Les acteurs industriels de l’aéronautique française, par la voix de leur fédération professionnelle, le GIFAS (Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales), souhaitent donc qu’une part plus importante des futurs crédits du ministère des Armées en Recherche et Technologie (R&T), notamment les études amont, permettent de soutenir "une culture de conception par démonstrateurs". Ces crédits étatiques sont utilisés, en plus des financements industriels sur fonds propres, en préparation du lancement, ou non, d’opérations d’armement (OA). Selon ces acteurs, cette culture est à développer notamment pour le futur de l’aviation, surtout celle dite "de combat", aujourd’hui au milieu du gué entre deux générations : entre innovation incrémentale pour l’adaptation de la génération précédente (via notamment une logique d’évolution par standards successifs) et premières études d’orientation sur l'architecture de la génération suivante (avec un système de combat aérien futur (FCAS) composé de l'interaction optimisée de "tout ce qui vole" en termes de plateformes porteuses de capteurs, senseurs et effecteurs, et cela "en nombre").
Démonstrateur Neuron lors d'une (courte) campagne d'essais avec le porte-avions Charles De Gaulle et un appareil omnirôle Rafale (DGA)
Ce vœu rejoint les propos du délégué général à l'armement (DGA) Joël Barre en octobre 2017 lors d’une audition à l'Assemblée Nationale: "Les innovations sont de plus en plus rapides, de plus en plus fréquentes, il faut essayer de les identifier, de les expérimenter, de les capter et de les introduire dans nos systèmes. Cela passe notamment par la multiplication des démonstrateurs - au sol, en vol ou en mer -, véritables prototypes de matériels ou de systèmes, qui coûtent évidemment plus cher que des études sur le papier ou des maquettes en laboratoire. Notre enveloppe actuelle d’un montant moyen de 730 millions d’euros annuels est insuffisante pour réaliser ces démonstrateurs". De même, la Revue stratégique de défense et de sécurité nationale publiée fin 2017 indiquait : "Des démonstrateurs d’envergure permettront de mieux préparer la prochaine génération de systèmes et d’équipements, aptes à conférer la supériorité opérationnelle et à assurer de futurs succès à l’export, dans un contexte de compétition exacerbée". Tous s’accordent donc sur la nécessité financière, un des pans de la problématique.
Passer la vallée de la mort plus rapidement, notamment que les adversaires
Il s’agit donc de réaliser des plateformes, mais également l’environnement autour (senseurs, effecteurs (dont l’armement), réseaux, etc.), pour lever certains risques (financiers, techniques, industriels, opérationnels, etc.) et valider les technologies en conditions aussi réelles que possibles (les apports comme les défaillances). Par définition, le prototype fonctionnel (différent notamment du prototype numérique, sorte de "jumeau numérique" avec un développement via la simulation), plus souvent appelé aujourd'hui démonstrateur technologique, peut ne répondre à aucun besoin opérationnel militaire immédiat. Il permet néanmoins l'application, l'intégration et la validation de technologies déjà existantes ou en cours de développement dans une logique applicative. Tout en pouvant servir, et ce n'est pas le moindre des apports, de rodage pour le travail collaboratif à plusieurs partenaires (dont internationaux, étatiques ou industriels) dans les modalités de développement et de production (maîtrise d’œuvre, sous-traitance, etc.). Et cela, avec des risques moindres, et des conséquences moindres en cas de difficultés ou d’échecs, du fait de sa non-application immédiate. Dès lors, un juste équilibre des crédits entre les différents types d’activité de recherche doit être trouvé, entre court et long termes, technologies émergentes et matures, etc.