue à eux!

MAJ1 : deux critères de comparaison, celui du nombre d'inscrits sur Twitter et celui du nombre de "like" sur Facebook (à 21h30) pour les cinq branches des forces armées américaines :

U.S. Marines Corps : 56.383 followers (2nd) et 1.548.783 like (1er)
U.S. Air Force : 27.091 followers et 537.931 like
U.S. Army : 93.162 followers (1er) et 927.751 like (2nd)
U.S. Navy : 28.990 followers et 368.914 like
U.S. Coast Guard : 22.931 followers et 77.093 like

+ le Département de la Défense : 49.432 followers et 11.939 like

Cet exercice reste tout à fait relatif car quid de la date d'arrivée de chacun? Quid de l'activité des comptes? Etc. Ils permettent seulement de donner un ordre d'idée à affiner.

dimanche 4 septembre 2011

Article - Médias sociaux et guerre d’Afghanistan

Le mensuel DSI de septembre (cf. sommaire) arrive en kiosque cette semaine. J'y publie un article sur l'emploi actuel et possible des médias sociaux dans la guerre d'Afghanistan. Alors que bien des événements se sont passés depuis son écriture en juin, les grands traits et les conclusions ne (me) semblent pas être trop datés. Heureusement.
S’il est nécessaire de modérer certaines analyses enthousiastes, il semble par contre indispensable pour les acteurs stratégiques, civils ou militaires, de comprendre les opportunités et les menaces que représentent ces médias sociaux.
Que les acteurs y soient présents ou non, il n’est plus possible de les ignorer sans risquer de subir certaines conséquences. De plus, il serait dommage de ne pas se servir de leurs potentialités. Ainsi, et en s’appuyant sur les événements récents de la guerre d’Afghanistan, quelle est l’utilisation possible de ces outils pour une communication réellement 2.0 en soutien à la stratégie poursuivie ?
Aujourd'hui sous les projecteurs (sans doute trop d'ailleurs), ce sujet dont le visage évolue en permanence mérite que l'on s'y attarde. Comme toujours, je suis ouvert aux critiques (et en attente d'avis) permettant de corriger et d'améliorer ma vision, souvent bien parcellaire et très personnelle, de ces sujets. Donc, surtout ne vous privez pas pour les commentaires!

PS: en complément, le lecteur pourra se reporter à un article paru sur le Small Wars Journal : New Media: A Boon for Insurgents or Counterinsurgents? Bien qu'essentialisant sans doute trop la place de ces outils, cet article a pour grand mérite de dresser un vaste panorama de problématiques (menaces et opportunités) inhérentes à leur utilisation.

vendredi 2 septembre 2011

Marché de l'armement et distorsion de concurrence

Secteur singulier s'il en est car touchant directement aux attributions régaliennes des États, le marché de l'armement n'est pas à l'abri de mesures de distorsion de concurrence dans les affaires économiques.

Ces procédés sont parfois camouflés sous des prétextes géopolitiques ou diplomatiques, alors bien utiles pour ceux qui font appel à eux, mais qui ne résistent pas longtemps à l'étude approfondie de leur véritable raison d'être.

Soulevant cette problématique parfois négligée par les commentateurs, Bertrand Slaski, analyste des questions de Défense, nous autorise à reprendre sa tribune publiée le 19 juillet 2011 sur par Les Échos. Nous le remercions.

Il est intéressant d'observer que pendant que la presse anglo-saxonne revient largement – un peu trop peut être ? – sur les critiques de certains partis politiques allemands s’opposant à une vente de chars Leopard 2 à l’Arabie saoudite, la notification de la DSCA (Defense Security Cooperation Agency) auprès du Congrès concernant la vente éventuelle de quelques 125 chars M1A1 Abrams à Égypte passe quant à elle quasiment inaperçue…

Pourtant, la situation dans ce pays majeur de l’Afrique du Nord, qui vient de connaitre une révolution dont on attend d’ailleurs toujours la fin, n’a rien à envier à celle de l’Arabie saoudite, bien au contraire.

Le Royaume saoudien s’est en effet distingué jusqu’ici par sa capacité à préserver son équilibre intérieur. Il s’engage également activement dans la région pour maintenir, tant que faire se peut, sa stabilité, la situation au Bahreïn et surtout au Yémen étant clairement préoccupante, sans parler de celle de l’Irak « pacifié » depuis le départ des troupes américaines.

En Égypte, malgré la présence de l’armée, amenant à croire en une certaine forme de continuité dans la conduite de la politique du pays depuis le départ du raïs, force est de constater que la situation reste encore très confuse et à l’issue politique incertaine.
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mercredi 31 août 2011

Dis moi ce que tu lis, je te dirais qui tu es : les lectures conseillées du général Dempsey

Le chef d'Etat-major de l'US Army, le général Martin Dempsey, a publié récemment la liste d'ouvrages professionnels à destination des membres civils et militaires de l'US Army. Sans doute moins scrutée que le montant de l'ardoise a absorber par le ministère de la Défense dans le cadre des annulations de crédits, cette liste mérite que l'on s'y attarde.

Pour faire un bon militaire américain, il faut lire d'un peu de tout

Elle est organisée en trois parties : "Histoire et héritage" (12 ouvrages), "Leadership" (7 ouvrages) et "Analyse critique et contexte global" (7 ouvrages). Des ouvrages faisant appel à l'histoire, la sociologie des organisations et de l'innovation, le management sont conseillées. Une belle vision diversifiée pour multiplier les apports intellectuels.

La rumination de l'Histoire est en bonne place. Des Thermopyles à l'Irak en passant par les guerres indiennes, la guerre de Sécession, la guerre contre les Boers, la Seconde guerre mondiale, la guerre de Corée et du Vietnam ou la guerre d'Afghanistan, l'étude de nombreux cas historiques est prescrit.

Parmi les auteurs classiques, Sun Tsu et Clausewitz (en 1ère position dans la partie "analyse critique et contexte global") y figurent. Par contre pas de Jomini que l'on dit pourtant plus lu aux Etats-Unis qu'en Europe. Peut-être est-il si lu automatiquement, qu'il n'est pas nécessaire de le mentionner?
Deux ouvrages de Thomas Friedman, auteur, chroniqueur et journaliste à succès, sont conseillés pour une vision de la mondialisation très en vogue actuellement à Washington : un juste niveau de libre-échangisme, un peu mais pas trop d'organisations internationales, une nécessaire, modernisation du monde arabe, etc.

Les principaux thèmes qui semblent être abordées sont : les valeurs militaires, la notion de héros, les opérations de guérilla et de contre guérilla, l'importance de la culture et le poids de l'héritage, le processus de construction d'une Nation, la place de l'Asie et de l'Océan indien dans le monde de demain (un vrai basculement pour les Etats-Unis), etc.

Dis mois ce que tu ne lis plus ou ne lis pas, je te dirais ce que tu es devenu ou ce que tu ne deviendra pas...

La dernière liste remontait à 2002. On y trouvait alors, entre autres, du John Keegan, plus de lectures sur la Seconde Guerre mondiale (guerre totale très conventionnelle), du Bruce Berkowitz (la guerre infocentrée, en réseaux, etc.), du Martin Van Creveld sur la logistique, et Samuel Huntington sur les relations civilo-militaires et sur le choc des civilisations.

Ainsi, et sans essentialiser, l'armée de Terre américaine semble bien avoir évolué en 9 années d'opérations et de réflexions. Ces lectures conseillées en sont un des indices. Toujours, et comme le remarquait JGP, aucun auteur français. En auriez-vous, chers lecteurs, à proposer? Un top 3 des lectures indispensables?

Pour info, les lectures obligatoires pour le concours de l'Ecole de Guerre était il y a peu Trois siècle d'obéissance militaire, 1650-1958 par le Maréchal Juin, La guerre et la paix : approches contemporaines de la sécurité et de la stratégie par Charles-Philippe David (illisible) et La chair et l'acier, l'invention de la guerre moderne : 1914-1918 par le colonel Michel Goya.

vendredi 26 août 2011

Des nouveaux : Le Signaleur et Ishrâq Blog

Si l'on en croit les dernières tendances, la période estivale serait donc très propice à l'émergence de nouveaux blogs (cf. un premier billet cet été). Les vacances permettent d'avoir du temps à consacrer à cette activité extrêmement chronophage. D'où quelques nouveaux blogs à signaler (en appui à la longue liste compilée par EGEA dans un récent billet).

Si il n'en fallait retenir qu'un, cela serait Ishrâq Blog. Peu de régions du globle n'autorisent aussi peu l'à peu près que Le Moyen-Orient. D'où la lecture utile de ce blog tenu par Pierre FERMIGIER, étudiant à l'IEP de Lyon et actuellement pour une année à Beyrouth. Le rôle trouble de l'Arabie Saoudite en Syrie, le rapport entre démographie iranienne et relations population/gouvernement ou encore la teneur de la nouvelle diplomatie turque s'éclaireront.

Non relevée par EGEA, le blog Le Signaleur mérite aussi toute votre attention et votre soutien. Avec des thématiques plus militaires, c'est un carnet coup de coeur/coup de gueule sur différentes problématiques et actualités. On notera déjà l'étude historique d'un général français (Montcalm) surpris donc vaincu (en plus d'avoir eu tort) au Québec ou la présentation (récompensée par le principal intéressé) du baroudeur-journaliste Michael Yon.

Bonne route à eux!