mardi 5 novembre 2024

Euronaval 2024 - A321 version MPA - Le futur de la patrouille maritime pour la Marine Nationale et à l'export ?


A l’occasion du salon Euronaval 2024, Airbus Defense & Space a présenté sa solution A321 en version Maritime Patrol Aircraft (MPA) / Patrouille Maritime (PATMAR). Une première maquette avec des marquages Marine nationale a été présentée, alors que la décision portant sur le futur des actuels appareils ATL-2 de la Marine nationale est imminente (potentiellement une question de jours).

La solution, en cours de finalisation de définition, d'A321 MPA est marquée par quelques grandes caractéristiques, concourant à "l'autonomie d'engagement" recherchée pour une telle capacité.


Une plateforme bien connue de son constructeur, avec un rythme de 75 A320 et dérivés produits par mois par l'avionneur civil, plus modulaire que l'A319 (version allongée) prévu initialement, et déjà mature et exploitée par plusieurs compagnies aériennes. Les futurs utilisateurs peuvent donc s'appuyer sur le réseau mondial de points de service des compagnies aériennes de part le monde déjà utilisatrices (plus de 100 ateliers), avec des cycles de maintenance connus (donc en grande partie anticipables, en délais et en coûts), pour l'appareil comme pour la motorisation (qui, bien que non choisie encore, devrait être fournie par le motoriste français Safran).

Une large soute ajoutée en dessous des ailes à la queue arrière, permettant d'embarquer un large spectre d'armement : torpilles, bombes guidées de type GBU (Guided Bomb Unit)et même futur successeur du missile de croisière naval MDCN / SCALP naval de MBDA (le FMAN/FMC pour futur missile anti-navire / futur missile de croisière, développé en franco-britannique). une soute vaste (aux caractéristiques non préçisées) qui ne nécessite pas d'ouvrir des points d'emport sous les ailes, une solution dégradant les profils de vol, et ouvrant des problématiques complexes d'intégration et de qualification.

Un large fuselage permettant d'intégrer la partie mission avec les consoles (au nombre encore à préciser selon les besoins des clients), les capacités de traitement des données senseurs/capteurs (avec algorithmes d'intelligence artificielle, capacités de calcul élargies...), une zone vie pour l'équipage (kitchenette/couchettes pour les longues missions et les phases de transit), une soute à bagages accessible, avec une porte cargo, sous le plancher pour loger des palettes (de l'ordre de 3 à 5) de fret (bagages, pièces détachées, ravitaillement...) lors de détachements de l'appareil par des plots relativement autonomes (les mécaniciens de l'appareil pouvant embarquer en plus de l'équipage), et le tout, avec de la réserve de place pour de la modularité/évolution incrémentale.


Une suite de missions (sans doute en grande partie Thales et Safran, cela restant à préçiser) pour détecter, identifier, suivre, et éventuellement détruire les pistes (sur, sous et à la surface de l'eau), intégrable sur le fuselage, en s'appuyant sur l'expertise d'intégration d'Airbus Defense & Space d'appareils militaires notamment de la famille Casa (plus de 50 versions produites) et de modification d'appareils civils comme les ravitailleurs MRTT. LA suite (encore à préçiser avec les clients) devrait comprendre une boule optronique à l'avant, des systèmes de communication (VHF, UHF, SATCOM...), des radars à panneaux fixes (devant et sur les côtés à l'arrière), un détecteur d'anomalies magnétiques (type MAD) à l'arrière, etc.

Via le contrat d'architecture de 18 mois d'études attribué début 2023 par la Direction Générale de l'armement (DGA) à Airbus Defense & Space (ainsi qu'à Dassault Aviation pour préciser une solution avec une plateforme centrée sur le Falcon 10X), l'avionneur a pu avancer dans la pré définition des spécifications, et proposer différentes solutions (nombre de consoles, positionnement de capteurs/senseurs, mode de maintenance...). Cela a aussi été l’occasion de vérifier (en partie sur fonds propres, en partie avec les fonds des études) les sujets de profils de vol (notamment lent et bas), d'intégration de capteurs (intégration et éventuelles interférences du MAD proche de l'Auxiliary Power Unit (APU), et de sa masse métallique, à l'arrière, par exemple), etc.


Sur le renouvellement de la flotte d'actuels appareils ATL-2 de la Marine nationale, la réponse serait imminente (pour ne pas dire dans les prochains jours) dans le choix entre les deux solutions (la Marine et la DGA semblant avoir déjà donné leurs réponses, au ministère des Armées de se prononcer). Il s'agira ensuite de préparer la notification du contrat d'après : environ 18 mois d'études pour affiner la solution (en lien avec les utilisateurs), avant le lancement en production des appareils post passage de la commande d'une flotte d'appareils, au nombre d'ailleurs encore non précisé. Et cela en parallèle des éventuelles opportunités à l'export d'une plateforme moderne, mature et grandement modulable. A suivre

lundi 4 novembre 2024

Publication - "Couach et la dronisation navale - Oser pour se faire reconnaître comme un acteur crédible" (Deftech)

Deftech, la revue des innovations technologiques pour l'armement et de la sécurité, sort un 11è numéro au au prisme très naval à l’occasion du salon Euronaval 2024. J'y publie un article sur l'intérêt pour un industriel de la démarche exploratoire des démonstrateurs technologiques, ici dans la cadre de la dronisation navale, thématique relativement centrale dans cette édition de l'événement.

Pour répondre aux évolutions des besoins de ses clients, et ainsi garantir la pérennité de sa raison d’être, un chantier naval ne peut ignorer les évolutions technologiques. Encore faut-il choisir avec justesse ses axes d’efforts.

Répondre à l’inéluctable dronisation navale qui vient
Le milieu maritime n’est pas plus épargné que les autres milieux par la multiplication d’engins, sans présence humaine à bord, ayant des degrés variables d’autonomie de pilotage et de supervision, depuis un navire-mère ou depuis la terre (et demain potentiellement depuis les airs). Et cela dans les différents domaines de lutte du combat naval : sous la surface et en surface, voir même très au-dessus de la surface.
Si les utilisateurs finaux (marines de haute mer ou côtière, garde-côtes et autres agences de sécurité) sont aujourd’hui à des stades plus ou moins avancés d’appropriation de ces technologies, avec des expérimentations qui s’accélèrent et des utilisations opérationnelles de plus en répandues et complexes, il est nécessaire pour un acteur industriel d’être en mesure de s’adapter rapidement aux demandes, voire de les anticiper. Il lui faut a minima ne pas être l’élément retardateur de l’adoption de ces nouvelles technologies aux apports intéressants, soit être prêt au moment où la maturité technologique permet d’espérer la maturité capacitaire.
Ainsi, et en allant au-delà de certaines grandes incantations sur le souhaitable, la réalité industrielle de tous acteurs fait que des choix doivent être faits, des priorités décidées, et donc un positionnement stratégique défini par des dirigeants. Cela est notamment le cas dans des périodes de transition, où « l’ancien monde » de certaines pratiques ne se meurt pas encore ou totalement, et où le « nouveau monde » peine à émerger, alors même que sans doute les deux auront tendance à cohabiter longtemps.
De l’intérêt d’un démonstrateur
Concernant la dronisation, le chantier naval Couach, situé à Gujan-Mestras (en Gironde), est depuis plus de deux ans dans ce clair-obscur, en s’appuyant sur ses compétences propres et ses atouts. Il ne s’agit pas pour le chantier de chercher à tout faire dans le domaine, mais il s’agit de déjà bien comprendre et maîtriser avant de pouvoir proposer, en certains points de la chaine de valeur, ce qui est le plus à même d’être un vrai différenciant par rapport à une concurrence qui ne manque pas. En effet, l’écosystème industriel français de la dronisation est aujourd’hui florissant avec des acteurs de taille variable, maîtrisant tout ou partie des technologies nécessaires. Le salon Euronaval ne manquera pas montrer les avancées connues dans le domaine en quelques années.
A poursuivre dans la revue, trouvable en kiosque et sur Euronaval...