L'euphorie est lentement entrain de redescendre après l'annonce (importante) faite hier à propos du contrat Medium Multirole Combat Aircraft visant à équiper l'armée de l'Air indienne de 126 appareils. Pour éviter le travestissement des informations et annonces actuellement disponibles, une analyse fine et prudente est nécessaire.
La proposition commerciale de Dassault Aviation est donc annoncée comme moins chèreque celle de son concurrent dans cette finale à deux face au consortium Eurofighter GmbH (et non Eurocopter comme l'indiquait Le Monde, en plus de mettre en illustration une photo du Gripen de Saab, cf. les entrées d'air "carrées" et non arrondies).
Bien sûr, le seul critère "coûts" n'a pas été déterminant, mais il est intéressant de noter que c'est celui qui a été relevé, plus que les capacités opérationnelles de l'appareil omnirôle (c'est à dire sans reconfiguration importante selon les missions). Capacités dont la Libye a été le révélateur, bien que déjà visibles en Afghanistan (sauf pour l'aspect air-air).
Aujourd'hui, Dassault Aviation serait en possession d'une Letter of Intent (LoI) signée par le gouvernement indien. C'est un document contractuel non contraignant qui peut être cassé et qui peut, dans certains cas, ne pas conduire à la signature du contrat. L'engagement est donc avant tout symbolique et politique plus que financier.
Via ce 1er accord, Dassault et le Contract Negotiation Committee (CNC) indien (dans lequel sera présent l'entreprise Hindustan Aeronautics qui devrait, au moins, assembler les 108 appareils qui seraient produits en Inde) vont entrer en "négociations exclusives" (selon l'Elysée). Ces discussions normées par la LoI pourraient prendre 6 à 9 mois (selon V. Pécresse).
En gros, rien de définitif ne sera signé avant la fin de l'année fiscale indienne (mars 2011), et certainement, cela pourrait durer. Sans oublier les recours possibles d'Eurofighter qui, ayant pris acte, pourraient ralentir la procédure. (cf. les hélicos Fennec ou le retrofit des Mirages 2000 indiens dont Thalès ne semble pas encore avoir vu les 1ères roupies).
Une fois que le CNC et Dassault se sont mis d'accord sur le prix, le niveau de transferts de technologies (un peu de réalisme, aujourd'hui le débat n'est pas oui ou non, mais comment et à quel niveau...), la version du contrat doit encore être approuvée, au minium, par le ministère indien des Finances et le National Security Council.
Enfin, le contexte, en particulier géostratégique et géo-économique, de chaque contrat de ce type empêche sans doute de croire trop facilement à des effets mimétiques importants sur les autres négociations en cours pour l'appareil (Brésil, Emirats Arabes Unis, Qatar, Koweit, bruits de couloirs pour l'aéronavale britannique, etc.).
En effet, les blocages de ces contrats viennent-ils seulement du manque de 1er contrat export du Rafale?
Ne seraient-ce pas aussi le prix (sur le plan symbolique, le cas indien aidera)? De contexte stratégique local (pensons au Pakistan qui voit ces appareils se profiler en plus d'être pris en "tenaille" par un pacte stratégique afghano-indien...)? Aux conséquences organisationnelles qu'induisent un tel saut capacitaire pour de nombreuses forces aériennes? Etc.
Ainsi, une longue procédure ne fait que se poursuivre. Espérons qu'elle aille au bout, d'autant plus que la porte qui s'ouvrirait serait intéressante. L'appareil indigène en développement, leHAL Tejas, suffira-t'il pour les besoins futurs de l'Indian Air Force? En particulier pour ses ambitieux plans de défense conçus pour ne pas atteindre (Dieu soit loué) le seuil nucléaire?
Pas mal de questions donc, quelques réponses possibles aujourd'hui et surtout encore un peu de patience. Gardé au frais six à neuf mois, un bon champagne reste buvable à son débouchonnage...
MAJ1 : en plus des propositions américaines encore répétées pour caser leur F-35 (plausible pas pour ce contrat mais pour celui du coup d'après?), David Cameron a laissé entendre que des recours étaient possibles... De bonne guerre, dirons-nous.
MAJ2 : encore une fois, le débat va porter sur deux points interconnectés (l'un étant en partie la conséquence de l'autre) 1/ le retour en termes d'emplois en France d'un tel contrat (aujourd'hui le programme Rafale, c'est environ 6000 à 7000 emplois directs ou indirects) 2/ le niveau de transferts de technologies consenti (entre risques et nécessités).
Pour trois points de vue, c'est ici.
1 commentaire:
Des bruits de ... ?
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