Ni Rafale, ni Mirage 2000 pour cet escadron de chasse d’un nouveau genre. Bien ancrée au sol, cette unité d'un nouveau genre imaginée et armée par les Marsouins du 1er régiment d’Infanterie de marine (1er RIMa) entend exploiter tout le potentiel offert par les drones, avec une expérimentation en cours d’ores et déjà prometteuse. Présentation conjointe avec Forces Opérations Blog.
Ruches, reines et ouvrières
L’un après l’autre, une dizaine de drones s’envolent de boites installées à l’arrière de pick-up. Trois minutes plus tard, cette meute aura neutralisé la quasi-totalité d’une section blindée de reconnaissance adverse. Inédite, la séquence ne se joue pas en Ukraine mais bien dans le nord-est de la France et devant un parterre d’industriels et de gradés emmenés par le chef d’état-major de l’armée de Terre (CEMAT), le général Pierre Schill. Au centre d'entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) de Sissonne plus précisément, camp retenu par l’armée de Terre pour accueillir la première édition du forum de l'innovation Techterre.
« L’observation des conflits nous a rapidement mené à la conclusion que nous devions disposer de drones armés en grande quantité intégrés dans une unité de mêlée apte à suivre la manœuvre au contact », indique un des initiateurs de l’expérimentation. En découle cet escadron de drones de chasse (EDC), unité expérimentale ad-hoc conçue par le 1er RIMa à partir d’un ancien escadron blindé autrefois sur AMX 10RC. L’atout de cet EDC ? Sa capacité à « concentrer les effets des drones pour emporter la décision ». Capable de manoeuvrer auprès des unités de contact, « il se révèle particulièrement performant pour redonner de la mobilité au GTIA quand la manoeuvre se fige, pour brécher un dispositif de défense, provoquer un effet de sidération et désorganiser la chaine de commandement ennemi ».
Cet EDC se construit autour de cinq pelotons. En plus du peloton de commandement et de logistique assurant la transmission des ordres, la cohérence tactique de l’action et le soutien logistique, il agrège un peloton d’acquisition et de surveillance qui, dans la frange des 0 à 20 km, renseigne et discrimine l’ami de l’ennemi et désigne des objectifs, ainsi qu’un peloton de munititions téléopérées (MTo) capable de détruire des objectifs à haute valeur ajoutée jusqu’à 30 km. S’y ajoutent deux pelotons de drones de contact capables de neutraliser des unités légères ou des blindés ennemis en autonomie dans un rayon de 10 km. Parrot Anafi USA, Ebee Vision, Black Hornet 3 et autres drones de contact « maison » : l’EDC mobilise l’essentiel du parc dont dispose les unités de mêlée de l’armée de Terre. Loin d’être figée, la structure de l’escadron est appelée à être définie selon la mission.
L’un après l’autre, une dizaine de drones s’envolent de boites installées à l’arrière de pick-up. Trois minutes plus tard, cette meute aura neutralisé la quasi-totalité d’une section blindée de reconnaissance adverse. Inédite, la séquence ne se joue pas en Ukraine mais bien dans le nord-est de la France et devant un parterre d’industriels et de gradés emmenés par le chef d’état-major de l’armée de Terre (CEMAT), le général Pierre Schill. Au centre d'entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) de Sissonne plus précisément, camp retenu par l’armée de Terre pour accueillir la première édition du forum de l'innovation Techterre.
« L’observation des conflits nous a rapidement mené à la conclusion que nous devions disposer de drones armés en grande quantité intégrés dans une unité de mêlée apte à suivre la manœuvre au contact », indique un des initiateurs de l’expérimentation. En découle cet escadron de drones de chasse (EDC), unité expérimentale ad-hoc conçue par le 1er RIMa à partir d’un ancien escadron blindé autrefois sur AMX 10RC. L’atout de cet EDC ? Sa capacité à « concentrer les effets des drones pour emporter la décision ». Capable de manoeuvrer auprès des unités de contact, « il se révèle particulièrement performant pour redonner de la mobilité au GTIA quand la manoeuvre se fige, pour brécher un dispositif de défense, provoquer un effet de sidération et désorganiser la chaine de commandement ennemi ».
Cet EDC se construit autour de cinq pelotons. En plus du peloton de commandement et de logistique assurant la transmission des ordres, la cohérence tactique de l’action et le soutien logistique, il agrège un peloton d’acquisition et de surveillance qui, dans la frange des 0 à 20 km, renseigne et discrimine l’ami de l’ennemi et désigne des objectifs, ainsi qu’un peloton de munititions téléopérées (MTo) capable de détruire des objectifs à haute valeur ajoutée jusqu’à 30 km. S’y ajoutent deux pelotons de drones de contact capables de neutraliser des unités légères ou des blindés ennemis en autonomie dans un rayon de 10 km. Parrot Anafi USA, Ebee Vision, Black Hornet 3 et autres drones de contact « maison » : l’EDC mobilise l’essentiel du parc dont dispose les unités de mêlée de l’armée de Terre. Loin d’être figée, la structure de l’escadron est appelée à être définie selon la mission.
Chaque peloton de drones de contact rassemble trois patrouilles, deux de drones et un de commandement. Et chaque patrouille de drones repose sur deux véhicules emmenant chacun un chef de bord, un pilote et un télépilote chargé d’affecter des missions soit à chaque drone, soit à l’ensemble de l’essaim au sein de la « kill box » désignée par le peloton d’acquisition et de surveillance. Ces télépilotes « de frappe » opèrent des essaims décollant d’un véhicule baptisé « ruche ». Chaque ruche emporte deux types drones. Non armée, la « reine » aura pour rôle de détecter et de désigner. Autonomes ou subordonnées aux reines, les "ouvrières" se chargeront de détruire les objectifs par frappe directe ou par largage. Celles-ci peuvent être récupérées et réutilisées en cas de non déclenchement.
La bascule de l’escadron blindé vers l’EDC est toujours en cours, mais la ressource humaine s’avère déjà suffisante pour parvenir à une unité « bonne de chasse ». Formés en régiment et auprès des industriels, les « marsouins télépilotes » sont aussi davantage responsabilisés qu’auparavant, explique le capitaine Bastien. « Un caporal sera en mesure de conduire une mission de frappe en autonomie », détaille-t-il. Plus léger, plus rapide, l’EDC amène aussi d’emblée une allonge de 50 km, inatteignable aujourd’hui par un sous-GTIA blindé depuis sa ligne de départ.
L’EDC amène par ailleurs une capacité de saturation. Si les expérimentations conduisent pour l’instant à constituer des essaims d’une dizaine de drones en moyenne, la limite supérieure envisagée est au-delà. Les Marsouins ont de la marge, chaque ruche pouvant emporter à terme jusqu’à quatre ou cinq rayons pour monter jusqu’à 100 drones. Ou l’équivalent de 600 drones disponibles à l’échelle de l’escadron, toutes applications confondues.
Une équipe d'industriels partenaires engagés pour aider à défricher le concept
L'équipe d'innovateurs du régiment s'est appuyée sur plusieurs partenaires industriels. Comme les Marsouins l'indiquent, « la réflexion autour de l'EDC est centrée sur la capacité, plus que les équipements en tant que tels, avec des choix qui ont été fait aujourd'hui de partenaires industriels qui nous accompagnent, tout en se gardant la liberté de choisir d'autres partenaires dans les prochains mois, si nécessaire ».
La bascule de l’escadron blindé vers l’EDC est toujours en cours, mais la ressource humaine s’avère déjà suffisante pour parvenir à une unité « bonne de chasse ». Formés en régiment et auprès des industriels, les « marsouins télépilotes » sont aussi davantage responsabilisés qu’auparavant, explique le capitaine Bastien. « Un caporal sera en mesure de conduire une mission de frappe en autonomie », détaille-t-il. Plus léger, plus rapide, l’EDC amène aussi d’emblée une allonge de 50 km, inatteignable aujourd’hui par un sous-GTIA blindé depuis sa ligne de départ.
L’EDC amène par ailleurs une capacité de saturation. Si les expérimentations conduisent pour l’instant à constituer des essaims d’une dizaine de drones en moyenne, la limite supérieure envisagée est au-delà. Les Marsouins ont de la marge, chaque ruche pouvant emporter à terme jusqu’à quatre ou cinq rayons pour monter jusqu’à 100 drones. Ou l’équivalent de 600 drones disponibles à l’échelle de l’escadron, toutes applications confondues.
Une équipe d'industriels partenaires engagés pour aider à défricher le concept
L'équipe d'innovateurs du régiment s'est appuyée sur plusieurs partenaires industriels. Comme les Marsouins l'indiquent, « la réflexion autour de l'EDC est centrée sur la capacité, plus que les équipements en tant que tels, avec des choix qui ont été fait aujourd'hui de partenaires industriels qui nous accompagnent, tout en se gardant la liberté de choisir d'autres partenaires dans les prochains mois, si nécessaire ».
Pour les ruches de drones, le 1er RIMa s'est rapproché de Naval Group qui a développé depuis 2023 des "drones swarn boxes". Ces caissons permettent d'accueillir une dizaine de micro-drones, de différents modèles, mis sur des rayons. Intégrées à l'origine sur des drones navals développés par la direction Drones, Systèmes autonomes et Armes sous-marines (DSA) et de la filiale Sirenha du systèmier naval français (ici plutôt d'ailleurs équipementier), ces boites permettent de réduire l'agression du milieu maritime (sel, vent...) ou terrestre (vent, poussière, végétation...) et de garantir un décollage rapide des drones par le haut. Modulaires à l'intérieur, elles permettent d'embarquer différents types de drones en faisant évoluer la taille des rayonnages internes. Dans le cadre des réflexions sur l'aspect amphibie de l'EDC, cela permet également d'apporter quelques garanties.
Tout comme Naval Group pour ses expérimentations, le 1er RIMa décidé d'avancer avec le droniste français Parrot, et ses drones Anafi aujourd'hui déployés dans un certain nombre de régiments, dont le 1er RIMa, et ce déjà avant les premières réflexions sur l’EDC. D'une masse de 500 gr et doté d'une caméra jour/nuit, ce drone dispose d'une autonomie d'une trentaine de minutes, et offre des garanties d'une prise en main rapide pour les opérateurs. Ce sont ces drones qui sont dans les rayons des ruches. Pour la partie surveillance et observation, l'EDC utilise les ailes delta des drones eBee, d'un poids de 1,6 kg et d'une autonomie d'un peu plus d'une heure. Doté d'un zoom x32, il apporte des images d'une qualité suffisante pour y appliquer des algorithmes de détection et d'identification.
Ces algorithmes dits de DRI (détection, reconnaissance et identification) sont ceux de la prometteuse start-up française Alta Ares. En s'appuyant sur l'expérience acquise directement en Ukraine où les équipes ont passé et passent beaucoup de temps, ces algorithmes légers permettent de déceler et de préciser les véhicules et autres objets remarquables passant dans les senseurs des drones, puis de garantir un guidage terminal optimal. Avec une expertise en traitement des données images et radar, et en s'appuyant sur des données opérationnelles pour le « fine-tuning » des algorithmes (la finalisation de l'apprentissage), ils garantissent un niveau d'identification particulièrement élevé, pour faire remonter, via des paquets réduits de données, au niveau des opérateurs puis des chefs d'unité une situation tactique améliorée. Les algorithmes sont enrichies pour intégrer des matériels différents de ceux présents en Ukraine et améliorés face au brouillard de la guerre pour une identification qu'importe la situation et les contre-mesures prises (camouflage, leurrage...).
Enfin, le dernier partenaire industriel est Icarus Swarms, spécialiste français des essaims de drones à grande échelle, c'est-à-dire pouvant potentiellement monter à plusieurs milliers. L'objectif est ici d'avoir un opérateur pouvant superviser (et non piloter) un grand nombre de drones, tout en travaillant par l'intention plus que par une mission qui serait conduite point par point. Il s'agit alors par exemple de déterminer une zone de chasse, avec des drones qui, via les algorithmes d'essaim, s'organisent pour couvrir au mieux la zone, de manière la plus régulière possible, pour faire remonter au plus vite les informations (même si certains drones tombent du fait de mauvais fonctionnement ou de l'action de l'adversaire), tout en se répartissant les cibles désignées par l'opérateur, etc. Travaillant de manière agnostique sur les plateformes, ils se pluggent sur les softwares des drones en limitant autant que possible les échanges de données qui remontent vers les opérateurs.
Une montée en maturité à finaliser
Avant d’être présenté au CEMAT, l’EDC a pu monter en compétence lors d’exercices en France et à l’étranger. L’exercice à double action Hedgehog, conduit au printemps en Estonie, aura ainsi « permis de confirmer la pertinence tactique d’une telle unité ». Le 1er RIMa y aura déployé un échantillon au sein d’un GTIA, soit une patrouille d’acquisition et de surveillance et une patrouille de drones de contact, "l’occasion de tester en contexte
opérationnel, et avec brio, son Escadron de Drones de Chasse, causant à
lui seul 20% des destructions ennemies de l’exercice", indique le régiment.
Derrière ces premières expériences, d’autres jalons à venir ont été identifiés avec le Commandement du combat futur (CCF), argentier via un budget dédié et pilote du projet interne remonté via l'utilisation de la plateforme de référencement des idées (hAPPI). Les réflexions ne manquent pas concernant l’autonomie, l’énergie ou encore la logistique.
À commencer par un porteur à requestionner, pointe le lieutenant-colonel Rémi du bureau opération instruction du 1er RIMa. L’idée repose aujourd’hui sur un Ford Ranger en couleur de gamme civile, utile pour son large plateau à l'arrière pour accueillir des ruches calées de manière encore un peu artisanale et pour ses capacités 4x4. Une approche plus tactique pourrait être privilégiée dans les mois à venir dès lors que les ruches, que ce soient celles actuellement utilisées ou de nouvelles, peuvent être accueillies.
Ensuite sur la logistique, avec des réflexions à mener sur le bon ajustement des lots de pièces de rechanges (hélices, batteries, etc.) et sur la facilité à réparer au plus bas échelon tel ou tel drone. La production d'énergie est aussi un sujet à travailler, à la fois pour le rechargement des batteries des drones et l'alimentation des systèmes utilisés : antennes, tablettes tactiques...
À commencer par un porteur à requestionner, pointe le lieutenant-colonel Rémi du bureau opération instruction du 1er RIMa. L’idée repose aujourd’hui sur un Ford Ranger en couleur de gamme civile, utile pour son large plateau à l'arrière pour accueillir des ruches calées de manière encore un peu artisanale et pour ses capacités 4x4. Une approche plus tactique pourrait être privilégiée dans les mois à venir dès lors que les ruches, que ce soient celles actuellement utilisées ou de nouvelles, peuvent être accueillies.
Ensuite sur la logistique, avec des réflexions à mener sur le bon ajustement des lots de pièces de rechanges (hélices, batteries, etc.) et sur la facilité à réparer au plus bas échelon tel ou tel drone. La production d'énergie est aussi un sujet à travailler, à la fois pour le rechargement des batteries des drones et l'alimentation des systèmes utilisés : antennes, tablettes tactiques...
« Très vite, il va falloir se poser la question de la charge militaire », note le lieutenant-colonel Rémi. De fait, le sujet des munitions largables pour les drones frappeurs est en cours de réflexion pour basculer de la grenade factice à une charge réelle, dimensionner au juste niveau les stocks embarqués par les patrouilles, et pour fiabiliser la chaîne d'approvisionnement pyrotechnique, entre les moyens de l'avant et de l'arrière, le tout en sécurité.
Au-delà des mises à jour régulières des algorithmes d'essaims ou de DRI, la partie des systèmes d'information et de communication est aussi un sujet en perpétuelle évolution, entre la nécessaire résistance au brouillage, la définition des justes capacités en termes d'élongation, la discrétion obligatoire, les capacités de navigation des drones, la remontée au bon niveau des informations, etc. « On aura toujours besoin d’avoir le GPS », explique l’officier du 1er RIMa, tout en annonçant « s’associer avec d’autres industriels pour être les plus durcis possibles ».
Le fruit de ces travaux permettra de parvenir prochainement à la fin de l'expérimentation pour inscrire le modèle de l'escadron de drones de chasse dans la doctrine française, via la publication à l’automne prochain d'un document de doctrine par la Direction des Etudes et de la Prospective (DEP) de l'Ecole de Cavalerie de Saumur, s'intégrant dans les réflexions en cours sur la définition de la Brigade amphibie médiane 2027, pendant spécialisé de la BIA (Brigade Interarmes) Scorpion 2027 plus générique.
« Le 1er RIMa, dans ce domaine, est le porte-étendard de l’innovation », rappelle le lieutenant-colonel Rémi. Pour les Marsouins, il s’agira de pousser le projet le plus loin possible pour en évaluer la pertinence. Jusqu’à l’exercice majeur ORION 2026, aboutissement choisi pour statuer sur l’idée et envisager une éventuelle opérationnalisation. Qu’importe la décision, la démarche aura eu le mérite de « faire avancer la réflexion », relève le lieutenant-colonel Rémi. Quitte, en cas de succès, à l’étendre à d’autres partenaires ? Elle n’aura en tout cas pas manqué d’attirer l’attention de l’officier belge inséré à Saumur, représentant d’une Force Terrestre qui, justement, recrée progressivement deux bataillons de cavalerie en suivant le modèle français.
Crédits : privés / EMA.
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