lundi 21 octobre 2024

France - L’indispensable remontée en puissance du Génie

Appui au contact, franchissement, contre-minage… Autant de capacités clés pour être prêt "dès ce soir", mais qui, manquant encore singulièrement d’épaisseur dans l’armée de Terre, méritent une nette densification. Alors que l’arme du Génie fait face à 6 ruptures temporaires de capacités - les bien connues "RTC", avec des équipements devenus échantillonnaires dans plusieurs domaines, plusieurs grands axes d’efforts font désormais l’objet d’une attention particulière pour retrouver solidité et crédibilité dans ce volet indispensable du combat terrestre. Ce mouvement s’accompagne d’un durcissement des capacités de chaque régiment du Génie sur tout le spectre de ses savoir-faire, afin de maximiser l’appui apporté en autonome à sa brigade interarmes (BIA), dans la perspective d’un engagement de haute intensité. Ce durcissement est en outre amplifié par le recours systématique à des procédés et capacités innovants, inspirés par l’observation des conflits actuels. L’exemple le plus frappant est naturellement l’usage des drones. Les sapeurs mettent ainsi en œuvre leurs systèmes à chaque opportunité, tant aucune manœuvre ne se conçoit plus sans cet appui crucial.

D’ici 2030, une capacité d’appui au contact, clé de l’aménagement du champ de bataille 

Le maintien en service de l’engin blindé du génie (EBG) - véhicule à chenilles sur base d’AMX-30B2 entré en service en 1988 pour les missions d’appui à la mobilité et de contre-mobilité - est un défi quotidien. Son maintien jusqu’en 2030 va exiger des efforts significatifs, et c’est la raison pour laquelle la livraison dès 2029 des 5 à 6 blindés têtes de série de son successeur, l’Engin du Génie de Combat (EGC), ex-Moyen d'appui au combat (MAC), est indispensable pour ne pas compliquer encore un tuilage déjà critique.


Un travail significatif de simplification des spécifications a été réalisé pour parvenir à un engin qui roule, qui aménage le terrain et qui est protégé, soit un engin moins complexe mais pas moins performant. L’EGC doit être capable de tirer, creuser, pousser et d’évacuer la terre, tout en étant capable d’assurer son autoprotection, avec un tourelleau téléopéré. L’EGC dispose également de réserves de masse et de puissance conséquentes qui permettront d’ajouter de nouveaux outils, évitant ainsi d’avoir à fiabiliser dès le début un complexe "tout-en-un". Les choix faits en termes de vitesse et de mobilité (roues), sans impasse sur la capacité d’emménagement et de protection, feront de l’EGC le moyen apte à garantir le rythme de la manœuvre interarmes d’un GTIA Scorpion. L’étude de diverses solutions à base de militarisation d’engins civils n’a pas donné satisfaction. En particulier, certaines limites de mobilité et de vitesse de travail (comme pour les imposants bulldozers D7 et consorts, qui doivent être déployés directement à proximité des zones de travail) ont conduit à rechercher un compromis différent.

samedi 5 octobre 2024

Lecture - "Aux avant-postes. De l’Afghanistan aux portes de l’Europe. Récits de la cavalerie blindée" (collectif)

Comment expliquer à des enfants ce que leurs pères ou leurs mères ont fait ? Comment faire pour que des proches comprennent mieux ces longues périodes d'absence ? De retour d’une cérémonie militaire marquant les 10 ans d’un mandat hivernal d’une unité blindée de chasseurs-alpins en Afghanistan, où se retrouvent un grand nombre d’anciens et leurs familles éparpillés aux quatre coins de la France, ces questions se bousculent dans la tête du lieutenant-colonel Guillaume Leuenberger. Apparait alors pour lui "un devoir de raconter, pour ceux qui ne le feront pas". Rendre un peu service à ceux qui ont servi, qui ont fait et bien fait ce qui leur avait été demandé. Aider à faire comprendre.
 
 
Si la grande idée de ce qui deviendra "Aux avant-postes" (chez Tallandier) est là, il a fallu convaincre les connaissances et les connaissances de connaissances, persuadées de n’avoir fait rien de plus que ce qu’ils devaient faire, donc de n’avoir pas forcément grand-chose à raconter. Et construire sur deux ans une trame cohérente en puisant dans les souvenirs enfouis dans la mémoire et les notes griffonnées par certains sur des carnets non ré ouverts depuis un moment, pour y chercher les faits et les émotions vécues. Le tout en les couchant par écrit avec des mots simples.

Il s'agit de suivre ceux qui sont allés des vallées afghanes avec leurs maisons fortifiées en terre,s mystérieuses, aux plaines roumaines non loin de l'orage des combats qui gronde aux frontières de l'Europe, en passant par les étendues désertiques sahéliennes, un des nouveaux "Désert des Tartares" connu par plusieurs depuis ces forts isolés au milieu des dunes. Ré-emprunter les grandes avenues abidjanaises tourmentées par les agitations politiques, suivre les pistes jusqu’aux villages reculés centrafricains, les chemins caillouteux qui traversent les villages électriques du Sud-Liban ou encore s’enfoncer dans les profondes forêts lituaniennes enneigées. Tous ces déploiements, très différents, montrant par eux-mêmes l’évolution et la diversité des conflits, qui ont constitué les dix dernières années de la cavalerie blindée française, faites de patrouilles, d’escortes, de gardes nocturnes, de combats... En plongeant au niveau des programmations qui changent du jour au lendemain, des départs au coup de sifflet, des successions imprévisibles de moments intenses et d’autres totalement banaux, des odeurs de moteurs et de poudre, des bruits métalliques des montures motorisées, des radios qui grésillent et des ordres lancés pour indiquer le grand départ et ceux qui claquent lors de l’embuscade ou que l’ennemi se dévoile.