Le professeur Maurice Vaisse (IEP Paris), chercheur français en histoire militaire, diplomatique et de la diplomatie, vient de publier un nouveau pavé (au propre comme au figuré). Il poursuit son étude sortie en 1998 sur le politique étrangère du général De Gaulle : La Grandeur. (1958–1969). Ce nouvel ouvrage s’intitule : La Puissance ou l'Influence ? Dans le titre, le poids d’interrogation est utilisé pour bien montrer que la France, en particulier par le biais de ses organes officiels (ministères des Affaires étrangères et Européennes, de la Défense, de la Culture, etc.), oscille entre deux modes d’action quant à son action extérieure.
Derrière la volonté de mettre en œuvre des vecteurs pluriels pour contraindre et/ou convaincre l’Autre, il est facile d’y voir les deux distinctions de hard power ou soft power (made in Joseph Nye). Aujourd’hui, le smart power devrait être la synthèse des deux dans un projet global au service d’une politique globale. Il serait d’ailleurs la marque de fabrique de la nouvelle diplomatie (au moins celle animée par le réseau des ambassades au secrétaire d’Etat) de la nouvelle administration Obama emmené par Hilary Clinton.
Mais la France n’en est pas en reste et met en œuvre aussi cette approche au plus haut niveau comme le montre l’exemple des récentes relations et décisions avec les Emirats Arabes Unis. On parle alors de réponse française diplomatique « post WTC » pour œuvrer au « dialogue des civilisations » après les tensions « Occident vs. Monde musulman » nées des attentats du 11 septembre 2001. Ainsi pour désamorcer un possible « choc », les EAU et la France développent des nouveaux partenariats sur des bases déjà solides de relations binationales datant du début des années 1970.
En mars 2007, on apprend que le Musée national du Louvre va œuvrer pour une ouverture en 2013 du Musée universel d’Abou Dabi. Simple succursale du Louvre à l’origine, le projet va s’étoffer et finalement le package comprend un musée autonome vitrine française dans cette région du Monde, des prêts et ventes culturels d’œuvres d’art et de collections de la France aux EAU, des transferts techniques de compétences dans la conservation des pièces, des expositions organisées conjointement, etc.
Toujours dans le domaine des sciences et des savoirs, l’université Paris IV Sorbonne ouvre une antenne nommée université Sorbonne-Abu Dhabi. Les diplômes délivrés seront les mêmes qu’en France pour des matières principalement des Sciences Sociales, Juridiques et Administratives (Histoire, Géographie, Droit, Sociologie, Gestion, etc.). Le campus qui va s’ouvrir est prévu pour accueillir 2 000 étudiants venant des EAU et du Golfe. Jusqu’à deux années d’études de mise à niveau ou d’apprentissage du français sont possibles pour les étudiants néophytes et débutants.
L’action culturelle est pleinement une diplomatie d’influence pour modeler les opinions publiques internationales. La contrepartie de ces échanges sera bien souvent impalpable immédiatement. Sur le long terme, des décideurs et des élites seront fortement baigné de culture française : le retour sur investissement passe par là.
Dès 1972, les deux pays signent un contrat d’armement pour la formation des pilotes. Ils se multiplieront ensuite avec l’achat de Leclerc, de Mirage et peut être un jour de Rafale. Les exercices conjoints sont réguliers du fait même d’un accord de défense (avec la France qui se porte au secours du pays agressé selon certaines conditions) signé en 1995.
Mais c’est surtout l’annonce de la construction aux EAU de la troisième base dans l’Océan indien après celles de La Réunion et de Djibouti qui est marquant pour la projection de Puissance. Lors d’une tournée dans le Golfe Persique en janvier 2008, le président Sarkozy officialise l’ouverture pour le 29 mai 2009 d’une base militaire interarmées de 400 à 500 personnels. Cet accord vise alors la sécurisation des voies de transports énergétiques (le détroit d’Ormuz voit transiter 40% de l’or noir mondial) et à la préposition de forces (on la décrira comme « le deuxième porte-avion » de la France) face aux nouvelles menaces présentes dans cette zone. Les sceptiques pointeront le danger de se mettre au fond du Golfe si le détroit est bloqué, le proche voisinage de l’Iran acteur d’une montée aux extrêmes avec les Américains, etc.
Enfin, impactant moins les relations France/EAU, l’ESM de Saint Cyr ouvre une « filiale » en 2011 à Doha au Qatar. Les promotions d’une cinquantaine de cadets formés à la française pourront à terme accueillir des délégations de militaires émiratis.
Il est évidement pas simple de s’y retrouver dans ces accords pour savoir qui mène la danse entre des intérêts sécuritaires ou culturels : l’analyse globale a sans doute prévalu loin d’une approche binationale donnant-donnant. Aujourd’hui, l’Etat n’est plus le seul détenteur des affaires étrangères autant par externalisation que par perte de contrôle des acteurs. On parle ainsi de « diplomatie multiple » pour désigner des voies informelles en plus d’une diplomatie d’Etat traditionnelle : les entreprises françaises devraient donc largement en profiter.
Derrière la volonté de mettre en œuvre des vecteurs pluriels pour contraindre et/ou convaincre l’Autre, il est facile d’y voir les deux distinctions de hard power ou soft power (made in Joseph Nye). Aujourd’hui, le smart power devrait être la synthèse des deux dans un projet global au service d’une politique globale. Il serait d’ailleurs la marque de fabrique de la nouvelle diplomatie (au moins celle animée par le réseau des ambassades au secrétaire d’Etat) de la nouvelle administration Obama emmené par Hilary Clinton.
Mais la France n’en est pas en reste et met en œuvre aussi cette approche au plus haut niveau comme le montre l’exemple des récentes relations et décisions avec les Emirats Arabes Unis. On parle alors de réponse française diplomatique « post WTC » pour œuvrer au « dialogue des civilisations » après les tensions « Occident vs. Monde musulman » nées des attentats du 11 septembre 2001. Ainsi pour désamorcer un possible « choc », les EAU et la France développent des nouveaux partenariats sur des bases déjà solides de relations binationales datant du début des années 1970.
En mars 2007, on apprend que le Musée national du Louvre va œuvrer pour une ouverture en 2013 du Musée universel d’Abou Dabi. Simple succursale du Louvre à l’origine, le projet va s’étoffer et finalement le package comprend un musée autonome vitrine française dans cette région du Monde, des prêts et ventes culturels d’œuvres d’art et de collections de la France aux EAU, des transferts techniques de compétences dans la conservation des pièces, des expositions organisées conjointement, etc.
Toujours dans le domaine des sciences et des savoirs, l’université Paris IV Sorbonne ouvre une antenne nommée université Sorbonne-Abu Dhabi. Les diplômes délivrés seront les mêmes qu’en France pour des matières principalement des Sciences Sociales, Juridiques et Administratives (Histoire, Géographie, Droit, Sociologie, Gestion, etc.). Le campus qui va s’ouvrir est prévu pour accueillir 2 000 étudiants venant des EAU et du Golfe. Jusqu’à deux années d’études de mise à niveau ou d’apprentissage du français sont possibles pour les étudiants néophytes et débutants.
L’action culturelle est pleinement une diplomatie d’influence pour modeler les opinions publiques internationales. La contrepartie de ces échanges sera bien souvent impalpable immédiatement. Sur le long terme, des décideurs et des élites seront fortement baigné de culture française : le retour sur investissement passe par là.
Dès 1972, les deux pays signent un contrat d’armement pour la formation des pilotes. Ils se multiplieront ensuite avec l’achat de Leclerc, de Mirage et peut être un jour de Rafale. Les exercices conjoints sont réguliers du fait même d’un accord de défense (avec la France qui se porte au secours du pays agressé selon certaines conditions) signé en 1995.
Mais c’est surtout l’annonce de la construction aux EAU de la troisième base dans l’Océan indien après celles de La Réunion et de Djibouti qui est marquant pour la projection de Puissance. Lors d’une tournée dans le Golfe Persique en janvier 2008, le président Sarkozy officialise l’ouverture pour le 29 mai 2009 d’une base militaire interarmées de 400 à 500 personnels. Cet accord vise alors la sécurisation des voies de transports énergétiques (le détroit d’Ormuz voit transiter 40% de l’or noir mondial) et à la préposition de forces (on la décrira comme « le deuxième porte-avion » de la France) face aux nouvelles menaces présentes dans cette zone. Les sceptiques pointeront le danger de se mettre au fond du Golfe si le détroit est bloqué, le proche voisinage de l’Iran acteur d’une montée aux extrêmes avec les Américains, etc.
Enfin, impactant moins les relations France/EAU, l’ESM de Saint Cyr ouvre une « filiale » en 2011 à Doha au Qatar. Les promotions d’une cinquantaine de cadets formés à la française pourront à terme accueillir des délégations de militaires émiratis.
Il est évidement pas simple de s’y retrouver dans ces accords pour savoir qui mène la danse entre des intérêts sécuritaires ou culturels : l’analyse globale a sans doute prévalu loin d’une approche binationale donnant-donnant. Aujourd’hui, l’Etat n’est plus le seul détenteur des affaires étrangères autant par externalisation que par perte de contrôle des acteurs. On parle ainsi de « diplomatie multiple » pour désigner des voies informelles en plus d’une diplomatie d’Etat traditionnelle : les entreprises françaises devraient donc largement en profiter.
3 commentaires:
Intéressant billet ; je n'ai toujours pas lu, honte à moi, l'oeuvre de Maurice Vaïsse sur De Gaulle...
A bientôt !
Stéphane.
C'est très dense autant par la qualité que par la quantité... Mais c'est très complet comme étude. Un bon chercheur français.
Bonjour F.
Un petit interview de Girard sur Clausewitz en fin de post si le coeur vous en dit... Une vision peu habituelle du Prussien...
A bientôt
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